Regards sur l'éveil
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Viirguliino
Inscrit le: 25 Mai 2014 Messages: 56 Localisation: Le Caire
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Posté le: Lu 09 Juin 2014 2:55 Sujet du message: Le mémorial des saints, Farid Ud Din Attar |
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Bonjour,
Kiya a partagé avec nous l'autre jour La conférence des oiseaux, du poète mystique persan Attar (XIIe s.)
Peut-être connaissez-vous Le Mémorial des saints, où Attar raconte dans de petits tableaux l'histoire de près d'une centaine de soufis.
J'aime ce petit livre que l'on peut ouvrir au hasard de ces tableaux.
Le dernier chapitre raconte le supplice d'Hallaj et illustre, tel que je le lis, ce que j'appelle l'irréductiblité de l'être : l'Un et l'impossibilité foncière de retrancher quoi que ce soit de l'Un, de quelque manière que ce soit. Que rien ne peut sortir du monde. Que rien ne peut être arraché du sein de la réalité. Ou encore que la vérité ne peut être trahie.
Cette "irréductibilité", c'est drôle ce que je vais vous dire, j'en avais eu comme une vague idée quelque temps avant le Grand Clash. Je regardais alors toutes sortes de ces émissions télé de crimes et d'enquêtes policières (c'est un aveu que je vous fais là, et m'en remets à votre clémence ). Après avoir visionné un grand nombre de ces émissions, je m'étais dit comme ça : eh bien, on dirait que le crime parfait n'existe pas... On aura beau cacher ou détruire le corps ou l'arme du crime il y aura toujours une technique qui un jour ou l'autre permettra d'en retrouver les traces jusque là invisibles... Oui, il semble que quelle que soit la forme que prenne la chose dissimulée ou disparue, de la poussière, de la fumée... il en restera toujours quelque chose. "Rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme", il semble que rien de matériel ne s'efface du monde...
C'était une idée comme ça. Je sentais qu'elle semblait receler quelque chose de plus grand, mais je m'arrêtais là. Il n'y avait rien de spirituel ni là-dedans, ni dans ma vie. Mon truc du moment c'était les émissions télé de crimes et d'investigations.
Vint le Grand Truc, et dans le déferlement des tout premiers instants qui ont suivi, une découverte fondamentale a été cette "irréductibilité de l'être". Comme les mots m'échappaient pour la formuler, je l'avais à ce moment-là conçue par une image très proche ce l'illustration donnée ici par Attar. De cette découverte du Cœur des choses a découlé une compréhension appliquée au monde des hommes : que le mal, qui chez l'homme se traduit souvent par la volonté de supprimer l'autre, est ignorance, incompréhension de la réalité ("pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font").
Je voyais tous les hommes acharnés à détruire l'autre, à le supprimer de la face du monde, je voyais les petits et les grands crimes : ce sont des enfants, ils ne savent pas, ils s'acharnent pour rien, ils ne savent pas.
Je voyais tous les hommes, toutes les femmes, tous les enfants persécutés, blessés, mutilés : leur cœur ne sera jamais retranché du Cœur.
Je venais d'être touché et je comprenais : mon cœur était au Cœur de toute chose.
C'est plus tard que j'ai découvert ce livre (et tous les livres) et en particulier l'histoire d'Hallaj, qui contient d'autres questions telles que l'éveil et l'incarnation de l'éveil, la bonne nouvelle, ou la manière singulière qu'adopte un individu dans sa compréhension du divin, dans la forme, les signes, les mots par lesquels il tente de la traduire, et dans la réception de sa parole dans la communauté, l'ésotérique vs l'exotérique.
Il y a aussi l'illustration la plus radicale -- dans le martyr -- de l'inconditionnalité de l'amour, de l'inconditionnalité de la liberté, de la béatitude à partager l'intimité de la conscience.
Voici donc le Mémorial des saints et l'histoire d'Hallaj à lire ici en pdf : http://www.sufism.ir/books/download/french/attar-fr/le-memorial-des-saints.pdf.
