Regards sur l'éveil
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Je 10 Déc 2009 17:07 Sujet du message: Pourquoi moi dans ce corps là ? |
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Pourquoi moi dans ce corps là ?
Bonjour Daniel, bonjour à tous
daniel a écrit: |
pourquoi moi, dans ce corps là !?" ou plus exactement, "comment se fait-il qu'en suivant le même processus (fécondation, gestation, la claque à la sortie ...) cela a abouti à moi à l'intérieur de ce corps, qui suis conscient de l'intérieur, et d'autre part, à mon petit frère (non, nous ne sommes pas jumeau ...) à "l'intérieur de lui-même", c'est bizarre, non !?
Cela se passe dans deux corps différents, bon d'accord, mais pourquoi moi, à l'intérieur de moi, et lui pas ... alors, qu'à la base, il s'agit dans les deux cas de la fusion d'un spermatozoïde et d'un ovule issus des mêmes parents, une idée ... !? |
Est-il possible de répondre à cette question ? En tout cas, Je vais essayer mais je préviens cela risque être long. En tout cas merci de me faire réfléchir
Prenons la 1ère partie de ta question : Pourquoi moi dans ce corps là ?
Mais es-tu sur d'être dans ton corps ? Et si ce n’était pas plutôt l’inverse, ton corps en toi et pas seulement le tien mais aussi tout le reste, les autres corps.
Il y a un mental attaché à chaque corps mais le mental est -il nous ou plutôt n'est il pas lui aussi en nous ? Et on nous dit qu’on est dans le monde .mais dans cette perspective, c’est plutôt le monde qui est en nous.
Notre corps n’est pas séparé de notre environnement. Il est fait et nourri par cet environnement, il en est indissociable, c'est une évidence pour la science
La réalité c'est l'unité corps- environnement et notre corps réel c'est cette unité. Nous sommes le monde et son corps est le notre. on se croit un point dans le monde mais c'est le monde qui est en nous.
Alors d’où vient cette impression d’être dans un corps, séparé de notre environnement considéré comme extérieur.
D’où vient cette coupure ? De l’ego oui mais cet ego comment et pourquoi ?
Il vient de l'identification à ce corps (et par suite à son mental) Ramana Maharshi ou Nisagardatta le disent bien
Et c’est à partir de cette identification première que se crée l’égo.
Le corps qui dans un premier temps ne se vit pas séparé (j’imagine que c’est le cas chez les bébés) commence progressivement à s’appréhender comme un centre autour duquel tourne son environnement
Au niveau purement visuel et je dis bien purement cad quand la vision n’est pas mélangée avec la pensée, la mémoire, il n’y a aucune distance entre nous et le monde
Et on le voit bien des qu’on pratique la vision sans tête de Douglas Harding. On est un espace qui englobe le monde environnant et qui annule la séparation d’avec lui puisque le monde est situé à zéro cm de nos yeux ,il est une image qui s’inscrit sur notre rétine, je ne m’identifie à aucun point ou objet dans cette image et je suis à égale distance de tous les points et aussi je ne me prends plus pour un point, un objet, un corps dans cette image.
Le philosophe Berkeley et des spécialistes de la vision le disent, si un aveugle né venait à recouvrer la vue d’un coup, il ressentirait cette absence de distance. Ensuite il apprendrait à faire tout le travail de synthèse nécessaire pour reconnaître les objets et agir par rapport à eux.
Bergson dans le premier chapitre de son livre »matière et mémoire »a dit des choses extraordinaires qui intriguent encore les philosophes. Il disait qu’au niveau de cette perception pure, sans intervention donc de la mémoire, il n’y a pas de spectateur extérieur à l’image, pas de sujet percevant et que le monde est une image mais sans spectateur.
Pourtant c’est évident, à la question : qui voit actuellement le clavier sur lequel je tape ces mots ? Je vais répondre spontanément moi Joël.
Vraiment ? Et bien non, ce qui voit, ce sont mes yeux, pas besoin d’un sujet voyant. Et les yeux ce sont les yeux d’un corps avec un cerveau et ce corps, ces yeux appartiennent à ce monde matériel et n’en sont pas distincts, c’est un tout et à ce niveau la perception est un phénomène matériel et non pas psychologique.
Bergson en concluait que la perception n’est pas extérieure aux choses mais est dans les choses mêmes.
D’une certaine façon ce sont les choses qui se perçoivent elles-mêmes ou plus exactement c’est le monde qui se perçoit lui-même par l’intermédiaire des corps. Il n’est pas illuminé par une conscience extérieure. ‘’L’image est auto-lumineuse ‘’, (Deleuze, je cite mes sources pour ceux qui seraient intéressés), le monde est conscience pure (face intérieure) et la conscience est monde (face extérieure) c’est l’âme du monde et c’est à ce niveau que l’éveil se situe.
Maintenant pourquoi on quitte ce niveau unitaire, pourquoi la coupure ?
Mais on n’est pas fait pour vivre une vie purement visuelle et contemplative, on ne reste pas bébé, on grandit et notre corps reste pas immobile, il est fait pour réagir et agir sur l’environnement
Le but de notre incarnation est bien l’action et le cerveau sert à cela.
C’est avec les autres sens que va commencer la coupure, la séparation.
Au niveau de la vision pure, donc, il n’y a aucune distance. Je vois ce clavier, je me sens être ce clavier mais des que je vais m’en servir et mettre mes mains, je vais apprendre la distance entre mon corps et le clavier.
C’est par le sens du toucher que la séparation commence et le toucher c’est pour se servir des choses et agir dans le monde et donc je vais apprendre à nommer les choses pour les reconnaître et les utiliser. C’est là que le langage et la mémoire interviennent pour opérer le travail nécessaire de synthèse sur les sensations et c’est par cette mémoire que se constitue un égo cad un centre. La perception n’est plus pure, on devient un individu moi face à un non-moi, le monde, les autres.
Autre facteur qui contribue à créer un centre psychique : le mouvement. Mon corps est toujours là mais mon environnement change et bouge tourne autour de moi et j’ai l’impression d’être au centre d’une roue, d’ailleurs quand on dit moi, on désigne son corps avec les mains.
La perception n’étant plus pure, elle est partielle car devenue utilitaire.
Si on restait au niveau de la perception pure de l’image monde,on ne ferait aucune sélection et le monde serait d’une incroyable richesse, la vision serait panoramique, l’attention serait globale, on percevrait des tas de choses à la fois, on serait dans l’éden et on verrait peut -être des fées et des anges disait Stephen Jourdain.
Mais la société du fait des nécessités de l’action nous a cassé notre lanterne magique, notre ‘’ machine désirante ‘’(Deleuze) pour faire de nous un simple outil à son service.
Et notre perception devenue sélective prélève juste ce qui est nécessaire à l’action et à la réponse à l’environnement et fait appel pour cela aux souvenirs nécessaires (fonction qui ne fonctionne plus dans la maladie d’Alzheimer).la perception n’est plus ouverture au monde mais prélèvement, un peu comme la perception des impôts.la société nous nourrit et permet notre survie et nous on lui rembourse, on paie notre impôt. Pas de problème, jouons notre rôle mais on n’est pas que cela, on n’est pas un simple outil de cette machine sociale, on est la machine elle-même, on est le monde.
Alors à nous de reconstruire notre machine à jouer et à aimer, notre ‘’corps sans organe dirait Deleuze, un corps non limité par un organisme, à nous de nous éveiller et de sortir de cette sorte de rêve éveillé et conditionnement imposé par la matrix (super film).
J’espère avoir répondu à la question pourquoi moi dans un corps et montré que c’est une illusion, la vraie question c’est pourquoi un corps dans moi ?
Je vois aussi dans ton texte, la question de la naissance (et donc de la mort).dans la perspective où on se place ici, la question ne se pose pas vraiment et procède d’une vision partielle de la réalité ( mais on en est tous là, Spinoza disait que même en sachant que le soleil est à des milliards de km et que la terre tourne autour du soleil, on n’a toujours l’impression visuelle que le soleil est à 200 m de moi et qu’il tourne autour de la terre )
On peut dire aussi naissance et mort mais de qui ?
Pas de moi mais d’un corps qui apparait et disparait. La tradition parle du soi cad de moi, de nous comme le non-né. Deleuze, je cite encore, disait que la mort, c’est la mort des organes et jamais de la vie or on est la vie.
Franchement s’est-on vu naitre et se voit- on mourir ? On sent la mort venir mais on ne la voit pas et quand elle passe, on est probablement déjà ailleurs.
Mais on voit les autres naitre et mourir.la mort c’est toujours la mort des autres, c’est elle qui nous fait souffrir et si on souffre à la perspective de notre départ c’est à cause de nos attaches et celles-ci sont toujours liées aux autres. Il n’y a aucun mal à cela, c’est humain mais des qu’on se place dans une perspective plus large, spirituelle la mort n’est plus un problème, mieux elle n’existe pas.
