Regards sur l'éveil
Café philosophique, littéraire et scientifique
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KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2196
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Posté le: Ve 26 Fév 2021 16:20 Sujet du message: D'où vient l'idée d'éveil ? |
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Comme le suggère le titre, je me pose cette question : pourquoi parle t-on d'éveil aujourd'hui, alors que par le passé, au moins dans la tradition européenne, il n'y avait pas cette notion de "s'éveiller", à ma connaissance.
Dans la littérature d'avant le 19ème, on retrouve principalement l'idée de servir Dieu, idée qui sous-tend même les actions charitables envers les hommes.
Il y a bien sûr les mystiques, avec leurs extases et leur relation "privilégiée" avec le divin, il y a la littérature gnostique ou apocryphe qui nous laisse entrevoir un autre spiritualité que celle imposée par l'église officielle, il y a des discours sur la nature divine l'homme , mais cette notion d'éveil telle qu'on la comprend aujourd'hui ne semble pas présente.
Bien sûr, je ne prétend pas être une spécialiste de cette question , et peut-être que je me trompe. C'est en tout cas mon impression.
Mais il suffit de fréquenter des personnes d'un certain âge, comme on dit, pour se rendre compte que le sujet n'existait même pas "à leur époque". Le vie spirituelle était principalement basée sur la question religieuse , la morale, et les actes qui en découlaient, me semble t-il.
Alors pourquoi l'éveil, ou plutôt l'aspiration à l'éveil s'est-elle à ce point répandue ? |
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daniel
Inscrit le: 15 Fév 2006 Messages: 8584 Localisation: belgique
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Posté le: Ve 26 Fév 2021 18:40 Sujet du message: |
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Bonsoir Kiya !
Il me semble que cela vient du contact avec le bouddhisme (qui a inventé la notion d'éveil), et avec l'advaïta vedanta, par le biais de Vivekanda (qui a fait connaître Ramakrishna), et surtout, Ramana Maharshi, dont l'enseignement (qui remontait à bien loin) était considéré comme original ... il y a, aussi, Aurobindo, pour qui l'éveil n'était qu'une étape ... |
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KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2196
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Posté le: Ve 26 Fév 2021 20:42 Sujet du message: |
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Et bien justement, si c'est inventé, je comprend qu'il n'y ait pas eu d'équivalent en Europe. Mais si c'est un vécu, même exceptionnellement, pourquoi n'y a t-il pas de témoignages des anciens, d'enseignements équivalents en Europe ? |
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konrad
Inscrit le: 25 Mars 2018 Messages: 1467 Localisation: En van...dredi.
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Posté le: Ve 26 Fév 2021 21:24 Sujet du message: |
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Bonsoir KIYA,
Je me suis aussi posé la question.
Mon point de vue est que "l'éveil" est un avatar "spirituel" adapté aux mœurs contemporaines. Le spirituel, au sens de composante humaine fondamentale, prend les formes du moment.
Vous rappeliez qu'au 19ième siècle l'éveil était une notion inconnue.
L'époque était aux occultistes et aux sociétés secrètes. Le 20ième voit une résurgence de l'alchimie et des thaumaturges. Dans les années 60 au moment des guerres de décolonisation apparait une contestation de la jeunesse qui voit surgir le mouvement hippies et dans la foulée des années 70, les communautés et les spiritualités orientales. Le nouvel-âge syncrétiste prend de l'essor profitant de l'effondrement du christianisme.
Le monde devient plus ouvert, on voyage plus facilement, les idées et les croyances circulent et se mélangent. Dès la conquête de la Lune le phénomène ovni voit des communautés ufologiques se créer, les "sectes" deviennent un sujet d'actualité.
A l'arrivée des réseaux sociaux, en parallèle d'une accentuation de individualisme, les communautés et les gourous ne font plus recette. Internet fournit les réponses existentielles sur la toile. La globalisation s'accentue, le monde devient un village, le temps est compté on veut tout tout de suite.
Le marché domine le monde, l'heure est au pragmatisme et à l'efficience.
C'est le temps des coachs personnalisés, du bien-être, de l'éveil ou de la non-dualité derrière son écran.
C'est un peu schématiquement mon point de vue. "L'éveil" n'échappe pas au phénomène de mode du marché global.