Ce livre se trouve aussi chez nos amis libraires.
Je ne sais pas si ce thème d'une irréductibilité de l'être a été abordé dans des posts précédents. Peut-être sous un autre angle. Si vous en avez le souvenir, j'aimerais les lire.
À bientôt -- et MERCI du trésor de vos échanges passés que je découvre et explore avec émerveillement. |
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Lu 09 Juin 2014 9:55 Sujet du message: Re: Le mémorial des saints, Farid Ud Din Attar |
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Viirguliino a écrit: |
Je ne sais pas si ce thème d'une irréductibilité de l'être a été abordé dans des posts précédents. Peut-être sous un autre angle. Si vous en avez le souvenir, j'aimerais les lire.
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bonjour Virgulino et à tous
j'aime bien cette expression ''d’irréductibilité de l’être ''
il me semble que parler d'indivisibilité de l’être dit la même chose
ce qui implique que les divisibilités apparentes, les distinctions, les séparations ne sont pas réelles
mais pas irréelles ou illusoires non plus, il faut plutôt parler de manières d’être
ou comme dit Spinoza de réalités modales ;
cette indivisibilité de l’être peut impliquer effectivement que rien n'est perdu au niveau des phénomènes, non seulement tout est transformé mais aussi conservé dans une sorte de mémoire de la matière
pour ma part, j'avais essayé de penser cette irréductibilité ou indivisibilité sous l'angle du concept du pli, concept que j'ai trouvé chez Deleuze, dans son livre '' le pli'' sur leibniz
j'ai eu sur ce thème ,il y a quelques années, un échange avec Viator qui t’intéressera surement
c'est dans le topic '' la créature et le créateur''
on a échangé sur Deleuze, Spinoza et Plotin
pour moi cet échange restera l’échange philosophique le plus poussé, intense et passionnant que j'ai eu ce forum. on a vraiment été très loin.
ICI
mais il y a aussi tous les échanges avant et après ce post dont je donne le lien
amicalement
joel _________________ l’éveil c'est l'esprit qui, libre de tout objet ,reposant en soi et accueillant tout, se révèle à lui-même |
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Lu 09 Juin 2014 22:11 Sujet du message: |
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petite précision: l’échange sur la question du pli commençait ici avec un post de viator à 8h35 le 12 avril
suivi d’échanges avec Joaquim,
ICI _________________ l’éveil c'est l'esprit qui, libre de tout objet ,reposant en soi et accueillant tout, se révèle à lui-même
Dernière édition par riseohms le Ma 10 Juin 2014 8:48; édité 3 fois |
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KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2197
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8602 Localisation: belgique
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Posté le: Ma 10 Juin 2014 13:34 Sujet du message: |
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Bonjour Kiya !
Qu'est-c'qu'il en ressort de ce livre ... Il fait une différence entre l'Un et l'être !?
Je te demande ça ... Parce que ... Personnellement ... Je ne parviens plus à lire ... Un livre ...
C'est tout p´tit ... Les lettres ... |
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KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2197
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Posté le: Ma 10 Juin 2014 18:02 Sujet du message: |
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Bonjour Daniel
Ta requête est enregistrée . Il me faudra juste un peu de temps |
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KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2197
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Posté le: Ma 10 Juin 2014 22:16 Sujet du message: |
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Bon , c'est parti...
Je reprends les idées du livre que je vais essayer de résumer. contrairement à ce que laisserait penser le titre, les théories de Plotin ne sont pas les seules étudiées, il y a comparaison avec différentes théories.
Tout d'abord, définition d'hénologie : relatif à l'Un, et aussi théorie qui pense l'Un, l'Unité, au dessus de tout (ex :Platon)
Le livre parle de la "mise en relation de nos conditions d'être avec la dimension ineffable et négative de notre origine et notre fondement en tant qu'être".
