Regards sur l'éveil
Café philosophique, littéraire et scientifique
|
Archives ·
Devenir membre ·
Log in · Contact
· Blog
|
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant |
Auteur |
Message |
joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5654 Localisation: Suisse
|
Posté le: Ve 24 Avr 2015 23:33 Sujet du message: Les deux éveils |
|
|
Bonjour à tous,
Un être conscient, c’est un point.
L’apparition de ce point de dimension zéro fait surgir un espace, délimité par une circonférence, qui est l’espace sensible, émotionnel et mental accessible à cet être.
La circonférence, c’est l’intégralité du monde qui lui est donné, y compris son propre corps. C’est le champ de conscience de l’animal et du petit enfant humain. L’animal en reste à ce stade, alors que le petit humain va s’interroger à propos du point central. Et il va attribuer à ce point des caractéristiques : âge, sexe, taille, et qualités diverses. Il appellera ce centre ainsi consolidé et étoffé : moi.
Tout ce qu’il verra désormais, en provenance de la circonférence, sera réinterprété à l’aide des mentalisations de ce centre élargi. A partir de l’adolescence, cela deviendra pour lui le seul monde accessible, tout au moins par la pensée. Parfois, une immersion dans la nature lui rappellera la périphérie et l'inondera d’un bien-être teinté de nostalgie, mais la plupart du temps, il restera prisonnier de la bulle mentale qu’il est devenu.
Et puis un beau jour, peut-être, il découvrira qu’il n’est pas cette bulle, et devant son regard étonné, elle éclatera comme l’illusion qu’elle a toujours été, lui dévoilant la périphérie comme la seule réalité dont tout est fait. Ce qu’il appelait son moi disparaîtra alors, ne laissant plus subsister qu’une conscience transparente à la réalité.
Pourtant, si le moi en tant que centre consolidé est bien une illusion, le centre du cercle, lui, le point central, n’est nullement illusoire. Quand bien même il n’est rien, c’est de lui que tout procède. Il n’a ni dimension, ni substance, ni durée. Mais il est présent. C’est sa présence qui crée l’espace et le temps.
Réaliser que ce centre, ce rien, est la source de tout, voilà une autre forme de l’éveil.
Le premier éveil lève le paradoxe que fait surgir la conscience individuelle se saisissant elle-même, en supprimant son caractère individuel. Le centre n’existe plus, il n’y a plus que la périphérie. Il est aisément conceptualisable par le mental, même s’il apparaît impossible, et même d’une certaine manière effrayant à la conscience individuelle enfermée en elle-même. Le second éveil ne lève pas ce paradoxe, mais le révèle comme étant le mystère sur lequel est posée la réalité : moi, misérable petit individu, suis l’être lui-même dont est faite la réalité. Ce mystère-là est totalement étanche au mental, et pourtant totalement évident lorsque l’éveil surgit.
Je vais essayer d’éclairer ce mystère — à défaut de le résoudre.
Un point apparaît là où une conscience surgit, aussi rudimentaire soit-elle. Il existe un temps et un espace créés par la présence d’un ver de terre. Et un temps et un espace créé par chaque conscience humaine qui apparaît. Tous ces temps et tous ces espaces sont différents, et pourtant tous semblent partager la même réalité.
Tant qu’on reste dans la représentation mentale, face au paradoxe de la multiplicité des consciences individuelles, on ne peut faire autrement que de les juxtaposer dans un espace censé les englober toutes. Or l’ensemble de toutes les consciences, ça n’existe nulle part dans la réalité. Il n’existe qu’une réalité, qui est celle que perçoit chaque conscience individuelle. L’ensemble de toutes les consciences, c’est une représentation, c’est-à-dire une projection mentale dans la conscience du lecteur actuellement en train de se représenter cette idée. Elle n’a pas d’autre réalité que celle d’une idée présente ici et maintenant dans la conscience du lecteur. Il n’y a pas de réalité qui serait extérieure à la conscience. Ce qui se prétend extérieur à la conscience, c’est une représentation mentale que la conscience situe à l’extérieur d’elle-même.