On m’a dit que je suis né mais moi je n’ai rien vu et parfois j’ai même l’impression d’avoir toujours existé. bon d’accord je suis né mais c’est un savoir de seconde main, les photos de l’enfance, l’acte de naissance etc..
Je pense encore à Douglas Harding avec sa vision sans tête. Les autres disent que j’ai une tête ou quand je me vois dans la glace, je vois bien une tête ou je me rappelle, je sais que j’ai une tête mais ce savoir passe toujours par un intermédiaire : les autres, le miroir, ma mémoire.
Mais si je veux la percevoir directement dans une perception pure bien distincte de la pensée (tout notre malheur, disait Stephen Jourdain, vient de ce mélange entre penser et percevoir et l’éveil consiste à bien les distinguer. quand on perçoit, on perçoit et quand on pense, on pense et çà peut se faire aussi en même temps si c’est nécessaires à la situation, mais sans confusion)
Si donc je reste au niveau de la perception pure sans faire appel à l’imagination alors je ne vois pas de tête mais juste un corps qui commence au niveau de mes épaule, entouré par un environnement, ce corps ici n’est plus au centre mais fait partie de l’environnement. A la place de ma tête, un espace vide rempli par le champ visuel et personne pour le voir.
Douglas Harding disait que cette vision sans tête nous donne immédiatement accès à l’éveil et c’est le sens de tous ses exercices. Dans cette vision sans tête, on se sent transparent et si quelqu’un nous regarde, on aurait presque envie de se retourner pour voir qui il regarde.
Mais ensuite il y a à intégrer cet éveil et douglas reconnait que çà peut prendre très longtemps car on se heurte à toutes sortes de difficultés, la résistance de l’égo, sa tendance à vouloir tout saisir, contrôler et posséder. Et donc en pratiquant cette vision, il la mentalise, s’en extériorise et la vision, l’éveil ne dure pas. Si cette vision sans tête peut devenir permanente, ce n’est pas par une pratique soutenue mais par la répétition de nos erreurs qu’on finit par comprendre alors la pratique disparait et cette vision devient naturelle. D’ailleurs quand on est naturellement en méditation, sans effort ni intention, on s’aperçoit qu’on peut la décrire en terme de vision sans tête mais on peut la décrire d’une infinité d’autres manières. La vision sans tête est une approche et un éclairage de la méditation et de l’éveil parmi d’autres. Toutes se rejoignent.
Mais revenons à cette tête, quand je vois une tête et bien je me situe à la 3e personne du singulier celle qui est objective et objectivé par le regard des autres ( aliéné par leur regard dirait Sartre ) et si je m’identifie à cette personne vue et que je vois, alors je me prends pour un objet et en parlant de moi, je dirai non pas qui je suis mais qui j’ai été et qui je veux être mais jamais ce que je suis car de ce que je suis au présent je ne peux rien dire mais le vivre .
Et à ce niveau on est avec la 1ere personne du singulier et là personne ne peut me voir, cette première personne est sans autre, sans extérieur, sans limite. Cela implique que les autres sont en nous, s’ils ne sont plus au dehors.
Quand je me regarde dans la glace çà me fait un drôle d’effet, je sens un tel décalage avec ce que je sens en m’appréhendant directement. Intérieurement. En fait j’ai l’impression de voir un autre (même impression en écoutant ma voix enregistrée) mais bon je ne suis pas schizophrène et je sais que c’est bien moi mais seulement dans une certaine perspective, extérieure.
Mais pourquoi la gêne devant notre image et notre voix, presque un rejet ? c’est que quelque part, on sait, on sent que ce n’est pas vraiment nous, c’est trop réducteur, trop limité, c’est un rôle.
Donc parler de mon corps, de naissance et de mort etc cela concerne un autre, cette part de moi-même que je peux observer (3e personne du singulier) mais certainement pas le moi-même réel et vivant, la première personne, le je suis, avec lequel on se sent vaste comme le ciel.
daniel a écrit: | <<et d'autre part, pourquoi mon petit frère (non, nous ne sommes pas jumeau ...) à "l'intérieur de lui-même", c'est bizarre, non !?
Cela se passe dans deux corps différents, bon d'accord, mais pourquoi moi, à l'intérieur de moi, et lui pas. |
(la dernière partie de ta question relève plutôt de la biologie et là , je n’y connaît rien )
Pourquoi moi à l’intérieur de moi ? je pense avoir répondu. Pourquoi lui à l’intérieur de lui ? La réponse sera la même.
Mais tu dis aussi :
Pourquoi moi à l’intérieur de moi, et pas lui ?
On n’a a vu qu’au niveau de l’éveil ou perception pure et directe, le problème ne se pose pas .l’autre, les autres sont bien en moi puisque chacun de nous est le monde
Se joue ici la question de l’autre, de l’altérité, (je viens d’écrire sur ce sujet dans un échange avec Joachim dans le topic éveil et état naturel) et c’est une question difficile
L’autre a donc aussi un moi à la première personne auquel on n’a pas accès.
Maintenant le moi de l’autre et le mien sont ils le même ? Oui et non
Oui, au niveau du pur je suis. On ne peut pas différencier un je suis d’un autre, un vide, un rien d’un autre puisqu’ils n’ont pas de contenus et de délimitations.
Non si on rajoute un prénom, je suis Joël, tu es Daniel
Il n’ y a qu’un seul je suis, un seul dieu mais il se singularise toujours et différemment en chacun, c’est le mystère de la différence.
Dans l’approche chrétienne, on parle du mystère de la sainte trinité, dieu est un et plusieurs à la fois
Dieu a un fils unique, le christ qu’on appelle aussi fils de l’homme, l’humanité, comme si le christ se démultipliait à l’infini par écho et reflet mais échos et reflets toujours différents.
Et peut- être notre famille personnelle et l’amour qui nous lie sont il un écho, un reflet de la sainte famille originelle et de l’amour divin…
nos parents images de la mère nature et de dieu le père ( cf l’homme créé à l’image de dieu dans la genèse ) l’événement unique de cette sainte trinité se reproduit à l’infini et à chaque instant.
On a l’impression qu’il y a du multiple alors qu’en réalité il n’y a qu’un. Le monde et le devenir, c’est comme une cigarette que l’on déplace rapidement dans le noir, on a l’impression d’une ligne alors qu’il n’y a que la succession d’un point unique mais dans ce devenir chaque point de cette ligne est unique, neuf et différent car produit par l’un, l’unique qui jamais ne peut se répéter, sinon il ne serait pas créateur.
En tout cas, on voit bien ici que Dieu contient en lui l’altérité, l’autre, la relation je-tu.
Un philosophe, Leibnitz (la Monadologie) considérait chaque âme qu’il appelait monade comme un point de vue de dieu à chaque fois différent sur le monde et comme il considérait la monade comme une substance absolue, une réalité autonome, illimitée, sans dehors et donc sans autre, chaque monade contient la totalité du monde en elle-même mais ne peut connaître et rencontrer les autres monades. L’âme des autres nous est à jamais inaccessible.par âme, il faut entendre le je suis, la conscience de chacun à la 1ere personne. Alors comment ces monades font elles pour faire un monde ? Par une sorte d’harmonie-pré-établie, prédéterminée par dieu.
Je préfère la vision de Spinoza, (l’Ethique) ce qui ne veut pas dire que celle de Leibnitz est fausse .pour Leibniz une âme étant une substance, il y a plusieurs substances.
Pour Spinoza, il ne peut y avoir qu’une seule substance, une seule réalité, Dieu. Une autre substance serait comme une limite (quoi, je ne suis pas unique, le seul dieu, c’est absurde et intolérable !!!) et donc Dieu serait imparfait ce qui est contraire à sa nature.
Mais de toutes les façons chez Leibnitz, l’âme ne sait pas qu’il y a en d’autres et pour elle la solitude n’existe pas puisque on ne se sent seul que par rapports aux autres, à un dehors,, sa solitude ,son vide est plein, son désert est rempli de peuplades.. L’âme de chacun est illimitée donc elle ne peut se sentir limitée.
Alors une seule ou plusieurs substance ?
On peut s’en sortir en disant que chez Leibnitz il y a une substance principale, Dieu le père et des substances secondaires, les enfants de dieu, les âmes, tout cela ne faisant qu’un .on reste dans l’image de la trinité. Leibnitz n'a jamais quitté l’optique chrétienne.
Ce qui n’était pas le cas de Spinoza : pour lui une seule substance Dieu, la nature et les âmes ne sont pas des substances mais des idées, des fonctions, des agents pour son expression, des points singuliers de lui-même.