Il s'agit de rappeler que l'Un, s'il est inaccessible, est aussi moteur de la quête de vérité. Plotin est l'héritier unique entre doctrines opposées orientales et occidentales, sa pensée récapitule les idées de source/manifestation, présence/absence, il y a une recherche de lien à la provenance de l'être. pour Plotin, le sens de l'être n'est pas différent de sa source : l'être est tel qu'il est fondé par l'Un, l'être porte la "trace" de l'Un.
L'Un n'est pas réductible à une forme donnée. La question est posée de savoir si l'être est une réduction de l'Un qui lui donnerait vie et réalité. L'un n'est pas "supérieur" à une norme donnée, il est tout simplement "hors norme". La norme est le propre de l'être et ne peut être applicable à l'Un. L'Un fonde la norme.
On ne peut trouver le lien qui les unit que dans la manifestation. C'est dans la structure même de l'être qu'on peut affirmer la présence de l'Un sous forme de lien. Cela permet à l'être d'envisager l'Un, tout en ayant la possibilité de ne pas envisager sa dissolution ou "mise à mort".
La norme de l'être devient l'étalon d'intelligence pour appréhender l'Un.
l'Un échappe à toute norme pour fonder celle du monde intelligible de l'être, à partir de là, il est possible d'avoir un discours sur l'Un.
il n'y a pas d'être qui échappe à la norme de l'émanation.
La dépendance et l'autonomie de l'être ne peuvent être assurés par lui-même, c'est de la structure Un/être que l'être tient sa liberté, sa vie, son existence comme intelligible. La vraie liberté de l'être n'est pas de se couper du principe qui l'anime, mais de demeurer dans ce qui fait de lui un être.
La temporalité est en "opposition" (antinomique) avec l'Unité, elle est "l'éparpillement" de l'être en "moments" qui seront re-densifiés dans le manifesté.
Aucune caractéristique ou comparaison humaine (anthropomorphique) , ne peut être associée à l'Un, et l'homme doit être libéré des analogies qu'il serait tenté de faire entre lui et l'Un (bien que l'Un soit Amour).
"l'origine commune de tous les êtres les tient en cohésion parce que chacun peut témoigner de son lien avec l'origine. Le lien est "donation" de la vie de l'être (on retrouve ici une idée qu'avait émis Joaquim). C'est comme un "acte du principe". L'Un se trouve sous "trace" dans l'être."
"Nous pourrions dire que la question de l'origine dérive du désir de l'âme de retrouver sa "patrie", la source véritable de sa vie, qui n'est en fait ni dépendante de la question du temps, ni de celle de l'espace."
....................
"Les âmes "s'étirent" sans se séparer d'elles-même, du supérieur vers l'inférieur" et vice-versa. L'âme peut tenir pour vérité une position qu'elle a prise dans un niveau "inférieur" et en même temps tenir pour vraie sa position dans le "supérieur" car tout cela est son champ d'être. cela est possible par le principe unificateur. L'âme est guidée vers l'Un par "nécessité intérieure" cela n'étant pas différent du chemin donné par l'Un.
l'origine :
Le commencement de l'être est obtenu par "réduction" qu'il faut développer pour faire retour ("régression maximale de l'être vers l'Un"). Il y a une constitution interne de l'être qui demeure en l'Un.
Il existe un processus d'éclaircissement du réel par la "mystique" rendu "possible par la réflexivité continuelle de l'être sur lui-même" et par un regard sur son devenir. Dans ce processus, les âmes ne se libèrent pas de leur union réciproque, c'est par l'unité qui les anime qu'elles peuvent remonter dans les "mondes" supérieurs, sans pour autant quitter les mondes inférieurs.
Comme toutes les âmes sont en l'Un et qu'elles s'interpénètrent, leur intériorisation leur permet de connaitre leur fond propre , qui est d'être en lien permanent avec l'Un - leur père.
Sur ce chemin, il s'agit de retrouver les "traces" laissées derrière soi à partir de la source. Ce regard intérieur approfondit notre souvenir de l'origine.