Par ailleurs, tout conscience est par nature individuelle. Elle est toujours centrée sur un point qui en est la source. Ce point est le lieu et le présent de l’être conscient. Celui-ci, par son acte de conscience, crée un espace et un temps qui sont siens. Que ce soit l’animal ou l’humain. Toute conscience plus vaste qu’individuelle, est nécessairement une représentation à l’intérieur d’une conscience individuelle. Refuser de voir cela, c’est ériger sa propre représentation individuelle au rang de réalité, c'est-à-dire en faire une idole.
Pourtant, on est bien forcé de concevoir, pour rendre compte de l’expérience, l’existence d’une multitude de consciences individuelles, même si l’expérience elle-même ne nous permet pas de sortir de la seule qui nous soit donnée. Ce problème ne se pose pas pour l’animal, à l’exception peut-être de quelques animaux supérieurs, car l’animal n’échafaude pas de réflexions sur lui-même, ni sur les autres, de sorte qu’il prend la réalité telle qu’elle lui est donnée, sans se préoccuper de la forme qu’elle prendrait pour autrui. Mais l’être humain, lui, s’interroge sur la conscience d’autrui, et sur le temps d’autrui, ce qui le conduit à cette constatation paradoxale : dans le temps d’autrui, le sien propre est relatif. Il côtoie des être qui étaient là avant que lui-même ne soit, et d’autres qui seront là après que lui ne sera plus. Pour les autres, il n’est pas le centre du monde, mais une apparition éphémère.
Pourtant, cet autre pour qui il ne serait lui-même qu’un élément contingent, n’existe que représenté à l’intérieur de sa propre conscience. De sorte que la relativité qu’il se suppose à lui-même, lorsqu’il se met en pensée à la place d’autrui, repose sur le fait qu’il élit à l’intérieur de sa conscience une représentation qui est celle qu’il attribue à la conscience d’autrui, et c’est par rapport à cette représentation que sa propre conscience n’aurait qu’une existence relative.
On voit bien que le socle de la réalité se dérobe dans ce jeu de miroirs. Le seul moyen de rétablir la cohérence, c’est de rapporter le temps et l’espace individuel de chaque conscience à un temps et un espace commun à toutes, qui serait en quelque sorte objectif. Le temps du monde. Or une telle démarche ne peut conduire qu’à produire une représentation, mais en aucun cas à toucher une réalité.
D’un autre côté, le mental n’a aucun moyen de faire autrement que de poser cette représentation comme étant la réalité objective, par rapport à laquelle tout ce qui est relatif — et donc sa propre conscience — doit nécessairement se référer, si elle ne veut pas demeurer désespérément seule en elle-même. C’est cette fatalité qui verrouille l’enferment du mental en lui-même.
Voilà le paradoxe têtu de la conscience humaine, et c'est ce paradoxe qui disparaît dans une lumineuse évidence lors de l'éveil. |
|
Revenir en haut |
|
|
Alain V
Inscrit le: 24 Fév 2007 Messages: 5927
|
Posté le: Sa 25 Avr 2015 8:02 Sujet du message: |
|
|
Bonjour Joaquim,
C'est une bonne idée d'avoir eu recours aux schémas pour représenter tes idées et ta notion de l'éveil.
Le '' problème '' - si problème il y a - se trouve dans le point, donc.Ce qui nous différencie des animaux c'est que le point est conscient de lui même.
Maintenant, en quoi cela constitue t- il un problème ?...si je comprends bien, cela devient un problème lorsqu'il y a enfermement. S'il y a ouverture, le probléme disparait.
Une première question : pourquoi le fait de ce qui nous caractérise serait fatalement un problème ?