De Dieu, on ne connait que deux attributs la pensée (l’esprit) et l’étendue (la matière) qui sont infinis puisqu’ils sont lui et à travers ces attributs, Dieu ou la nature s’exprime par les âmes ,les corps et les choses qui sont finis et ces modalités d’expression, il les appelle les modes. Un mode n’est pas une substance car il n’existe pas en lui-même mais toujours par rapport à autre chose (interdépendance, loi de cause et effet) alors qu’une substance est cause de soi et sans rapport avec autre chose Et une âme (pensée) pour lui, est l’idée d’un corps et meurent avec le corps mais néanmoins quelque chose de cette unité âme- corps survit et existe éternellement en tant qu’essence. Cette essence c’est l’odeur de quelqu’un, son style, son charme, sa vibration qu’on sent à travers toutes les formes apparentes quelle nous présente. Si on aime Mozart, on va immédiatement le reconnaitre même si on ne n’a jamais entendu le morceau qu’on écoute.
C’est à ce niveau qu’est notre personnalité réelle, indissociable du je suis. En Dieu, on ne disparait pas dans l’indifférencié, dans l’impersonnel comme pourrait le laisser croire certaines philosophies orientales (le nirvana où la vague disparait dans l’océan) et cette personnalité réelle, Joël, Daniel, existe éternellement en dieu en tant qu’idée mais idée vivante, vibration, intensité.
Voila comment je vois l’unité du personnel et de l’impersonnel : la réalité ultime, le soi du point de vue du mental apparait comme un tableau blanc mais en regardant de plus près, on va s’apercevoir que le blanc est constitué d’une infinité de nuances de blanc, toutes différentes, qui en sont comme les vibrations. (J’emprunte cette image à Deleuze)
Le blanc du tableau s’il est indivisible n’est pas homogène, indifférencié il est fait d’hétérogénéités en fusion. Toutes nos âmes bien que distinctes sont mêlées, inséparables et ce qui permet cette fusion c’est la vie, le soi. On peut considérer que la notion de multiplicités exprime ici l’unité de l’un et du multiple.
On pourrait croire que dans cette voie impersonnelle du je suis, l’autre est nié, écrasé et que d’une certaine façon il disparait quand tout devient un. (Pour certains seul est réel le nirvana, le samsara étant illusoire. le monde, les autres, des illusions) Et bien non.
Chez Spinoza la substance, l’absolu c’est la nature naturante, productrice et les modes les êtres, les choses c’est la nature naturée, produite mais dans les deux cas c’est toujours la nature, cad Dieu. Tout est réel, il y a une réalité absolue et des réalités relatives.
Rien n’est irréel sauf dans notre façon de penser, celle qui crée la séparation .la dualité. Les autres ne disparaissent pas, ce qui disparait c’est la séparation d’avec eux, la distance .la réalité c’est l’unité impersonnel- personnel, un-multiple
Sinon il n’y aurait pas d’amour possible et l’amour c’est toujours l’amour de l’autre, du différent.
L’autre c’est toujours soi (je n’ai pas dit moi) mais en tant que toujours différent, unique, autre justement.
Et aimer c’est aimer la différence, l’autre tel qu’il est. C’est affirmer sa différence et l’aimer pour lui-même.
Je t’aime non parce que tu es ceci ou cela mais parce que tu es simplement toi .l’amour ne juge pas.
Le soi contient en lui structurellement l’altérité. Le soi est l’unité du moi et du non moi, il est l’amour même. On dit Dieu est amour.
Au niveau du je suis, on n’est dans l’amour de la vie. Cet amour est tout sauf narcissique. Narcisse voit toujours la même image dans son reflet mais Dieu voit toujours une image différente. C’est le miracle de dieu se retrouvant lui-même mais en tant que toujours autre. Tout est différent et la même chose à la fois.
Cet exposé théorique, que je n’espère pas trop lourd pour vous (mais long surement) m’a paru nécessaire pour mieux comprendre les rapports entre le soi et l’autre, l’impersonnel et le personnel
.on pourrait dire que ce sont juste des idées (je suis mais je ne suis cette pensée)
Mais ces idées font du bien, peuvent apaiser notre esprit (en tout cas pour moi) et aider à percevoir intuitivement ce qu’elles expriment.
Spinoza dirait que cette façon de raisonner peut aider à éliminer les idées fausses, dualistes qui nous voilent le réel et nous faire passer de la raison ou intellect à l’intuition ou perception directe du réel.
En lisant '' l’éthique "de Spinoza, à l’aide de commentaires car c’est très concentré et ardu de par sa présentation particulière, géométrique, on peut, si on rentre à fond dans sa pensée véritablement dépasser les mots et vivre ce qu’il essaie de nous dire, accéder à l’intelligence intuitive où connaissance de soi, de dieu et du monde se fondent en une seule connaissance. La philosophie est une voie au même titre que la méditation.
Je ne sais pas Daniel si j’ai répondu à ta question si difficile, en tout cas j’ai essayé
En tout cas merci à toi et à tout ceux qui ont eu la patience de me lire jusqu’au bout.
Amicalement Joël
Dernière édition par riseohms le Lu 14 Déc 2009 21:20; édité 2 fois |
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8541 Localisation: belgique
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Posté le: Ve 11 Déc 2009 4:37 Sujet du message: |
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bonjour rise, bonjour "moi" ... bonjour tout l'monde !
et bien, je l'ai ma réponse ... ! j'vais en faire quoi, moi ... en tout cas, merci rise ! merci de ce temps consacré à cette question !
tu dis :
Citation: | Prenons la 1ère partie de ta question : Pourquoi moi dans ce corps là ?
Mais es-tu sur d'être dans ton corps ? Et si ce n’était pas plutôt l’inverse, ton corps en toi et pas seulement le tien mais aussi tout le reste, les autres corps.
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ah stop, on arrête tout !
bon, à vrai dire, je ne peux pas vraiment contredire cette possibilité, j'ai pas beaucoup d'arguments pour remettre cette possibilité, en cause ... tout ce qu'on peut dire, c'est que le corps n'a pas besoin de la "conscience" pour "apparaître", alors, que la conscience, elle, a besoin du corps, pour être produite ... et flûte, même cet argument là, ne tient pas la route ... sauf, du point de vue objectif ...
car, vous allez me dire, je le sens bien, (même si c'est du point de vue subjectif .. ) que pour que le "corps" apparaisse, il faut bien, qu'il y ait la conscience pour s'en rendre compte ... ce n'est qu'à ce moment là, que le "corps " vient à l'existence ... petits filous !
si c'est le cas, alors nous entrons dans une "autre dimension", et avec les sensations, la perception, le corps, apparaîtrait, en même temps, les autres, le proche, tout ce qui se présente dans notre champs de perception ... mais à ce moment là, avec "l'espace"(ce qui se passe au présent), naît aussi, ce qui deviendra "notre histoire", ainsi, que, tout ce qui permettra de connaître ce qui a été, est, et sera, notre histoire "personnelle" s'inscrivant dans l'histoire de l'humanité, du Vivant, de tout ce qui est (a été, et sera ...), ça donne le vertige, non !?
tu dis :
Citation: | Notre corps n’est pas séparé de notre environnement. Il est fait et nourri par cet environnement, il en est indissociable, c'est une évidence pour la science
La réalité c'est l'unité corps- environnement et notre corps réel c'est cette unité. Nous sommes le monde et son corps est le notre. on se croit un point dans le monde mais c'est le monde qui est en nous.
Alors d’où vient cette impression d’être dans un corps, séparé de notre environnement considéré comme extérieur.
D’où vient cette coupure ? De l’ego oui mais cet ego comment et pourquoi ?
Il vient de l'identification à ce corps (et par suite à son mental) Ramana Maharshi ou Nisagardatta le disent bien
Et c’est à partir de cette identification première que se crée l’égo.
Le corps qui dans un premier temps ne se vit pas séparé (j’imagine que c’est le cas chez les bébés) commence progressivement à s’appréhender comme un centre autour duquel tourne son environnement
Au niveau purement visuel et je dis bien purement cad quand la vision n’est pas mélangée avec la pensée, la mémoire, il n’y a aucune distance entre nous et le monde
Et on le voit bien des qu’on pratique la vision sans tête de Douglas Harding. On est un espace qui englobe le monde environnant et qui annule la séparation d’avec lui puisque le monde est situé à zéro cm de nos yeux ,il est une image qui s’inscrit sur notre rétine, je ne m’identifie à aucun point ou objet dans cette image et je suis à égale distance de tous les points et aussi je ne me prends plus pour un point, un objet, un corps dans cette image.
Le philosophe Berkeley et des spécialistes de la vision le disent, si un aveugle né venait à recouvrer la vue d’un coup, il ressentirait cette absence de distance. Ensuite il apprendrait à faire tout le travail de synthèse nécessaire pour reconnaître les objets et agir par rapport à eux.