L'intériorité est assimilée à la "supériorité" car on ne trouve qu'en soi le reflet de "l'Un en nous". retrouver en soi la "résonance" avec la source, c'est être en contemplation, puisqu'on est à la fois proche et éloigné de l'Un, qui est, lui, partout présent "et il l'est surtout en chaque individualité qui sculpte en elle-même sa vision du principe (source) en dépouillant son œuvre des scories ..."
Il existe un lien de soi à l'autre (l'Un). intériorité et relation sont indissociables.
je vais m'arrêter là pour aujourd'hui... mon cerveau bouillonne |
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8602 Localisation: belgique
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Posté le: Ma 10 Juin 2014 23:34 Sujet du message: |
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Bonjour Kiya !
Houw ! Dans quoi ... T'es-tu engagée ... Merci ... Pour ce développement !
Donc ... Ce qu'il ressort ... Entre autres ... De ce qui est dit ... Là ...
L'Un a laissé une trace ... De lui-même ... Dans l'âme ... Qui doit lui permettre (à l'âme) ... De retourner ... De toute façon ... Dans l'Un ... Pour " vivre les noces de l'union mystique" !
C'est une bonne nouvelle ... Qui ravirait toniov ... Nous ne sommes pas là ... En tant qu'humain ... Pour rien !
J'espère ne pas avoir pris ... Trop de raccourcis ! |
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Me 11 Juin 2014 9:15 Sujet du message: |
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bonjour
un petit complément aux explications de KIYA sur la distinction entre l'UN et l'ETRE
Citation: | la philosophie de l'Un au-delà de l'Être coïncide avec le néo-platonisme. On entend par cette dénomination, non pas n'importe quel platonisme, mais une école déterminée de commentateurs platoniciens, dont les grands maîtres sont Plotin (iiie s. apr. J.-C.), Porphyre, Jamblique (iiie-ive s.), Proclos (ve s.), Damascios (vie s.), Jean Scot dit Érigène (ixe s.). Leur enseignement est caractérisé par la place centrale qu'ils accordent au Parménide de Platon. D'après leur interprétation de la deuxième partie de ce dialogue, l'un passe au-dessus de l'affirmation s'il est visé dans sa pureté absolue, comme on l'a vu, et il retombe au-dessous si on le laisse se dissoudre en divers pur. Mais ces deux fonctions, en elles-mêmes inaffirmables, sont indispensables pour construire le réel, qui est fait de combinaisons graduées d'un et de multiple. L'Être est donc essentiellement totalité. Et le redoubler dans son origine reviendrait à transformer la question en réponse. L'origine ne saurait être un Tout, même infiniment concentré et autoconstituant. Dès lors, elle n'a même pas l'unité comme attribut, puisqu'on ne pose l'unité qu'en la rapportant à la multiplicité (ne serait-ce que pour l'exclure), et donc jamais comme un absolu. L'Un n'est plus qu'un symbole et une fonction, mais il devient la première figure du Principe. |
en fait l’Être c'est Tout ce qui Est cad la totalité
et l'Un c'est l'origine, le moteur immobile de tout ce qui est
mais aussi le principe unificateur cad ce qui garantit l'unité de tout ce qui est
joel _________________ l’éveil c'est l'esprit qui, libre de tout objet ,reposant en soi et accueillant tout, se révèle à lui-même |
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KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2197
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Posté le: Me 11 Juin 2014 12:18 Sujet du message: |
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Merci pour ces précisions Joël, ta façon de dire les choses est toujours aussi claire. |
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Me 11 Juin 2014 16:18 Sujet du message: |
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j'ajouterai que cette distinction entre l'Un et l'Etre ,autant elle est valable lorsque l'Etre est pensé en tant que Tout ce qui Est ,autant , il me semble ,elle n'est plus valable lorsqu'on pense l'Etre en tant qu'être
à ce niveau l'Etre et l'Un ,c'est la même chose .
Joël _________________ l’éveil c'est l'esprit qui, libre de tout objet ,reposant en soi et accueillant tout, se révèle à lui-même |
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