Pourquoi faudrait il '' disparaitre '' à soi même - en tant qu'individu accumulant une histoire par le biais de la mémoire - pour régler le problème ?
Notre histoire, notre mémoire, c'est ce qui produit le renforcement du point. En quoi est ce un problème ?...je crois que la réponse est: c'est un problème uniquement si c'est vécu dans le sens d'un enfermement.
Mais ce n'est un enfermement que si on le voit comme tel.
Bien sur, il n'est pas difficile de comprendre que quelqu'un d'obtus, d'uniquement préocupé par lui même, va s'enfermer dans son égocentrisme.
Mais il y a deux choses: l'égocentrisme forcené et les réalités de la nature humaine.
Parmi ces réalités il y a le fait que l'humain est capable de se souvenir d'une histoire et de créer ainsi son histoire.
C'est quand même pas mal parce que c'est lié à la relation. Et cela ne produit pas que du négatif mais aussi du positif: un animal - sauf quelques rares exceptions, par exemple les animaux domestiques - reste toujours relativement indifférent à la souffrance de l'autre. Or, pas de compassion possible si on ne peut pas s'identifier à l'autre.
On en vient ici à l'opposition entre le relatif et l'absolu. Je dis '' opposition '' - moi je ne les oppose pas, en fait - parce que la plupart des sages de l'éveil les opposent, me sdmble t il Comment ? Tout simplement en décidant de ce qui est '' réel '' et de ce qui est '' illusoire ''.
Ce qui produit, selon moi, un effet réel sur le point, ce n'est pas d'abandonner ce qui nous caractérise et nous définit en tant qu'humain, en posant une '' illusion '' qu'il faudrait effacer ou dépasser, et une '' réalité '' qui produit la disparition du point en tant que mémoire...
mais c'est plutôt la compréhension sans choix particulier de tous les processus de l'existence , avec leurs caractéristiques et leurs limites.
Autrement dit ce qui génére le problème c'est...le fait que nous en fassions un problème.
Si on accepte et on assume la réalité - qui n'est pas la conséquence d'un partage entre le '' réel '' et '' l'illusoire '', mais qui est ... tout ce qui est - le problème, en tant que tel, disparait. |
|
Revenir en haut |
|
|
joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5654 Localisation: Suisse
|
Posté le: Sa 25 Avr 2015 12:34 Sujet du message: |
|
|
Bonjour toniov,
Je suis dans les grandes lignes d’accord avec toi.
toniov a écrit: | Une première question : pourquoi le fait de ce qui nous caractérise serait fatalement un problème ?
Pourquoi faudrait il '' disparaitre '' à soi même - en tant qu'individu accumulant une histoire par le biais de la mémoire - pour régler le problème ? |
Je préciserais peut-être que ce n’est pas seulement parce que l’être humain est conscient de lui-même qu’il risque l’enfermement, mais parce qu’il pense (les deux choses étant bien sûr liées). En plus de faire l’expérience dans l’instant, il crée à partir de l’expérience des représentations qui peuvent concerner aussi bien le passé que le futur. Ces représentations font elles-mêmes l’objet d’une expérience au présent. Tant que l’enfant garde son centre de gravité dans l’expérience, les représentations s’inscrivent dans son champ d’expérience sans le limiter. Mais à partir du moment où il découvre qu’il a un pouvoir sur ses représentations, qu’il est capable de se créer lui-même sa propre conception du monde — c’est la découverte renversante, et peut-être nécessaire de l’adolescence —, alors il va fatalement mettre son centre de gravité dans ses représentations, puisque ce sont elles qui créent «son» monde. Il ne peut pas faire autrement que d’habiter son propre monde, du moment qu’il a découvert qu’il était maître de sa pensée. Donc je crois bien que l’enferment en soi est une fatalité. Tout au moins dans les sociétés où la pensée et le développement de l’individu sont mis au premier plan.