Bien sur il ne se limite pas seulement à ça, mais une bonne partie fait partie du business global. |
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joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5638 Localisation: Suisse
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Posté le: Ve 26 Fév 2021 21:32 Sujet du message: |
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Bonjour Kiya,
Il me semble que dans l’Antiquité, on parlait surtout de sagesse et de bonheur. Et dans l’Occident chrétien, de béatitude. La popularisation de l'éveil n'est arrivée qu'avec le new age. Mais je me souviens de ces mots de Parménide, un des deux pères de la philosophie occidentale, avec Héraclite, et j'y lis ce qu’est l’éveil, même s'il n'utilise pas le mot :
Parménide a écrit: | Un seul chemin reste à suivre:
L'être est, et d'innombrables signes prouvent
Que l'être est sans naissance et sans mort
Parce qu'il est complet, immuable et éternel.
Il n'a jamais été, et il n'existera jamais, parce qu'il est complètement entier dans le présent,
Un, sans fin. Quel début, en effet, devrions-nous lui attribuer?
Vers où évoluerait-il? Où?
Je ne te permettrai pas de dire ou de penser qu'il vient du néant,
Ni qu'il n'est pas. Quelle exigence l'aurait fait apparaître
Tôt ou tard, du non-être?
Ainsi, il peut seul être, absolument, ou pas du tout.
Notre ferme conviction intérieure n'admettra jamais
Que quelque chose puisse jaillir du néant.
De cette façon, la déesse de la justice, interdisant la naissance et la mort,
Préserve sans relâche l'existence de l'être. Considérant que la question était de résoudre
Si l'être est ou n'est pas. Nous devons donc décider d'abandonner comme fausse
La seconde hypothèse, la voie qui ne peut être ni pensée ni formulée,
Et s'en tenir a la première, qui est le chemin de vérité.
Comment ce qui est pourrait t'il un jour cesser d'être? Comment aurait-il un jour pu commencer à être?
Ce qui est né n'est pas, ni ce qui doit naître.
Ainsi meurt la naissance et meurt donc la mort. |
http://www.cafe-eveil.org/forum/viewtopic.php?p=49661#49661 |
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joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5638 Localisation: Suisse
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Posté le: Ve 26 Fév 2021 21:43 Sujet du message: |
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konrad a écrit: | Bonsoir KIYA,
Je me suis aussi posé la question.
Mon point de vue est que "l'éveil" est un avatar "spirituel" adapté aux mœurs contemporaines. Le spirituel, au sens de composante humaine fondamentale, prend les formes du moment.
Vous rappeliez qu'au 19ième siècle l'éveil était une notion inconnue.
L'époque était aux occultistes et aux sociétés secrètes. Le 20ième voit une résurgence de l'alchimie et des thaumaturges. Dans les années 60 au moment des guerres de décolonisation apparait une contestation de la jeunesse qui voit surgir le mouvement hippies et dans la foulée des années 70, les communautés et les spiritualités orientales. Le nouvel-âge syncrétiste prend de l'essor profitant de l'effondrement du christianisme.
Le monde devient plus ouvert, on voyage plus facilement, les idées et les croyances circulent et se mélangent. Dès la conquête de la Lune le phénomène ovni voit des communautés ufologiques se créer, les "sectes" deviennent un sujet d'actualité.
A l'arrivée des réseaux sociaux, en parallèle d'une accentuation de individualisme, les communautés et les gourous ne font plus recette. Internet fournit les réponses existentielles sur la toile. La globalisation s'accentue, le monde devient un village, le temps est compté on veut tout tout de suite.
Le marché domine le monde, l'heure est au pragmatisme et à l'efficience.
C'est le temps des coachs personnalisés, du bien-être, de l'éveil ou de la non-dualité derrière son écran.
C'est un peu schématiquement mon point de vue. "L'éveil" n'échappe pas au phénomène de mode du marché global.
Bien sur il ne se limite pas seulement à ça, mais une bonne partie fait partie du business global. |
Je suis assez d’accord avec vous, konrad. C’est parce que l’individu a été mis au centre, sommé d’être autonome, que l’attrait pour l’éveil s’est développé comme il l’a fait. Auparavant, il suffisait d’être relié. Mais la religion, en Occident, a disparu. |
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KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2196
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Posté le: Ve 26 Fév 2021 23:19 Sujet du message: |
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Konrad a écrit: | Mon point de vue est que "l'éveil" est un avatar "spirituel" adapté aux mœurs contemporaines. Le spirituel, au sens de composante humaine fondamentale, prend les formes du moment. |
C'est aussi ce que je me dis, mais tout de même, il me semble y avoir un bien grand écart entre la vision d'aujourd'hui et celle d'hier. La constante restant bien sûr l'interrogation de l'homme sur lui-même.