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tout ce que tu dis, ici, et ce qui suit, fait merveilleusement écho à cela, me semble-t-il !
tu dis, encore ...
Citation: | Je vois aussi dans ton texte, la question de la naissance (et donc de la mort).dans la perspective où on se place ici, la question ne se pose pas vraiment et procède d’une vision partielle de la réalité ( mais on en est tous là, Spinoza disait que même en sachant que le soleil est à des milliards de km et que la terre tourne autour du soleil, on n’a toujours l’impression visuelle que le soleil est à 200 m de moi et qu’il tourne autour de la terre )
On peut dire aussi naissance et mort mais de qui ?
Pas de moi mais d’un corps qui apparait et disparait. La tradition parle du soi cad de moi, de nous comme le non-né. Deleuze, je cite encore, disait que la mort, c’est la mort des organes et jamais de la vie or on est la vie.
Franchement s’est-on vu naitre et se voit- on mourir ? On sent la mort venir mais on ne la voit pas et quand elle passe, on est probablement déjà ailleurs.
Mais on voit les autres naitre et mourir.la mort c’est toujours la mort des autres, c’est elle qui nous fait souffrir et si on souffre à la perspective de notre départ c’est à cause de nos attaches et celles-ci sont toujours liées aux autres. Il n’y a aucun mal à cela, c’est humain mais des qu’on se place dans une perspective plus large, spirituelle la mort n’est plus un problème, mieux elle n’existe pas.
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ben oui, dans cette perspective, c'est l'évidence même ... !
comme disait lavoisier : " rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ! " ...
tu poursuis ... :
Citation: | Si donc je reste au niveau de la perception pure sans faire appel à l’imagination alors je ne vois pas de tête mais juste un corps qui commence au niveau de mes épaule, entouré par un environnement, ce corps ici n’est plus au centre mais fait partie de l’environnement. A la place de ma tête, un espace vide rempli par le champ visuel et personne pour le voir.
Douglas Harding disait que cette vision sans tête nous donne immédiatement accès à l’éveil et c’est le sens de tous ses exercices. Dans cette vision sans tête, on se sent transparent et si quelqu’un nous regarde, on aurait presque envie de se retourner pour voir qui il regarde. |
et oui ... cela rejoint, tout à fait, me semble-t-il, ce que dit le poto maîmonide (penseur juif), "Dieu, c'est, ce(lui) qui connaît, ce qui est connu, et la connaissance, elle-même, qui sont Un" ... dans l'instant, on peut vivre cette relation là ... ce qui est connu, alors, révèle ce(lui) qui connaît ... cool, non ! le connu, lui, se révèle être, les sensations, les émotions, les penées, les impressions, les sentiments, le corps, bien sûr, l'environnement, etc ...
tu dis :
Citation: | Dans l’approche chrétienne, on parle du mystère de la sainte trinité, dieu est un et plusieurs à la fois
Dieu a un fils unique, le christ qu’on appelle aussi fils de l’homme, l’humanité, comme si le christ se démultipliait à l’infini par écho et reflet mais échos et reflets toujours différents.
Et peut- être notre famille personnelle et l’amour qui nous lie sont il un écho, un reflet de la sainte famille originelle et de l’amour divin…
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oui ! Dieu est relation !
Citation: | Pour Spinoza, il ne peut y avoir qu’une seule substance, une seule réalité, Dieu. Une autre substance serait comme une limite (quoi, je ne suis pas unique, le seul dieu, c’est absurde et intolérable !!!) et donc Dieu serait imparfait ce qui est contraire à sa nature.
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oui, je connais ... on ne remerciera, jamais assez, spinoza, pour avoir pu "dégager" cette évidence de tout le "fatra" conceptuel qui demeurait jusque là ...
de ce fait, d'un point de vue, vrai, non-duel, il ne peut exister, par exemple, la matière et le Divin, soit, tout est matière, soit, tout est Divin (conscience, Soi ...) n'est-c'pas !
pour finir :
Citation: | De Dieu, on ne connait que deux attributs la pensée (l’esprit) et l’étendue (la matière) qui sont infinis puisqu’ils sont lui et à travers ces attributs, Dieu ou la nature s’exprime par les âmes ,les corps et les choses qui sont finis et ces modalités d’expression, il les appelle les modes. Un mode n’est pas une substance car il n’existe pas en lui-même mais toujours par rapport à autre chose (interdépendance, loi de cause et effet) alors qu’une substance est cause de soi et sans rapport avec autre chose Et une âme (pensée) pour lui, est l’idée d’un corps et meurent avec le corps mais néanmoins quelque chose de cette unité âme- corps survit et existe éternellement en tant qu’essence. Cette essence c’est l’odeur de quelqu’un, son style, son charme, sa vibration qu’on sent à travers toutes les formes apparentes quelle nous présente. Si on aime Mozart, on va immédiatement le reconnaitre même si on ne n’a jamais entendu le morceau qu’on écoute.
C’est à ce niveau qu’est notre personnalité réelle, indissociable du je suis. En Dieu, on ne disparait pas dans l’indifférencié, dans l’impersonnel comme pourrait le laisser croire certaines philosophies orientales (le nirvana où la vague disparait dans l’océan) et cette personnalité réelle, Joël, Daniel, existe éternellement en dieu en tant qu’idée mais idée vivante, vibration, intensité.
Voila comment je vois l’unité du personnel et de l’impersonnel : la réalité ultime, le soi du point de vue du mental apparait comme un tableau blanc mais en regardant de plus près, on va s’apercevoir que le blanc est constitué d’une infinité de nuances de blanc, toutes différentes, qui en sont comme les vibrations. (J’emprunte cette image à Deleuze)
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pffou ! ça déménage dans ce blanc menthol ! ouais ! belle vibration !
mais alors, ces "vibrations" pré-existent-elles aux identifications avec ce qui est connu (voir plus haut ... !) ...
Citation: | L’autre c’est toujours soi (je n’ai pas dit moi) mais en tant que toujours différent, unique, autre justement. |
très bien vu ! cela répondrait, parfaitement, à ma question ! le reste ("Cela se passe dans deux corps différents, bon d'accord, mais pourquoi moi, à l'intérieur de moi, et lui pas" ...) relevrait, plutôt, de la "Magie" du Monde !
Citation: | En lisant '' l’éthique "de Spinoza, à l’aide de commentaires car c’est très concentré et ardu de par sa présentation particulière, géométrique, on peut, si on rentre à fond dans sa pensée véritablement dépasser les mots et vivre ce qu’il essaie de nous dire, accéder à l’intelligence intuitive où connaissance de soi, de dieu et du monde se fondent en une seule connaissance. |
"maîmonide", je vous disais !
voilà, on est arrivé, au bout, tout ce que tu dis, là, fait écho ... j'avais bien mon avis, un avis de matérialiste ... mais il s'est décomposé devant ta démonstration ... il se peut bien, finalement, que la Conscience soit la seule réalité, le coup de "folie" de Dieu, ... pas de l'Homme, quand même !
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Ve 11 Déc 2009 14:52 Sujet du message: |
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bonjour daniel et à tous
merci de ta lecture je suis content que tu ai apprécié ma réponse
daniel a écrit: | pour que le "corps" apparaisse, il faut bien, qu'il y ait la conscience pour s'en rendre compte ... ce n'est qu'à ce moment là, que le "corps " vient à l'existence ... |
oui pour que le corps apparaisse il a d'abord besoin d'autres corps, nos parents mais il apparait bien dans la conscience...sans la conscience pas de corps mais sans le corps ,sans la matière, pas de conscience non plus
matière et esprit sont les deux faces indissociables d'une même réalité.. ce qui ne veut pas dire que leurs rapports soient de type face à face ou vis à vis ce qui reviendrait à les faire rentrer dans une relation sujet- objet, il vaut mieux parler de correspondances, de parallélisme et non de relations entre les deux.. car elles ne sont pas deux réalités différentes, il n'y a qu'une seule realité . esprit et matiere ne sont pas des substances mais des aspects ( attributs chez spinoza ) d'une même realité que notre intellegence apprehende
la conscience ne regarde pas la matière, n'est pas spectatrice ou plutot elle l'est sans l'être ( c'est une présence,une attention sans objet )
daniel a écrit: | si c'est le cas, alors nous entrons dans une "autre dimension", et avec les sensations, la perception, le corps, apparaitrait, en même temps, les autres, le proche, tout ce qui se présente dans notre champs de perception ... mais à ce moment là, avec "l'espace"(ce qui se passe au présent), naît aussi, ce qui deviendra "notre histoire", ainsi, que, tout ce qui permettra de connaître ce qui a été, est, et sera, notre histoire "personnelle" s'inscrivant dans l'histoire de l'humanité, du Vivant, de tout ce qui est (a été, et sera ...), ça donne le vertige, non !? |
oui le monde est le corps de dieu, le livre ou s'inscrit la vie,,son devenir l'histoire, notre histoire, le corps de dieu l surface d'enregistrement.. ) les lettres,les mots ,le discours de ce livre c'est la pensée et les images que ce discours provoque c'est la matière, le film de la vie sur le grand écran blanc qu'est la conscience pure
sortons des mots de la pensée alors c'est dieu qui apparait
le monde serait comme un château de sable et le sable c'est dieu
et l'éveil consiste à reconnaitre la nature de sable du château et du reste et donc à en percevoir l'unité
daniel a écrit: |
cela rejoint, tout à fait, me semble-t-il, ce que dit le poto maîmonide (penseur juif), |
je ne le connais pas sauf de nom
daniel a écrit: |
"Dieu, c'est, ce(lui) qui connaît, ce qui est connu, et la connaissance, elle-même, qui sont Un" . |
oui la connaissance en tant qu'acte est le milieu du sujet connaissant et de l'objet connu et si on arrive à se situer à ce milieu alors la séparation sujet- objet disparait d'où les sensations de fusion, d'être le monde et d'être ce qu'on perçoit ou comme dirait krishnamurti l'observé est l'observateur
et comme tu dis plus loin
daniel a écrit: |
Dieu est relation ! |
...