Je dirais que la signature qui révèle le centrage de l’individu sur son propre monde, c’est la peur de la mort. Avoir peur de la mort, c’est se représenter, à l’intérieur de «son» monde, «le» monde, et se représenter ce dernier subsistant après la disparition du premier. Il y a là un paradoxe, une butée pour la pensée, un conflit entre l’expérience et la pensée, et le résultat de ce conflit est la peur de la mort. Si tu n’as pas peur de la mort, alors en effet, il n’y a pas de problème. |
|
Revenir en haut |
|
|
Cricri
Inscrit le: 20 Sep 2010 Messages: 1524 Localisation: Québec, Canada
|
Posté le: Sa 25 Avr 2015 12:57 Sujet du message: Re: Les deux éveils |
|
|
joaquim a écrit: |
Le premier éveil lève le paradoxe que fait surgir la conscience individuelle se saisissant elle-même, en supprimant son caractère individuel. Le centre n’existe plus, il n’y a plus que la périphérie. Il est aisément conceptualisable par le mental, même s’il apparaît impossible, et même d’une certaine manière effrayant à la conscience individuelle enfermée en elle-même. Le second éveil ne lève pas ce paradoxe, mais le révèle comme étant le mystère sur lequel est posée la réalité : moi, misérable petit individu, suis l’être lui-même dont est faite la réalité. Ce mystère-là est totalement étanche au mental, et pourtant totalement évident lorsque l’éveil surgit.
|
Bien expliqué, clair. Et l'fun avec les images.
C'est ca...depuis ce deuxième éveil du début de mars dernier, je vois les différences, les caractéristiques si je peux dire ainsi, les effets aussi qui sont si différents dans le vécu.
Je pourrais le résumer en :
le premier éveil : je n'existe pas
le deuxième éveil : j'existe en tout.
Mais c'est évidement plus fin que cela. Dans le premier c'était la disparition de la croyance d'être quelqu'un, une personne qui peut avoir une réelle vie propre. Tout est vu avec impersonnalité, détachement et surtout l'incroyable liberté du fait de ne plus se sentir prisonnier d'une conception mental dotée de réactions-concepts-croyances-blessures-etc, appelé christine. Et c'était si fort que je crois bien qu'à ce stade-là, il n'était même pas question d'amour pour les autres si je peux dire ainsi. Tout est balayé...c'est archi impersonnel
Dans le deuxième c'est l'apparition de quelque chose que je suis bien obligé d'appeler moi. Je peux l'appeler Soi oui, mais Soi reste impersonnel et comme c'est beaucopu plus intime que ca, encore plus près que ma propre respiration, c'est moi. L'apparition de ce quelque chose est paradoxale car elle va à l'encontre du premier constat qui était en quelque sorte un immense "je m'en foutisme" de ce monde qui était vu enfin comme un immense rêve, un tour de passe-passe, une illusion. Là, une sorte de bizarre réalité, une lumière vraie, ma vraie nature, innonde ce rêve...et il devient réel. Pour moi c'Est un paradoxe. Un rêve réel.
C'est que cet éveil est une ouverture du coeur, Moi/Soi qui réalise qu'au final ce qui était "rejeté" au départ dans l'éveil impersonnel est ce que je suis, est tissé avec mon propre matériau, conscience pure, sujet pure se sachant être tout. Fiou!....impossible alors de tout traiter avec impersonnalité.
Le premier nous fait quitter le monde. Le deuxième nous y ré-intègre. |
|
Revenir en haut |
|
|
OG Invité
|
Posté le: Sa 25 Avr 2015 16:43 Sujet du message: |
|
|
Citation: | Le premier nous fait quitter le monde. Le deuxième nous y ré-intègre. |
Je vibre avec ce que tu dis mais... le mot "le monde" est trop général pour moi. Je préfère aller au plus simple pour ma part et de dire... en me désintéressant du corps et de son fonctionnement mécanique, je réalise que je suis une entité bien distincte et libre de ses conditionnements, puis je réintègre ce corps parce que ma "présence bienveillante" lui fait du bien et il me le prouve en vibrant d'extase. |
|
Revenir en haut |
|
|
daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8621 Localisation: belgique
|
Posté le: Sa 25 Avr 2015 18:28 Sujet du message: |
|
|
Bonsoir Joaquim !
