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Le dilemme du prisonnier
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Pierre



Inscrit le: 22 Nov 2005
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MessagePosté le: Ma 22 Août 2006 0:24    Sujet du message: Répondre en citant

joaquim a écrit:
J’avançais qu’une certitude pour laquelle je pourrais mettre ma tête à couper était que la somme des angles d’un triangle faisaient toujours 180 degrés. Mon amie de l’époque, qui pourtant avait compris le raisonnement qui permettait d’énoncer ce théorème, avait répliqué que jamais elle ne mettrait sa tête à couper pour une telle “vérité”.


Pardonnez-moi (mesdames) l'aparté mathématique qui va suivre (on est plus à une digression près, et après tout ce sont les vacances ! ) mais ... ton amie avait bien raison : en géométrie elliptique (qui, pour le dire simplement, représente des figures sur des sphères par opposition avec la géométrie euclidienne - ou classique - qui les représente sur des surfaces planes), la somme des angles d'un triangle est toujours strictement inférieure à 180°. Amuses-toi à découper un triangle sur une orange en faisant en sorte que les trois sommets soient assez proches les uns des autres et que les trois côtés fassent presque le tour de l'orange et tu verras que la somme des angles est très inférieure à 180°...

Bon, tout ça pour dire qu'à part des tautologies et des lapalissades du genre "un quart d'heure avant sa mort, il était encore en vie", je ne vois guère de vérités intellectuelles qui puissent prétendre se hisser au rang de vérités absolues.

Quoique ... Stephen Jourdain a écrit quelque chose comme "Je vois la vérité à ma fenêtre et je récuse cette vison comme étant la vérité ; voilà l'expression la plus pure de la vérité" et la première phrase du Livre de la Voie et de la Vertu de Lao-Tseu est "Doa ke dao", traduit par "La Voie n'est pas la Voie", ou encore "La Voie que l'on peut nommer/désigner/définir n'est pas la Voie Véritable".

Cette manière de parler de la vérité me touche beaucoup car elle laisse entendre que l'expression la plus juste de la vérité est nécessairement contradictoire, ou antinomique, pour employer un terme qui fit en son temps quelque bruit sur ce forum. Pour l'homme ordinaire, cette contradicton intrinsèque apparait comme irréconciliable, ambivalente, deux pôles fâchés qui se tournent le dos, et qui l'obligent à voter pour l'un ou pour l'autre, comme sont irréconciliables le raisonnement logique du prisonnier et le raisonnement "contre nature" qui ferait triompher le bien commun. Alors que pour l'homme "éveillé", pour l'homme au coeur saturé d'amour, débarrassé du sentiment d'être-quelqu'un-qui-doit-faire-quelque-chose, la contradiction s'abolit, non pas en disparaissant, en retournant au néant, mais en se résolvant : les termes contradictoires se superposent sans s'exclure, se fécondent, et révèlent "quelque chose" d'indicible (car le dire serait nécessairement retomber dans une expression contradictoire, duelle), fruit d'une union entre le coeur et la raison, "quelque chose" qui serait en relief, par opposition à une vérité intellectuelle qui serait "plate", comme se révèle une image tri-dimensionnelle dans le stéréogramme ci-dessous. (et pour ceux qui ne connaitraient pas ce genre de curiosité visuelle, je vous invite à parcourir le net pour en trouver le mode d'emploi).

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joaquim
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MessagePosté le: Ma 22 Août 2006 21:07    Sujet du message: Répondre en citant

Pierre a écrit:
(et pour ceux qui ne connaitraient pas ce genre de curiosité visuelle, je vous invite à parcourir le net pour en trouver le mode d'emploi).