daniel a écrit: |
de ce fait, d'un point de vue, vrai, non-duel, il ne peut exister, par exemple, la matière et le Divin, soit, tout est matière, soit, tout est Divin (conscience, Soi ...) n'est-c'pas !
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et bien non justement.
Deleuze nous disait : renoncez aux alternatives: soit. soit, ou bien ou bien ( dualité )
remplacez les par la conjonction: et.. et..( non dualité ) on peut affirmer les deux contraires à la fois , c'est se situer au milieu.
.
ce qui est génial avec Spinoza. c'est qu'il est le premier à avoir envisagé ( sur la scène philosophique ) que dieu puisse aussi être corporel, matériel au grand scandale de tous alors que jusqu'ici dieu était incorporel et parfait. la matière ( le corps ) étant considérée comme impure ,imparfaite., dieu étant parfait. on l'a accusé d'athéisme, il a été excommunié de la communauté judaïque.. il a failli être assassiné. chez Spinoza dieu est la nature, le monde, pas en dehors, il est la réalité qu'il appelle substance et cette substance est appréhendée par notre intelligence sous deux aspects qu'il appelle attributs: on en connait que deux la pensée et l'étendue mais il y en a une infinité d'autres et à notre époque on pourrait considérer que l'énergie, la réalité quantique comme un de ces attributs possibles car leur mode de fonctionnement n'a rien à voir avec la matière, l'étendue apparente. chaque attribut est infini et complètement indépendant, sans relations avec les autres attributs.. ce qui implique que la cause de ce qui se passe dans le domaine du corps est dans la matière et la cause de ce qui se passe dans le domaine de la pensée (idées, sentiments , affects ) est dans la pensée. inutile de chercher une relation entre le cerveau et la pensée,on ne trouvera jamais une pensée dans un cerveau mais des neurones en action et des zones qui correspondent à ce qui se passe dans la pensée mais de là à dire que c'est le cerveau qui crée la pensée ( comme le pense les neurobiologistes ou l'inverse ..relève d'une interprétation.
pour penser l'unité du corps et de l'esprit il faut les considérer comme deux aspects d'une même réalité, l'homme, aspects indissociables, intérieur,la pensée et extérieur, le cerveau
et parler non pas en terme de relation entre eux mais en terme de correspondances, de parallélisme.:ce qui se passe au niveau de la pensée se passe aussi au niveau du cerveau, et il ne se passe pas deux évènements mais un seul.
en fait Spinoza peut satisfaire à la fois les matérialistes et les spiritualistes.
de cette vision spinoziste , on peut conclure que le réel (donc le monde et tout ce qu'on vit ) est parfait,infini et indivisible, formant un tout car il est dieu or dieu est parfait, infini et parfait d'où la nécessité d'accepter ce qui est
daniel a écrit: |
pffou ! ça déménage dans ce blanc menthol ! ouais ! belle vibration !
mais alors, ces "vibrations" pré-existent-elles aux identifications avec ce qui est connu (voir plus haut ... !) ... |
oui ,ces nuances, ces vibrations que nous sommes pré-existent aux identifications.
deleuze parlait de singularités pré-individuelles, pré-personnelles , on est ici à un niveau pré-réflexif ou intensif , hors du domaine des intentions et des calculs ou des représentations, on est dans la présence pure, la vie même..
par rapport à la lave d'un volcan, le niveau des représentations et des apparences matérielles correspondrait à la lave refroidie et craquelée où les parties sont bien distinctes et séparées.. le niveau intensif c'est la lave en fusion où il n'y 'a pas de séparations et de distinctions apparentes, la la lave est indivisible ce qui n'est pas le cas au niveau de la lave refroidie
mais en ce qui nous concerne l'intensif et les intentions, le monde en fusion et le monde visible sont ensembles, pas d'avant et d'apres, tout se passe ici et maintenant .
les divisions apparentes ne sont plus perçues comme réelles d'où le sentiment d'unité.. Spinoza appelle ces divisions apparentes les distinctions modales cad non réelles mais pour lui le réel, l'étendue en tant qu'attribut est indivisible. l'attribut en lui même n'est pas autre que la substance ou Dieu : l'étendue, la matière. la pensée sont Dieu, les modes que nous sommes en sont l'expression.
avec l'éveil , on accède au niveau de la lave en fusion, de l'intensif et on voit l'unité dans la diversité cad le monde redevient enfin vivant et vivable.
à propos de Deleuze , j'ai donné à nad hier des liens
où on peut entendre en mp3 ou lire un séminaire sur Spinoza, je conseille plutôt de l'entendre, il m'a complètement fasciné. lire Spinoza est difficile mais entendre Deleuze en parler est lumineux..
un jour, je lui ai demandé ; comment accéder à ce corps illimité qu'il appelait corps sans organe, (ou substance-dieu ou Soi, je suis ou dans son langage :champ d'immanence ou plan de composition du désir ou energie de la vie ou conatus chez spinoza cf le tableau blanc ou etendue pure source des modes)
il m'a répondu: faut être très malin, c'est un art d"éliminer les tensions ( cf lâcher prise !!! )
voici ces liens
e site la voix de deleuze où on peut entendre des mp3
http://www.univ-paris8.fr/deleuze/
en particulier le cours sur spinoza du 17.03.81 ' immortalité et éternité. '( qui existe aussi en cd dans le commerce )
à propos de la phrase de spinoza: nous sentons et expérimentons que nous sommes éternels
1- http://www.univ-paris8.fr/deleuze/article.php3?id_article=151
2- http://www.univ-paris8.fr/deleuze/article.php3?id_article=24
3- http://www.univ-paris8.fr/deleuze/article.php3?id_article=26
4- http://www.univ-paris8.fr/deleuze/article.php3?id_article=28
daniel a écrit: | voilà, on est arrivé, au bout, tout ce que tu dis, là, fait écho ... j'avais bien mon avis, un avis de matérialiste ... mais il s'est décomposé devant ta démonstration ... il se peut bien, finalement, que la Conscience soit la seule réalité, le coup de "folie" de Dieu, ... pas de l'Homme, quand même ! |
à mon avis un matérialisme cohérent ne s'oppose pas à un spiritualisme cohérent et la cohérence c'est la non -dualité.. leur opposition est un faux problème.. on n'est ici ni croyant ni incroyant, mais au delà de la croyance.. je suis d'accord avec saint Thomas, je ne crois que ce que je vois mais est ce encore de la croyance.. on peut voir dieu ou plutôt le sentir dans ce qu'on voit.