Merci pour ces développements ... Sous formes de shémas !
Ce qui reste mystérieux ... C'est pourquoi que lorsqu'on prend conscience de son existence l'on se retrouve dans une position où l'on est situé dans l'espace et le temps ... Par rapport à notre histoire ... Ce qui deviendra notre environnement ... Etc ... Et même par rapport à notre rôle dans l'histoire du monde ... On découvre tous les éléments qui conforteront la réalité de ce que l'on est ... Quand on est identifié ... Ça devient rationnel ... Alors que ... Pourtant ... L'on est dans l'erreur ... L'erreur de perspective qui nous enferme en nous-même ... C'est pas propice à ce que l'on s'éveille ... Pourquoi ce fait !? |
|
Revenir en haut |
|
|
Rezkallah
Inscrit le: 02 Nov 2014 Messages: 378
|
Posté le: Sa 25 Avr 2015 18:46 Sujet du message: |
|
|
daniel a écrit: | Bonsoir Joaquim !
Merci pour ces développements ... Sous formes de shémas !
Ce qui reste mystérieux ... C'est pourquoi que lorsqu'on prend conscience de son existence l'on se retrouve dans une position où l'on est situé dans l'espace et le temps ... Par rapport à notre histoire ... Ce qui deviendra notre environnement ... Etc ... Et même par rapport à notre rôle dans l'histoire du monde ... On découvre tous les éléments qui conforteront la réalité de ce que l'on est ... Quand on est identifié ... Ça devient rationnel ... Alors que ... Pourtant ... L'on est dans l'erreur ... L'erreur de perspective qui nous enferme en nous-même ... C'est pas propice à ce que l'on s'éveille ... Pourquoi ce fait !? |
Bonsoir Daniel,
L'erreur est de ne pas concevoir que je puisse être autre. Qu'il y est un infini de monde, de subjectivité... L'enfermement ne vient que de l'ignorance et de l'attachement à une vue sur soi. L'éveil ce n'est que ce geste de passer d'un je à un autre, sans cesse... Et aussi fou que cela puisse être, on ne cesse jamais d'être soi, qu'importe le monde où l'on échoue.
Amicalement. |
|
Revenir en haut |
|
|
Alain V
Inscrit le: 24 Fév 2007 Messages: 5927
|
Posté le: Sa 25 Avr 2015 21:04 Sujet du message: |
|
|
joaquim a écrit: | Bonjour toniov,
Je suis dans les grandes lignes d’accord avec toi.
toniov a écrit: | Une première question : pourquoi le fait de ce qui nous caractérise serait fatalement un problème ?
Pourquoi faudrait il '' disparaitre '' à soi même - en tant qu'individu accumulant une histoire par le biais de la mémoire - pour régler le problème ? |
Je préciserais peut-être que ce n’est pas seulement parce que l’être humain est conscient de lui-même qu’il risque l’enfermement, mais parce qu’il pense (les deux choses étant bien sûr liées). En plus de faire l’expérience dans l’instant, il crée à partir de l’expérience des représentations qui peuvent concerner aussi bien le passé que le futur. Ces représentations font elles-mêmes l’objet d’une expérience au présent. Tant que l’enfant garde son centre de gravité dans l’expérience, les représentations s’inscrivent dans son champ d’expérience sans le limiter. Mais à partir du moment où il découvre qu’il a un pouvoir sur ses représentations, qu’il est capable de se créer lui-même sa propre conception du monde — c’est la découverte renversante, et peut-être nécessaire de l’adolescence —, alors il va fatalement mettre son centre de gravité dans ses représentations, puisque ce sont elles qui créent «son» monde. Il ne peut pas faire autrement que d’habiter son propre monde, du moment qu’il a découvert qu’il était maître de sa pensée. Donc je crois bien que l’enferment en soi est une fatalité. Tout au moins dans les sociétés où la pensée et le développement de l’individu sont mis au premier plan.