Comme par exemple ICI Wink




Dans la série “Peut-on vraiment se fier à sa raison?”, voici un joli paradoxe (trouvé sur le site donné en lien par Aurélien):
Pour ceux qui ne parlent pas anglais: Vu que toutes les pièces du puzzle sont indentiques, d’où vient le trou blanc?
[cliquez sur l'image pour la voir nette]





Et encore une autre énigme redoutable, malgré la simplicité des données (âmes sensibles s’abstenir Wink)







Pierre a écrit:
Pour l'homme ordinaire, cette contradiction intrinsèque apparaît comme irréconciliable, ambivalente, deux pôles fâchés qui se tournent le dos, et qui l'obligent à voter pour l'un ou pour l'autre, comme sont irréconciliables le raisonnement logique du prisonnier et le raisonnement "contre nature" qui ferait triompher le bien commun. Alors que pour l'homme "éveillé", pour l'homme au coeur saturé d'amour, débarrassé du sentiment d'être-quelqu'un-qui-doit-faire-quelque-chose, la contradiction s'abolit, non pas en disparaissant, en retournant au néant, mais en se résolvant : les termes contradictoires se superposent sans s'exclure, se fécondent, et révèlent "quelque chose" d'indicible (car le dire serait nécessairement retomber dans une expression contradictoire, duelle), fruit d'une union entre le coeur et la raison, "quelque chose" qui serait en relief, par opposition à une vérité intellectuelle qui serait "plate", comme se révèle une image tri-dimensionnelle dans le stéréogramme ci-dessous.

Très jolie image et très joliment dit. Smile Mais il subsiste malgré tout un problème têtu. Car s’il est vrai que pour la personne éveillée, les contradictions n’existent plus en tant que telles, ces contradictions existent bel et bien dans la réalité concrète du monde humain. Ainsi, si on donnait à un être réalisé la direction politique de la Terre, il pourrait certes apporter quelques améliorations par rapport au fonctionnement actuel, mais il serait incapable de créer un Etat idéal. Toute loi visant à corriger certaines injustices les corrige certes, mais du même coup en crée d’autres, nécessairement. Parce que l’inégalité, et donc l’injustice, sont inscrites dans la dualité, et qu’il est donc impossible de les supprimer — à moins que tous les êtres humains deviennent “éveillés”.

Jésus fut soumis dans le désert à la tentation du Diable, qui lui proposa de régner sur le monde. Le monde étant le domaine de la dualité, régner sur le monde, c’est par la force des choses être dans la dualité. Dès lors, seul le Diable (diabolos, en grec, signifie “celui qui sépare”) peut être le roi du monde, et si Jésus avait accepté d’être le roi du monde, il serait devenu du même coup le Diable. Mais il préféra mourir sur la Croix, et conduire les êtres humains à l’unité dans l’amour. Ainsi, le point de vue de mauvaiseherbe, qu’on pourrait appeler celui de l’“éveillée” (désolé de l’étiquette Wink), est certainement plus élevé que celui de la logique; et c’est parce qu’il est plus élevé qu’il résoud les contradictions qu’elle ne peut, elle, que signaler. Ces contradictions n’existent tout simplement plus dans l’état d’éveil, dans le monde de l’éveil, c’est-à-dire dans l’unité. Mais aussitôt qu’on retombe dans la dualité, elles sont à nouveau présentes, sans solution. La solution se trouve en dehors d’elles, dans un monde où elles-mêmes n'existent plus.