Deleuze se revendiquait matérialiste !!
bon là je vais commencer à répondre à Joaquim dans le topic éveil et état naturel , la réponse à ta question m'ayant pris un temps fou
amities
joel
ps , je devrais utiliser les smiles, j'en ai pas l'habitude
Dernière édition par riseohms le Sa 12 Déc 2009 10:50; édité 2 fois |
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joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5627 Localisation: Suisse
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Posté le: Ve 11 Déc 2009 19:53 Sujet du message: |
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Bonjour daniel et Joël,
Brillant exposé, Joël, merci pour tous ces éclaircissements. C'est un plaisir de te voir emprunter à tous ces philosophes des pensées qui permettent de voir la même chose sous un autre angle. Mais il me semble qu'il ne s'agit pas à proprement parler d'une réponse, mais de l'indication de directions au bout desquelles une réponse peut être trouvée, au-delà des mots. Parce que les mots, eux, butent sur cette question qu'il ne parviennent nullement à entamer. En tous cas, si j'en reste au niveau des mots, cette question demeure une énigme inaltérable : Pourquoi dans ce corps y a-t-il "moi" ? J'admets bien sûr ta démonstration consistant à montrer que le monde est en moi, plus que je ne suis en lui. Mais cela ne fait pas pour autant de mon corps un simple objet parmi tant d'autres. Parce que tout ce qui m'arrive, arrive à ce corps. Tous les autres objets sont accessoires à l'intérieur de mon monde, lui est nécessaire. La question est alors : pourquoi "lui" ? Pourquoi "lui" et pas "un autre" ? C'est la même question que : pourquoi "moi" ? Le monde entier est en moi, soit, j'en conviens. Mais pourquoi en "moi", et pas en "toi" ? Bien sûr, je peux me dire qu'il est présent aussi en "toi", mais pour le faire, je dois transposer ce que je vis pour le mettre en toi, autrement dit je dois passer d'un regard en première à un regard en troisième personne, pour nous comparer tous les deux de l'extérieur. Alors qu'en "moi", cela m'est donné d'emblée. Pourquoi ? Cette question ne peut, pour une raison logique inflexible, recevoir de réponse de nature discursive. Parce qu'elle interroge ce qui fait que le monde existe (on a bien convenu que le monde était contenu en moi, et que donc, interroger mon existence, c'est interroger l'entièreté du monde). Or rien, à l'intérieur du monde, ne peut rendre compte de son existence. C'est un principe mathématique, démontré par Gödel : on ne peut trouver, à l'intérieur d'un ensemble donné, une loi qui rende compte de l'ensemble lui-même. Cela ne peut se faire qu'à l'intérieur d'un ensemble de rang supérieur (cf. ici). Or il n'y a pas d'ensemble supra-ordonné au monde. En tous cas aucun qui soit pensable, donc dicible.
daniel a écrit: | et flûte, même cet argument là, ne tient pas la route ... sauf, du point de vue objectif ... |
J'ai lu dernièrement (je ne sais plus où...) que Jourdain affirmait que si on cessait de confondre pensées et perceptions, on s'éveillait. Il me semble qu'il y a toute une quantité de pensées (p. ex. "la conscience a besoin du corps pour être produite") que tu as tendance à mettre au même niveau que les perceptions. |
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8541 Localisation: belgique
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Posté le: Ve 11 Déc 2009 20:23 Sujet du message: |
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bonsoir joaquim !
qu'entends-tu par perceptions !? |
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joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5627 Localisation: Suisse
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Posté le: Ve 11 Déc 2009 20:29 Sujet du message: |
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daniel a écrit: | qu'entends-tu par perceptions !? |
Bonsoir daniel. Je te vois venir. Existe-t-il une perception qui ne contienne pas déjà de la pensée ? Tu as raison. Ce que je voulais dire est quand même juste aussi. J'entendais là par "pensée" tout ce qu'on prend pour acquis à la suite d'un raisonnement, et par perception tout ce qui se donne à soi sans qu'on n'y prenne aucune part (le choc de la réalité). La position en "première personne" est purement perceptive, alors que la position en "troisième personne" mélange des perceptions et des pensées. |
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8541 Localisation: belgique
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Posté le: Ve 11 Déc 2009 20:31 Sujet du message: |
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merci, c'est très clair, maintenant !
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miboogh
Inscrit le: 24 Fév 2007 Messages: 202
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Posté le: Ve 11 Déc 2009 23:24 Sujet du message: |
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Daniel a écrit: | pourquoi moi, dans ce corps là !?" ou plus exactement, "comment se fait-il qu'en suivant le même processus (fécondation, gestation, la claque à la sortie ...) cela a abouti à moi à l'intérieur de ce corps, qui suis conscient de l'intérieur, et d'autre part, à mon petit frère (non, nous ne sommes pas jumeau ...) à "l'intérieur de lui-même", c'est bizarre, non !?
Cela se passe dans deux corps différents, bon d'accord, mais pourquoi moi, à l'intérieur de moi, et lui pas ... alors, qu'à la base, il s'agit dans les deux cas de la fusion d'un spermatozoïde et d'un ovule issus des mêmes parents, une idée ... !? |
Bonsoir Daniel,
Dans ce corps-là, et dans cette vie-là, et cette histoire ? Peut-être pour mieux t'en éjecter ?
On peut imaginer deux voies possibles.
L'une prend appui sur l'observation que la Vie poursuit son cours dans un Tout interdépendant et autonome de causes et d'effets qui se perpétuent d'instant en instant. La Nature Réelle, qui est Une et infinie, est omniprésente et immaculée dans chaque être, pas du fait d'une réincarnation, mais de celui de son omniprésence et seule Réalité, substrat de tout ce qui est. L'éveil n'est pas sous-jacent à l'histoire, il est sous-jacent à l'êtreté dans l'aspiration à sa propre unification car l'incarnation se fait dans l'oubli de son origine. Ici il n'y a pas de corrélation entre l'Etre et l'histoire relative. Il en est seulement le connaissant. Il se l'approprie par ignorance.
L'autre est celle de l'hypothèse de la réincarnation, dans laquelle la vie qui nous est allouée correspond aux besoins nécessaires à ce qu'un cheminement vers l'éveil à sa Nature Réelle se poursuive. On a pas réussi du premier coup, il faut revenir Ou revenir pour d'autres raisons propres au désir de revivre ...
Cette dernière peut d'ailleurs dériver de la première.
S'il te chante d'en savoir plus ...
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8541 Localisation: belgique
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Posté le: Sa 12 Déc 2009 5:37 Sujet du message: |
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ici, je dis :
Citation: | car, vous allez me dire, je le sens bien, (même si c'est du point de vue subjectif .. ) que pour que le "corps" apparaisse, il faut bien, qu'il y ait la conscience pour s'en rendre compte ... ce n'est qu'à ce moment là, que le "corps " vient à l'existence ... petits filous !
si c'est le cas, alors nous entrons dans une "autre dimension", et avec les sensations, la perception, le corps, apparaîtrait, en même temps, les autres, le proche, tout ce qui se présente dans notre champs de perception ... mais à ce moment là, avec "l'espace"(ce qui se passe au présent), naît aussi, ce qui deviendra "notre histoire", ainsi, que, tout ce qui permettra de connaître ce qui a été, est, et sera, notre histoire "personnelle" s'inscrivant dans l'histoire de l'humanité, du Vivant, de tout ce qui est (a été, et sera ...), ça donne le vertige, non !?
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merci rise, d'avoir permis que cela ait fait tilt ...
miboogh dit :
Citation: | Cette dernière peut d'ailleurs dériver de la première.
S'il te chante d'en savoir plus ...
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beh, pourquoi pas ! hè !
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Sa 09 Jan 2010 14:43 Sujet du message: |
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Bonjour Joaquim
Avec du retard je vais essayer de te répondre
Je vois trois questions: la question du corps
La question du monde
La question des autres cad de l’intersubjectivité
1- Le corps
joaquim a écrit: |
Mais cela ne fait pas pour autant de mon corps un simple objet parmi tant d'autres. Parce que tout ce qui m'arrive, arrive à ce corps. Tous les autres objets sont accessoires à l'intérieur de mon monde, lui est nécessaire> |
Tu as raison. Parler du corps comme un contenu en moi, c’est le considérer comme un corps objet
Ce qu’il est à la 3e personne du singulier, le corps que je vois dans le miroir, que les autres perçoivent et objet parfois de la médecine
Mais le corps existe aussi à la première personne, c’est le corps propre de merleau ponty ; un corps sentant et senti, vécu de l’intérieur, pas du tout appréhendé comme un objet mais directement, sans distance
Et ce corps à la première personne comme le soi n’a pas de limites et n’est pas séparé de son environnement, on pourrait même dire que ce qu’on appelle conscience non mentale, c’est la conscience de ce corps de tout le corps, un pur sentir
Deleuze pour le décrire parle de corps sans organe.les organes appartenant au corps objet de la 3e personne.