Je dirais que la signature qui révèle le centrage de l’individu sur son propre monde, c’est la peur de la mort. Avoir peur de la mort, c’est se représenter, à l’intérieur de «son» monde, «le» monde, et se représenter ce dernier subsistant après la disparition du premier. Il y a là un paradoxe, une butée pour la pensée, un conflit entre l’expérience et la pensée, et le résultat de ce conflit est la peur de la mort. Si tu n’as pas peur de la mort, alors en effet, il n’y a pas de problème. |
D'accord.
En lisant ton premier paragraphe j'en arrive naturellement à l'idée que je me fais de l'existence...la vie - et tout le reste - est une affaire de relations. Ainsi dans ma peinture je tente de dire ce que je pense de la vie, et je parle relations: entre la lumière , la couleur , l'eau, la pensée de celui qui peint, la perception qu'en ont ceux qui regardent...etc...etc...
En voyant les choses de cette façon on comprend rapidement, me semble t il, que notre '' centre de gravité '' entre lui aussi dans le même jeu de la relation...ce n'est pas un noyau dur mais un centre en mouvement continuellement. Ce n'est donc pas un enfermement, une prison...mais tout le contraire.
La représentation que je me fais de moi, et de tout - parce que tout est représentation _ n'est jamais figée, mais sans cesse en mouvement, en transformation, en évolution.
Pour le second paragraphe, je dirais que je ne vois pas tout à fait de la même façon que toi, la mort...bien sur, comme tout est représentation, je me représente le monde. En effet ce monde est, d'une certaine façon, '' mon monde ''. Mais voilà...je crois bien oui, en effet, que le monde physique subsiste après ma disparition, mais...cela ne me pose pas de problème particulier. Et pourquoi ? Mais simplement, parce que je sais, j'ai compris, que je suis le monde, en plus d'être dans le monde...et que donc, '' moi '' , je ne peux disparaître. Ici nous arrivons aux limites de ce que le langage peut '' dire ''.
Dans ma propre représentation du monde il y a, paradoxalement, une non représentation que j'appelle l'inconnu. De cela je ne peux me faire une image. Et je ne m'en fais pas. Et pourtant cela est totalement présent en moi. Comment veux tu que j'ai peur de ce que je ne peux d'aucune façon me représenter ?...
Cependant je ne peux pas arriver à dire que je n'ai pas peur de la mort. Bien sur oui, j'en ai peur, parce que je suis conscient de mes faiblesses. Au pied du mur, devant l'inconnu, je me ferai probablement tout un kaléidoscope de représentations...et puis aussi, c'est banal mais vrai de reconnaitre cela, j'ai peur de la souffrance physique. Mais ces faiblesses ne changent rien à ma perception du monde telle que je l'explique ici. |
|
Revenir en haut |
|
|
KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2201
|
Posté le: Sa 25 Avr 2015 21:53 Sujet du message: |
|
|
Joaquim,
Tes dessins me touchent particulièrement, car j'ai moi même fait un dessin pour représenter ce que j'ai vécu, n'ayant aucun mot à mettre dessus à l'époque. Il s'agit de ton dernier dessin, mais sans le cercle extérieur, car il représenterait pour moi une limite, or il n'y en a pas, c'est l'infini... Je l'ai pourtant mentionné dans mon témoignage, comme le cercle infini de conscience ("Je suis le minuscule point de conscience ET le cercle infini de conscience ET le témoin de celà".)