Il me semble y avoir un paradoxe dans cette recherche de l'éveil sous sa forme actuelle. N'est-ce pas une façon de rechercher l'universel pour soi ? L'homme actuel se sent-il à ce point seul ?
Merci Joaquim pour cet extrait de Parménide. C'est parlant en effet. |
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linda b Invité
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Posté le: Sa 27 Fév 2021 0:15 Sujet du message: Qu'est-ce que l'éveil? |
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Bonsoir KIYA
Il y a beaucoup de choses qui changent. Regarde juste ici,dans ce forum,nous pouvons parler de différents sujets,il y a des beaux échanges,dans l'ensemble,les gens semblent à l'aise.
Quand je pense à mes grands-parents,ils parlaient de télépathie,des rêves,de l'intuition etc,mais,ils se faisaient parfois regarder comme des extra-terrestres,il fallait se taire sur bien des choses à cette époque.
Encore aujourd'hui,il y a du chemin à faire,mais on peut arriver à rencontrer des gens qui comprennent,qui ont le goût d'aborder des sujets comme l'éveil,et se poser des questions,sans se sentir mal à l'aise.
Voici un texte
https://www.etreplus.be/post/l-%C3%A9veil-spirituel-pour-une-ouverture-de-la-conscience |
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Sa 27 Fév 2021 1:14 Sujet du message: |
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joaquim a écrit: | Bonjour Kiya,
Il me semble que dans l’Antiquité, on parlait surtout de sagesse et de bonheur. Et dans l’Occident chrétien, de béatitude. La popularisation de l'éveil n'est arrivée qu'avec le new age. Mais je me souviens de ces mots de Parménide, un des deux pères de la philosophie occidentale, avec Héraclite, et j'y lis ce qu’est l’éveil, même s'il n'utilise pas le mot :
Parménide a écrit: | Un seul chemin reste à suivre:
L'être est, et d'innombrables signes prouvent
Que l'être est sans naissance et sans mort
Parce qu'il est complet, immuable et éternel.
Il n'a jamais été, et il n'existera jamais, parce qu'il est complètement entier dans le présent,
Un, sans fin. Quel début, en effet, devrions-nous lui attribuer?
Vers où évoluerait-il? Où?
Je ne te permettrai pas de dire ou de penser qu'il vient du néant,
Ni qu'il n'est pas. Quelle exigence l'aurait fait apparaître
Tôt ou tard, du non-être?
Ainsi, il peut seul être, absolument, ou pas du tout.
Notre ferme conviction intérieure n'admettra jamais
Que quelque chose puisse jaillir du néant.
De cette façon, la déesse de la justice, interdisant la naissance et la mort,
Préserve sans relâche l'existence de l'être. Considérant que la question était de résoudre
Si l'être est ou n'est pas. Nous devons donc décider d'abandonner comme fausse
La seconde hypothèse, la voie qui ne peut être ni pensée ni formulée,
Et s'en tenir a la première, qui est le chemin de vérité.
Comment ce qui est pourrait t'il un jour cesser d'être? Comment aurait-il un jour pu commencer à être?
Ce qui est né n'est pas, ni ce qui doit naître.
Ainsi meurt la naissance et meurt donc la mort. |
http://www.cafe-eveil.org/forum/viewtopic.php?p=49661#49661 |
superbe texte
merci Joaquim _________________ l’éveil c'est l'esprit qui, libre de tout objet ,reposant en soi et accueillant tout, se révèle à lui-même |
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KIYA
Inscrit le: 20 Fév 2014 Messages: 2196
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Posté le: Sa 27 Fév 2021 2:27 Sujet du message: |
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A propos de cet extrait du poème de Parménide, j'ai eu le sentiment en le lisant que ses dires relevaient plus d'une logique ou d'une déduction philosophique - donc du domaine de la pensée réflexive - que de quelque chose de vécu ou de découvert. Principalement à cause de la formulation. J'ai donc consulté d'autres traductions, mais elles me donnent toutes la même impression.