Du point de vue de ce corps propre le monde est vécu comme chair ( merleau ponty ), extension de ma propre chair
Pas de différence entre la conscience et le corps au niveau de la 1re personne , conscience et corps illimités, le monde est mon corps
2-le monde
joaquim a écrit: | Parce qu'elle interroge ce qui fait que le monde existe (on a bien convenu que le monde était contenu en moi, et que donc, interroger mon existence, c'est interroger l'entièreté du monde). Or rien, à l'intérieur du monde, ne peut rendre compte de son existence. C'est un principe mathématique, démontré par Gödel : on ne peut trouver, à l'intérieur d'un ensemble donné, une loi qui rende compte de l'ensemble lui-même. Cela ne peut se faire qu'à l'intérieur d'un ensemble de rang supérieur (cf. ici). Or il n'y a pas d'ensemble supra-ordonné au monde. En tous cas aucun qui soit pensable, donc dicible……..«Wittgenstein montre que nous ne pourrions connaître quelque chose sur le monde comme totalité que si nous pouvions en sortir; mais si cela était possible, ce monde ne serait plus tout le monde. Cependant notre logique ne peut rien connaître hors du monde |
Ma formulation ‘’le corps et le monde sont en moi’’ laisse entendre que le moi, la conscience est une réalité supérieure englobant le monde qui en serait le contenu par rapport auquel elle serait une extériorité, une transcendance et alors effectivement ce que tu dis est justifié, le principe de Gödel s’y applique
Il n’est pas question de sortir du monde, il s’agit de rester dans le cadre d’une immanence absolue
Mais il n’y a pas d’une part le contenant et le contenu, la conscience et le monde en tant que distincts, il n’y a pas une réalité relative et une réalité absolue qui l’engloberait, il n’y a qu’une seule réalité. Parler de contenant et de contenu est une image mais pas la réalité ou en tout cas il ne faut pas les considérer comme séparés ou distincts afin de rester dans une approche non dualiste
Par ex On pourrait considérer leur rapport comme ceux de la ligne et des nœuds
La ligne pure étant le contenant, la conscience ou le monde en tant que tel et les nœuds ce qu’on perçoit du monde, les choses, les corps cad le contenu
Il n’y a pas deux réalités, les nœuds c’est toujours la ligne.
On peut aussi parler du monde pur, en soi comme d’un drap et des choses du monde comme des plis de ce drap
bref il n’est pas nécessaire de sortir du monde et de faire appel à un ensemble supérieur pour le justifier
Le monde est la face objective de cette realité et la conscience sa face subjective mais c’est une seule réalité et on voit bien lorsque on appréhende le monde tel qu’ il est, qu’il est conscience , qu’il est soi même
Mais parler de deux faces c’est encore dualiste.
On peut considérer cette réalité comme un ruban de moebius qui ne possède qu'une seule face contrairement à un ruban classique qui en possède deux.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ruban_de_M%C3%B6bius
Considérons le champ visuel : la conscience n’est pas face à ce champs visuel, elle ne l’englobe pas non plus. Elle est ce champs visuel et ce champs n’est pas dissociable de son contenu cad des objets perçus, il n’y a pas de spectateur extérieur au champ. Ce spectateur est une pure illusion.<< La simple apparition des bords de notre visage dans notre champ visuel crée un effet de recul qui est exactement ce dont a besoin la notion de sujet spectateur pour s’immiscer >>
En réalité C’est le champ qui se perçoit lui-même .la perception est dans les choses
En fait pour rendre compte du contenu du monde, il faut effectivement quelque chose de supérieur mais qui n’est pas extérieur, c’est la notion de champ.
Au niveau de la sensation par ex visuelle, nous n’avons aucune distance par rapport à elle, nous sommes nos sensations. Les sensations sont pure immanence, la sensation n’est pas immanente à un sujet. elle se suffit à elle-même, on est ce qu’on voit-
<<<la sensation n’étant pas référée à autre chose qu’elle-même, n’étant donc pas relatives , on peut parler comme Raymond Ruyer de ‘’surfaces absolues ‘’. Le champ visuel est un absolu de présence ou d’existence qui nait à même un tissu organique. La surface cérébrale qui donne naissance au champ visuel en unifiant les éléments qui la constituent donne l’impression de se survoler elle-même puisqu’elle réussit sur place ce qui nécessiterait une dimension supplémentaire. Ce qui caractérise la conscience c’est l’auto survol <<<<
mais sans distance. La conscience, la sensation se possède elle-même (auto-conscience sans ego), auto- affection, jouissance de soi. Et cette auto conscience caractérise les surfaces, les champs.
La surface du monde, L’image du monde n’a donc pas besoin d’une dimension supplémentaire, d’un supra ensemble pour la justifier. L’étendue du monde est conscience.
image auto lumineuse sans lumière extérieure pour l'éclairer
3- les autres, l'intersubjectivité
joaquim a écrit: | pourquoi "lui" ? Pourquoi "lui" et pas "un autre" ? C'est la même question que : pourquoi "moi" ? Le monde entier est en moi, soit, j'en conviens. Mais pourquoi en "moi", et pas en "toi" ? Bien sûr, je peux me dire qu'il est présent aussi en "toi", mais pour le faire, je dois transposer ce que je vis pour le mettre en toi, autrement dit je dois passer d'un regard en première à un regard en troisième personne, pour nous comparer tous les deux de l'extérieur. Alors qu'en "moi", cela m'est donné d'emblée. Pourquoi ? Cette question ne peut, pour une raison logique inflexible, recevoir de réponse de nature discursive |
Effectivement c’est très difficile à penser
Pour concevoir les rapports humains il faut effectivement passer à un regard à la 3e personne, un regard mental, extérieur qui fonctionne analogiquement, je suppose que les autres ont comme moi une conscience à la 1er personne mais je n’y ai pas accès
Husserl et Sartre ont essayé de penser l’intersubjectivité. Mais leurs analyses n’ont pas convaincues
Leibniz fait appel à un dieu pour harmoniser toutes les subjectivités (monades) effectivement sans communication possible au niveau de la première personne. La première personne étant sans extériorité, sans dehors, ne peut concevoir un autre qu’elle.
Spinoza ne conçoit qu’une seule subjectivité : dieu, la substance. Les individus n’étant que des modes de cette substance. les âmes des idées de dieu.
Le christianisme conçoit bien plusieurs première personnes qui sont une mais la raison ne peut y accéder, cela reste un mystère : le mystère de la sainte trinité. Dieu est toi, moi dans la plus grande singularité et pourtant il n’y a qu’un seul dieu
Deleuze parle de multiplicités en fusion, nous sommes ces multiplicités en fusions, ces singularités absolues, distinctes mais non séparées, sans distances. Tous les autres sont en nous et nous sommes en eux. Nous somme chacun une Partie d’un hologramme qui serait le tout mais où la totalité de l’hologramme serait dans chaque partie, la partie n’est pas une partie d’un puzzle qui donc manquerait des autres parties mais se suffit à elle-même, est le tout (vision très leibnizienne)
Seule l’intuition peut nous permettre de comprendre cela, de le sentir mais pas les mots, pas le discours. En tout cas très difficilement. On est d’accord
Amitiés
Joël
ps . je trouve qu'on devrait mettre ce topic dans '' questions philosophiques '' non ? |
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joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5627 Localisation: Suisse
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Posté le: Sa 09 Jan 2010 20:01 Sujet du message: |
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Bonjour Joël, merci pour ces réflexions
riseohms a écrit: | Le monde est la face objective de cette realité et la conscience sa face subjective mais c'est une seule réalité et on voit bien lorsque on appréhende le monde tel qu' il est, qu'il est conscience , qu'il est soi même |
Oui, je suis parfaitement d'accord avec toi. Mais pour en être convaincu, il faut s'éveiller. Sinon, cela demeure une vérité abstraite : on sait dans la pensée que la face subjective et la face objective sont une seule et même réalité, mais sans le réaliser. Il ne suffit pas de seulement le penser, il faut l'être, pour que cela soit vrai. Cet "être"-là transcende la pensée raisonnante. Ou plutôt il la pénètre pour la rendre vraie.
riseohms a écrit: | La surface du monde, L'image du monde n'a donc pas besoin d'une dimension supplémentaire, d'un supra ensemble pour la justifier. L'étendue du monde est conscience.
image auto lumineuse sans lumière extérieure pour l'éclairer |
Merci de l'illustrer, avec toutes ces références.
riseohms a écrit: | Effectivement c'est très difficile à penser
(...)
Seule l'intuition peut nous permettre de comprendre cela, de le sentir mais pas les mots, pas le discours. En tout cas très difficilement. On est d'accord |
Ce que tu appelles l'intuition, c'est être un avec. C'est cet "être" dont je parlais ci-dessus, qui ne fait pas seulement que penser sur les choses, mais qui est cette pensée. Donc oui, totalement immanent à la réalité une, mais transcendant par rapport à la pensée discursive. |
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8541 Localisation: belgique
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Posté le: Ma 12 Jan 2010 4:49 Sujet du message: |
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bonjour joêl !
tu dis :
Citation: | les âmes des idées de dieu. |
pourrais-tu expliquer ce que spinoza entend par cette formulation !?
merci ! ... |
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Ma 12 Jan 2010 14:38 Sujet du message: |
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bonjour daniel
daniel a écrit: | tu dis :
Citation: | les âmes des idées de dieu. |
pourrais-tu expliquer ce que spinoza entend par cette formulation !?
merci ! ... |
oui cette formulation est étonnante
Traditionnellement on considère que l'âme est une entité bien distincte, une substance, un sujet autonome cause de lui-même.