Merci pour cette approche. |
|
Revenir en haut |
|
|
joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5654 Localisation: Suisse
|
Posté le: Di 26 Avr 2015 1:41 Sujet du message: |
|
|
Bonjour Kiya,
KIYA a écrit: | Il s'agit de ton dernier dessin, mais sans le cercle extérieur, car il représenterait pour moi une limite, or il n'y en a pas, c'est l'infini... Je l'ai pourtant mentionné dans mon témoignage, comme le cercle infini de conscience ("Je suis le minuscule point de conscience ET le cercle infini de conscience ET le témoin de celà".) |
En fait, dans mon esprit, le cercle intérieur et le cercle extérieur représentent les deux pôles d’une respiration qui s’effectue entre le rien et le tout, et que matérialisent les lignes qui circulent entre les deux. Je me représente le petit cercle intérieur comme une espèce d’entonnoir sans fond qui se termine dans le rien, et du fond de ce rien naît le tout en revenant à partir de la périphérie. C’est plutôt une image en 3D, comme un tore :
Edit : et la partie inférieure du tore ne fait pas partie du visible, elle plonge dans l'infini, là où le point central et la périphérie se touchent. |
|
Revenir en haut |
|
|
Cricri
Inscrit le: 20 Sep 2010 Messages: 1524 Localisation: Québec, Canada
|
Posté le: Di 26 Avr 2015 15:28 Sujet du message: |
|
|
OG a écrit: | Citation: | Le premier nous fait quitter le monde. Le deuxième nous y ré-intègre. |
Je vibre avec ce que tu dis mais... le mot "le monde" est trop général pour moi. Je préfère aller au plus simple pour ma part et de dire... en me désintéressant du corps et de son fonctionnement mécanique, je réalise que je suis une entité bien distincte et libre de ses conditionnements, puis je réintègre ce corps parce que ma "présence bienveillante" lui fait du bien et il me le prouve en vibrant d'extase. |
|
|
Revenir en haut |
|
|
Cricri
Inscrit le: 20 Sep 2010 Messages: 1524 Localisation: Québec, Canada
|
Posté le: Di 26 Avr 2015 15:33 Sujet du message: |
|
|
joaquim a écrit: |
En fait, dans mon esprit, le cercle intérieur et le cercle extérieur représentent les deux pôles d’une respiration qui s’effectue entre le rien et le tout, et que matérialisent les lignes qui circulent entre les deux. Je me représente le petit cercle intérieur comme une espèce d’entonnoir sans fond qui se termine dans le rien, et du fond de ce rien naît le tout en revenant à partir de la périphérie. C’est plutôt une image en 3D, comme un tore :
Edit : et la partie inférieure du tore ne fait pas partie du visible, elle plonge dans l'infini, là où le point central et la périphérie se touchent. |
Un trou noir !! l'expérience de mars dernier, qui a été si révélatrice, m'a laissé avec la sensation incroyable d'être un trou noir...qu'en réalité ce que nous sommes se comporte en quelque sorte comme un trou noir. Et tout à coup ton dessin me fais penser à ça.