J'ai trouvé ce commentaire qui semble confirmer mon intuition :
https://1000-idees-de-culture-generale.fr/parmenide-nature/
L’ignorance de la nature est la source de l’erreur.
Parménide affirme que les hommes tombent dans l’erreur parce qu’ils ne partent pas de la distinction radicale de l’être et du non-être, alternative sur laquelle est calquée celle de la vérité (aletheia) et de l’opinion (doxa), qui structure la philosophie. La vérité philosophique consiste donc à dévoiler l’être. « Je te détourne, clame-t-il, de cette voie de recherche, où les mortels qui ne savent rien s’égarent incertains ; l’impuissance de leur pensée y conduit leur esprit errant ; ils vont sourds et aveugles, stupides et sans jugement ; ils croient qu’être et ne pas être est la même chose et n’est pas la même chose ; et toujours leur chemin les ramène au même point » (De la nature). Dans le détail, Parménide oppose la logique à l’expérience, car il conçoit la raison comme le critère ultime de la vérité. Par exemple, c’est par un raisonnement logique que l’esprit en vient à admettre l’existence de l’être et l’inexistence du non-être, puis l’exigence que les qualités de l’être ne soient pas contradictoires. Cette pierre de touche logique s’accompagne d’une confirmation psychologique : la vérité a un cœur inébranlable, elle est animée par la force de la certitude, quand l’opinion, issue des sens et de la parole, peine à convaincre. Ce rationalisme critique de Parménide s’oppose à la méthode plus expérimentale de l’école ionienne (notamment Thalès, Anaximandre, Héraclite). |
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joaquim Administrateur
Inscrit le: 06 Août 2004 Messages: 5638 Localisation: Suisse
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Posté le: Sa 27 Fév 2021 13:27 Sujet du message: |
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Bonjour Kiya,
KIYA a écrit: | A propos de cet extrait du poème de Parménide, j'ai eu le sentiment en le lisant que ses dires relevaient plus d'une logique ou d'une déduction philosophique - donc du domaine de la pensée réflexive - que de quelque chose de vécu ou de découvert. Principalement à cause de la formulation. J'ai donc consulté d'autres traductions, mais elles me donnent toutes la même impression. |
C’est possible. Parménide se situe au point d’articulation de l’histoire de l’Occident où la pensée devient de plus en plus conceptuelle, et de moins en moins voyante. Faut-il comprendre ses mots en les lisant depuis l’amont, depuis le versant voyant, ou en les lisant à partir de la philosophie qui l'a suivi, depuis le versant conceptuel ? J’aurais tendance à dire que les deux lectures sont possibles. Pour ma part, je sens dans le Poème de Parménide un souffle voyant qui dépasse la simple dimension du concept.
Pour prendre une autre époque moins éloignée, voici par exemple un texte lui aussi très marqué par son temps, les recommandations d’un Jésuite, le Père François Guilloré dans un ouvrage intitulé "Les Progrès de la vie spirituelle", publié en 1687. Il parle à mon avis lui aussi de l’éveil, sans utiliser non plus ce terme :
«Ne vous imaginez pas qu’il faille peu de courage quand Dieu appelle une âme à ne rien faire en elle, et à ne point opérer pour en faire l’abandon. Sachez que s’il y a une peine cruelle à la nature, celle-ci est une des plus douloureuses, parce qu’elle tombe par là dans ce rien et ce néant de l’intérieur.
Lorsque Dieu lui fait cette invitation, et qu’il lui donne comme le signal, pour ne dire plus mot intérieurement, c’est appeler la nature à sa destruction, qui ne manque pas alors d’en souffrir des agonies, jusqu’à ce que la grâce l’ait domptée et l’ait conduite à mourir peu à peu à ses propres opérations. Il faut donc en ce point un courage bien déterminé pour s’abandonner à cette sorte de peine, en renonçant à tous ses actes. Aussi voyons-nous que des petits esprits, sensuels et tendres sur eux-mêmes, n’entrent jamais dans ces voies. Ne craignez donc rien, mon Théonée, et si Dieu vous attire à cet état, abandonnez-vous y généreusement.