Mais pour Spinoza il n'y a qu'une seule substance c'est dieu et seul lui est cause de lui même et peut se dire sujet ou réalité.
L’âme ne peut pas prétendre à cela car elle est toujours causée par autre chose qu'elle même et donc dépendante de l'extérieur, elle appartient à un ensemble, elle est une partie d'un tout, interdépendante.
Aussi Spinoza appelle les âmes et les corps des modes.
Les individus sont des modalités de cette réalité unique, modes d'expression ou fonctions, idées de l'action de dieu.
Pour Spinoza l'âme est indissociable du corps et l'âme est l'idée que ce corps se fait de lui même par rapport à ce qui l'affecte de l'extérieur.
De ce que mon corps rencontre il va y avoir des représentations et des mémorisations qui vont me permettre de réagir et de répondre à l'extérieur et de l'affecter aussi,
Ainsi se constitue un appareil psychique, l’âme.
quant à la conscience individuelle ou moi réflexif ou égo, Spinoza l'appelle l'idée de cette idée qu'est l'âme( idée du corps )
À la mort du corps, l'âme meure aussi puisqu'elle en est indissociable.
Néanmoins un corps c'est un ensemble composé selon un certain rapport que Spinoza appelle un rapport de mouvement et de repos.
cad ce n'est pas n'importe comment que les éléments qui constituent ce corps s'assemblent et se composent.
Ce rapport fait que même si ce corps change constamment, il y a quelque chose d'invariable qui fait, par exemple, que l'on reconnait l'enfant dans l'adulte ou l'inverse
ce qui est composé ce sont les parties extensives ou matérielles mais le rapport en lui- même relève d'un niveau intensif, virtuel d'une information ( l'adn serait il une trace de ce rapport ? )
C’est un rapport différentiel qui fait qu'un individu est différent d'un autre. Ce rapport différentiel existe aussi au niveau de l'âme puisque l'âme est l'idée du corps.
Ce n'est pas n'importe comment que se constitue le contenu d'un esprit individuel.
La mort est la mort des parties extensives du corps et de l'âme mais pas du rapport différentiel qui faisait le style particulier de tel individu.
Ce rapport ou style se situe sur un plan non extensif non matériel mais sur un plan intensif, virtuel.
La mort est le retour à ce virtuel, la cessation de son actualisation. On rejoint la mémoire de dieu (son disque dur, on est plus dans sa ram.).
mais peut-être après la mort va t-on vers d'autres formes d'existences ou d'actualisations, avec des corps plus subtiles mais de cela Spinoza n'en parle pas .
En tout cas pour Spinoza ce virtuel, cet implicite n'est pas dénué de vie ou d'existence même s'il n'est pas actualisé ou explicité.
La pensée avec ses idées, dont les âmes, c’est ce qui est plié, le réel plié .
La matière, l'extension, l'étendue c'est le réel déplié. L’extension est extension de l'intensif.
Dans l'éveil on peut percevoir le monde comme une extension ou un prolongement de nous même et de notre corps
Pour Spinoza ce rapport est l'essence de l'individu et cette essence est éternelle, c'est une vibration ou une idée particulière de dieu, une idée singulière qu'il a de lui même, une image de lui même (l’homme n'est il pas fait à l'image de dieu) une expression, une modalité de lui même
mais pas une réalité dans le sens substantiel. Ce qui ne veut pas dire que c'est une illusion. C’est une réalité relative ou secondaire.
À la perception d'un corps correspond toujours une idée, si je le perçois sans penser alors je vais le percevoir comme mode de la substance (dieu) et non plus comme une substance cad comme une chose séparée et autonome et en même temps je vais le percevoir aussi dans sa singularité, dans son essence.
Voir sans penser, cad voir un objet tel qu'il est, ce n'est pas voir sans idée
mais c’est voir sans référer ce qu’on voit à une autre chose que lui -même cad à une autre idée.
Si en voyant tel objet on n'en avait pas une idée, on ne le verrait même pas. Il n’y a pas de corps ou de chose sans idée de cette chose ou de ce corps, ils sont indissociables.
Pour Spinoza, une idée est toujours idée d’un objet mais sans en être non plus une représentation. Une représentation suppose un décalage entre l’idée et son objet, supprimons la représentation, l’objet continue d’exister.
Parler de représentation suppose un esprit qui la contiendrait et qui ferait du contenu de la conscience un double du monde donc séparé..
Mais pour Spinoza l’âme, l’esprit est une idée et non un contenant (une substance), elle n’a aucune intériorité. L’âme est une idée(du corps, son objet ) autour de laquelle s’agencent d’autres idées qui constituent la personnalité L’âme n’a pas non plus de facultés. Pour Spinoza la volonté n’existe pas en tant que telle, par contre il y a des actes de volitions qui sont un type particulier d’idées
L’idée selon Spinoza est indissociable de l’objet, c’est une même réalité vu du point de vue de la pensée ou du point de vue de la matière ou étendue.
Pensée et étendue sont deux aspects de la substance. L’âme et le corps sont aussi 2 aspects d’une réalité unique : l’homme .
aucun décalage, séparation ou distance entre les deux donc aucune action ou relation de l’une sur l’autre mais des correspondances
Pour moi Spinoza est un philosophe révolutionnaire, et un philosophe de l’avenir
On reste encore en occident trop tributaire de Descartes qui justement concevait l âme non comme une idée mais comme une substance, autonome et douée de facultés dont le libre arbitre.
Spinoza critique le libre arbitre. Il dit : qu’on ne choisit pas les choses abstraitement mais qu’on choisit d’abord ce qu’on désire.’’ On désire une chose non par ce qu’elle nous semble juste mais on l’a trouve juste parce qu’on la désire et ce désir ne vient pas de rien, il est un effet d’autres causes, il est conditionné
Dans ce cas où est la liberté absolue ou le libre arbitre que revendique Descartes ?
joel |
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8541 Localisation: belgique
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Posté le: Ma 12 Jan 2010 22:44 Sujet du message: |
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bonsoir !
merci joêl pour tes explications ... une toute petite question qui, à présent, trouve, tout son déroulement, son "extension" ...
je comprend mieux à quoi correspond ce que tu écrivais, plus haut :
Citation: | Le monde est la face objective de cette realité et la conscience sa face subjective mais c’est une seule réalité et on voit bien lorsque on appréhende le monde tel qu’ il est, qu’il est conscience , qu’il est soi même
Mais parler de deux faces c’est encore dualiste.
On peut considérer cette réalité comme un ruban de moebius qui ne possède qu'une seule face contrairement à un ruban classique qui en possède deux.
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et ce, grâce, entre autres, à ceci :
Citation: | L’idée selon Spinoza est indissociable de l’objet, c’est une même réalité vu du point de vue de la pensée ou du point de vue de la matière ou étendue.
Pensée et étendue sont deux aspects de la substance. L’âme et le corps sont aussi 2 aspects d’une réalité unique : l’homme .
aucun décalage, séparation ou distance entre les deux donc aucune action ou relation de l’une sur l’autre mais des correspondances
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c'est vrai, spinoza était révolutionnaire, d'une part, ce qu'il avance, constitue un lien entre l'orient et l'occident, d'autrepart, c'est d'une grande originalité ...
pour certains mystiques juifs, le Désir préside à tout, c'est le mouvement en Dieu ... et puis aussi, pour eux, nous ne sommes pas sur terre parce que l'on a été exilé, mais parce qu'on l'a voulu, en tant qu'âme cherchant à se connaître, par le biais de l'existence ... chez spinoza, cela semble évident, et plus que ça, puisque "nous", l'"âme et le corps", si j'ai bien compris, sommes des modalités de cette Réalité unique, qu'est Dieu ... c'est bien ça !? |
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Me 13 Jan 2010 10:14 Sujet du message: |
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daniel a écrit: | bonsoir !
merci joêl pour tes explications ... une toute petite question qui, à présent, trouve, tout son déroulement, son "extension" ...
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merci,ça fait toujours plaisir d'être bien reçu
daniel a écrit: | c'est vrai, spinoza était révolutionnaire, d'une part, ce qu'il avance, constitue un lien entre l'orient et l'occident, d'autrepart, c'est d'une grande originalité ... |
je le vois comme cela aussi. c'est vraiment le grand penseur de la non dualité dans la philosophie occidentale
daniel a écrit: | pour certains mystiques juifs, le Désir préside à tout, c'est le mouvement en Dieu . |
pour Spinoza aussi, il appele le désir :conatus
daniel a écrit: | ."nous", l'"âme et le corps", si j'ai bien compris, sommes des modalités de cette Réalité unique, qu'est Dieu ... c'est bien ça !? |
tout à fait
le magazine littéraire de ce mois est consacré à spinoza
joel |
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