J'avais la sensation physique et (aussi des "sensations" qui ne devraient même pas porter le nom de sensations tellement c'est impossible à décrire) d'avoir la capacité de tout anéantir...pour produire ensuite ma propre matière, issue du "tissus" même dont je suis faite. L'absolu qui gobe son propre unité de perception, la conscience, et qui ensuite la re-créer pour ainsi s'expérimenter lui-même. Et l'image forte que ca occasionnait était d'être un trou noir. |
|
Revenir en haut |
|
|
OG Invité
|
Posté le: Di 26 Avr 2015 16:33 Sujet du message: |
|
|
Citation: | Et l'image forte que ca occasionnait était d'être un trou noir. |
Yessss
J'en suis aussi à me demander si c'est pas là que disparaissent certaines émotions refoulées quand elles sont libérées pour être transmutées en quelque chose d'autre. Comme une sorte de machine à laver transmutatrice lol Puis si tu le regardes de haut, ça fait comme un œil. |
|
Revenir en haut |
|
|
Sibelle
Inscrit le: 24 Mars 2015 Messages: 49 Localisation: Jardin
|
Posté le: Di 26 Avr 2015 16:37 Sujet du message: |
|
|
joaquim a écrit: | Bonjour Kiya,
KIYA a écrit: | Il s'agit de ton dernier dessin, mais sans le cercle extérieur, car il représenterait pour moi une limite, or il n'y en a pas, c'est l'infini... Je l'ai pourtant mentionné dans mon témoignage, comme le cercle infini de conscience ("Je suis le minuscule point de conscience ET le cercle infini de conscience ET le témoin de celà".) |
En fait, dans mon esprit, le cercle intérieur et le cercle extérieur représentent les deux pôles d’une respiration qui s’effectue entre le rien et le tout, et que matérialisent les lignes qui circulent entre les deux. Je me représente le petit cercle intérieur comme une espèce d’entonnoir sans fond qui se termine dans le rien, et du fond de ce rien naît le tout en revenant à partir de la périphérie. C’est plutôt une image en 3D, comme un tore :
Edit : et la partie inférieure du tore ne fait pas partie du visible, elle plonge dans l'infini, là où le point central et la périphérie se touchent. |
Lorsque je regarde cette image de "tore " ?
cela me crée un " sacré " vertige
Et, que c'est étrange cette sensation de tomber , non pas dans un vide, mais un plein , oui c'est un "bien" plein, lorsqu'il est rendu, donné à sa pleine transparence ...
Ah ! Si ce n'était de ces ombres que je et qui me sur- veillent !
Love, it´s easy ?
http://youtu.be/EKiqthx0GKw |
|
Revenir en haut |
|
|
daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8621 Localisation: belgique
|
Posté le: Di 26 Avr 2015 16:47 Sujet du message: |
|
|
Sibelle a écrit: | joaquim a écrit: | Bonjour Kiya,
KIYA a écrit: | Il s'agit de ton dernier dessin, mais sans le cercle extérieur, car il représenterait pour moi une limite, or il n'y en a pas, c'est l'infini... Je l'ai pourtant mentionné dans mon témoignage, comme le cercle infini de conscience ("Je suis le minuscule point de conscience ET le cercle infini de conscience ET le témoin de celà".) |
En fait, dans mon esprit, le cercle intérieur et le cercle extérieur représentent les deux pôles d’une respiration qui s’effectue entre le rien et le tout, et que matérialisent les lignes qui circulent entre les deux. Je me représente le petit cercle intérieur comme une espèce d’entonnoir sans fond qui se termine dans le rien, et du fond de ce rien naît le tout en revenant à partir de la périphérie. C’est plutôt une image en 3D, comme un tore :
Edit : et la partie inférieure du tore ne fait pas partie du visible, elle plonge dans l'infini, là où le point central et la périphérie se touchent. |
Lorsque je regarde cette image de "tore " ?
cela me crée un " sacré " vertige
Et, que c'est étrange cette sensation de tomber , non pas dans un vide, mais un plein , oui c'est un "bien" plein, lorsqu'il est rendu, donné à sa pleine transparence ...
Ah ! Si ce n'était de ces ombres que je et qui me sur- veillent !
Love, it´s easy ?
http://youtu.be/EKiqthx0GKw |
All you need is love ... Love is only ...
Il n'y a pas d'amour sans liberté ... Les deux sont-ils compatible !?
Hello Sibelle ! |
|
Revenir en haut |
|
|
|
|
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets Vous pouvez répondre aux sujets Vous ne pouvez pas éditer vos messages Vous ne pouvez pas supprimer vos messages Vous ne pouvez pas voter dans les sondages
|
Powered by php B.B.
© 2001, 2005 php B.B. Group · Theme and Graphics
by Tim Blackman
Traduction par : php.B.B-fr.com
|
|