Mais à votre avis, quel abandon y faut-il ? Il y faut un abandon intérieur extraordinaire pour ne plus se regarder : car plus cet état va en avant, plus il est rigoureux à la nature, et plus il lui paraît effroyable, parce qu’outre le vide de toute opération intérieure que ressent la partie animale, les tentations ont coutume d’y être terribles; elles disent que tout est perdu, qu’on est éloigné de Dieu, et le reste; mais c’est alors qu’il faut recourir fortement à tous les abandons et se laisser là soi-même, comme une chose abominable, qui voudrait pourtant qu’on fit cas de ses gémissements.
Je vous le répète, il y faut le plus grand courage et une certaine détermination d’esprit dans l’abandon le plus parfait, car on s’ennuie de ne rien voir que misère, de ne sentir rien et de ne faire rien. C’est pourquoi l’âme doit toujours s’élever au dessus d’elle en esprit de foi et d’oubli, et soutenir l’effort de toutes les pensées qui portent ou le dégoût ou le désespoir.
C’est ici proprement où se trouve l’état du rien, et où par ce moyen l’âme apprend à faire place à Dieu sans pourtant le connaître, parce qu’elle n’est pas encore bien épurée. Mais quand son abandon heureux, l’ayant fait sortir d’elle, a fait entièrement place à Dieu, alors Dieu, qui auparavant cachait en soi son opération, commence à la lui faire sentir et à lui faire connaître que c’est lui qui fait tout ce qu’il découvre à l’âme en ce temps ; parce qu’étant éloignée de son fond par ce rien où elle a été mise, elle est capable de voir ce que Dieu fait et opère en elle, sans y mettre rien du sien, et sans s’approprier rien de ce qui se passe.
(...)
Non, ne prétendez jamais rien dans votre fonds, y mettant du vôtre ; mais laissez le plein et le vide, le tout et le rien indifféremment, comme Dieu voudra l’opérer ; ne veuillez pas même comprendre qu’autant qu’on vous fera comprendre et qu’on vous fera voir ; bien plus ne jouissez des choses qu’autant qu’on vous en fera jouir sans vous y appliquer de vous-même, et pour les goûter, et pour les contempler, et pour y demeurer (...).» |
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riseohms
Inscrit le: 30 Nov 2009 Messages: 4333 Localisation: paris
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Posté le: Sa 27 Fév 2021 13:34 Sujet du message: |
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joaquim a écrit: | Bonjour Kiya,
KIYA a écrit: | A propos de cet extrait du poème de Parménide, j'ai eu le sentiment en le lisant que ses dires relevaient plus d'une logique ou d'une déduction philosophique - donc du domaine de la pensée réflexive - que de quelque chose de vécu ou de découvert. Principalement à cause de la formulation. J'ai donc consulté d'autres traductions, mais elles me donnent toutes la même impression. |
C’est possible. Parménide se situe au point d’articulation de l’histoire de l’Occident où la pensée devient de plus en plus conceptuelle, et de moins en moins voyante. Faut-il comprendre ses mots en les lisant depuis l’amont, depuis le versant voyant, ou en les lisant à partir de la philosophie qui l'a suivi, depuis le versant conceptuel ? J’aurais tendance à dire que les deux lectures sont possibles. Pour ma part, je sens dans le Poème de Parménide un souffle voyant qui dépasse la simple dimension du concept.
Pour prendre une autre époque moins éloignée, voici par exemple un texte lui aussi très marqué par son temps, les recommandations d’un Jésuite, le Père François Guilloré dans un ouvrage intitulé "Les Progrès de la vie spirituelle", publié en 1687. Il parle à mon avis lui aussi de l’éveil, sans utiliser non plus ce terme :
«Ne vous imaginez pas qu’il faille peu de courage quand Dieu appelle une âme à ne rien faire en elle, et à ne point opérer pour en faire l’abandon. Sachez que s’il y a une peine cruelle à la nature, celle-ci est une des plus douloureuses, parce qu’elle tombe par là dans ce rien et ce néant de l’intérieur.
Lorsque Dieu lui fait cette invitation, et qu’il lui donne comme le signal, pour ne dire plus mot intérieurement, c’est appeler la nature à sa destruction, qui ne manque pas alors d’en souffrir des agonies, jusqu’à ce que la grâce l’ait domptée et l’ait conduite à mourir peu à peu à ses propres opérations. Il faut donc en ce point un courage bien déterminé pour s’abandonner à cette sorte de peine, en renonçant à tous ses actes. Aussi voyons-nous que des petits esprits, sensuels et tendres sur eux-mêmes, n’entrent jamais dans ces voies. Ne craignez donc rien, mon Théonée, et si Dieu vous attire à cet état, abandonnez-vous y généreusement.
Mais à votre avis, quel abandon y faut-il ? Il y faut un abandon intérieur extraordinaire pour ne plus se regarder : car plus cet état va en avant, plus il est rigoureux à la nature, et plus il lui paraît effroyable, parce qu’outre le vide de toute opération intérieure que ressent la partie animale, les tentations ont coutume d’y être terribles; elles disent que tout est perdu, qu’on est éloigné de Dieu, et le reste; mais c’est alors qu’il faut recourir fortement à tous les abandons et se laisser là soi-même, comme une chose abominable, qui voudrait pourtant qu’on fit cas de ses gémissements.
Je vous le répète, il y faut le plus grand courage et une certaine détermination d’esprit dans l’abandon le plus parfait, car on s’ennuie de ne rien voir que misère, de ne sentir rien et de ne faire rien. C’est pourquoi l’âme doit toujours s’élever au dessus d’elle en esprit de foi et d’oubli, et soutenir l’effort de toutes les pensées qui portent ou le dégoût ou le désespoir.
C’est ici proprement où se trouve l’état du rien, et où par ce moyen l’âme apprend à faire place à Dieu sans pourtant le connaître, parce qu’elle n’est pas encore bien épurée. Mais quand son abandon heureux, l’ayant fait sortir d’elle, a fait entièrement place à Dieu, alors Dieu, qui auparavant cachait en soi son opération, commence à la lui faire sentir et à lui faire connaître que c’est lui qui fait tout ce qu’il découvre à l’âme en ce temps ; parce qu’étant éloignée de son fond par ce rien où elle a été mise, elle est capable de voir ce que Dieu fait et opère en elle, sans y mettre rien du sien, et sans s’approprier rien de ce qui se passe.
(...)
Non, ne prétendez jamais rien dans votre fonds, y mettant du vôtre ; mais laissez le plein et le vide, le tout et le rien indifféremment, comme Dieu voudra l’opérer ; ne veuillez pas même comprendre qu’autant qu’on vous fera comprendre et qu’on vous fera voir ; bien plus ne jouissez des choses qu’autant qu’on vous en fera jouir sans vous y appliquer de vous-même, et pour les goûter, et pour les contempler, et pour y demeurer (...).» |
merci pour ce texte de Francois guilloré
oui accepter de n'être rien et de ne rien faire (ce qui correspond pour moi à l'état naturel ) demande beaucoup de détermination, de courage et de confiance _________________ l’éveil c'est l'esprit qui, libre de tout objet ,reposant en soi et accueillant tout, se révèle à lui-même |
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Jo
Inscrit le: 26 Sep 2020 Messages: 106
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Posté le: Sa 27 Fév 2021 13:44 Sujet du message: |
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riseohms a écrit: | oui accepter de n'être rien et de ne rien faire (ce qui correspond pour moi à l'état naturel ) demande beaucoup de détermination, de courage et de confiance |
Bonjour Joel
Peux-tu expliciter s'il te plait ? |
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rien
Inscrit le: 15 Oct 2017 Messages: 689 Localisation: toulon
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Posté le: Sa 27 Fév 2021 21:03 Sujet du message: |
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coucou ,
" d'où vient l'idée d'éveil ?"
'être en équilibre est la force naturelle du vivant bien au delà de nos perceptions personnelles
ah oui , trés joli texte de françois guilloré , simple et dénudé , frais et neuf ,
ça fait du bien , merci _________________ une croix , chacun la sienne et dieu pour tous .
a lire symboliquement , bisous bisous et reste là; |
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rien
Inscrit le: 15 Oct 2017 Messages: 689 Localisation: toulon
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Posté le: Sa 27 Fév 2021 21:08 Sujet du message: |
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Jo a écrit: | riseohms a écrit: | oui accepter de n'être rien et de ne rien faire (ce qui correspond pour moi à l'état naturel ) demande beaucoup de détermination, de courage et de confiance |
Bonjour Joel
Peux-tu expliciter s'il te plait ? |
coucou , je ne sais pas ce qur joel vas répondre mais il est vrai qu'être rien c'est pas une évidence pour tout le monde ! _________________ une croix , chacun la sienne et dieu pour tous .
a lire symboliquement , bisous bisous et reste là; |
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