Pour résoudre un problème, il faut toujours s’élever au-dessus des éléments qui le composent, afin d'accéder à une loi capable d'en intégrer les éléments inconciliables. La solution ne se trouve jamais à l’intérieur du problème, mais toujours en dehors de celui-ci. Il faut toujours opérer un décentrage par rapport aux éléments d’un problème pour en trouver la solution. L’exemple le plus fameux est le décentrage opéré par Copernic, qui apporte une solution unique et définitive à toutes les contradictions sur lesquelles butait le système de Ptolémée. En fait, dans le système de Copernic, les contradictions du système de Ptolémée n’existent tout simplement plus. Elles étaient produites par le système de Ptolémée. Cette observation est d'ailleurs fort intéressante, car elle donne à voir que des contradictions n'existent jamais "en soi", dans la réalité, mais toujours dans le regard que l'on porte sur la réalité. Si on porte sur elle un regard frappé par la dualité ("je" suis séparé du "monde"), alors on baigne dans un tissu de contradiction, inhérent non pas à la réalité elle-même, mais au regard que l'on porte sur elle. Et on résoud ces contradictions en "sortant" de ce regard (qui n'est qu'un regard partiel, puisqu'il ne perçoit pas sa propre origine), et en accédant à un regard total, dans leque "je" et "le monde" sont unis dans une seule Réalité. C’est de la même manière, mais à un autre niveau, en-dehors du cadre dans lequel semble limité l’énoncé des énigmes, que se trouve toujours leur solution. L’exemple le plus paradigmatique en est, à mon avis celui-ci:

Reliez ces points à l’aide de 4 droites, sans lever le crayon.
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phoeniks



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MessagePosté le: Ma 22 Août 2006 23:23    Sujet du message: Répondre en citant

Toujours dans la série: "peut-on vraiment se fier à sa raison?": un autre paradoxe:

Si je laisse tomber d'une hauteur d'un mètre, une balle de tennis, il est évident qu'elle va dans un premier temps parcourir la moitié de la distance la séparant du sol. Il restera alors l'autre moitié de la distance (soit 50cm). Il faudra ensuite, qu'elle parcourt la moitié de la distance restante (soit 25cm), et de même il restera à parcourir, avant de toucher le sol, la distance de 25cm. ETC, ETC...
Nous sommes donc d'accord que jamais la balle de tennis ne touchera le sol, puisqu'il reste toujours une demi-distance à parcourir.
Et pourtant.... violent15
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Pierre



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MessagePosté le: Me 23 Août 2006 11:46    Sujet du message: Répondre en citant

joaquim a écrit:
Mais il subsiste malgré tout un problème têtu. Car s’il est vrai que pour la personne éveillée, les contradictions n’existent plus en tant que telles, ces contradictions existent bel et bien dans la réalité concrète du monde humain.


Je ne te suis pas. Je ne comprends pas comment, pour une personne éveillée, une réalité concrète - contradictoire ou pas - pourrait continuer à exister en soi. L'éveil, de ce que j'en ai compris, est le dépassement de l'opposition moi/le monde en s'engouffrant nu dans ce chas d'aiguille qu'est le moment présent ; de là, uni à Cela et à Maintenant, la réalité concrète du monde humain apparait pour ce qu'elle est : une représentation, une objectivation, un néant. On peut néanmoins faire quelques concessions à cette illusion, pour la commodité d'un échange avec d'autres êtres humains plus endormis et se distraire en parlant de la guerre au Liban ou des vieux épisodes de Columbo.

joaquim a écrit:
Jésus fut soumis dans le désert à la tentation du Diable, qui lui proposa de régner sur le monde.


Même raisonnement que précédemment : le monde, ce monde sur lequel régner, n'a pas de réalité. C'est tout le drame des hommes de pouvoir. Qu'est ce que vit un président de la république par exemple, comme expérience du pouvoir ? La sensation d'avoir le pays sur lequel il règne à ses pieds ? Boaf, pas chez nous en tout cas, ou alors dans sa tête. La satisfaction d'influer sur le cours du destin national ? Mouais, ... . Tout ça ce sont des idées, qu'il peut être agréable à caresser. Mais la réalité concrète, le vécu quotidien me semble être surtout une succession de situations, certaines parfaitement ordinaires (embrouille avec la famille, manger dormir, être malade), d'autres fort privilègiées, (courbettes flatteries, luxe, coup de fil à machin pour service personnel, bains de foules, escort girls et Corona à gogo), et d'autres enfin liées à l'activité de la fonction (réunions, consultations, décisions, projets ...) et tout cela vécû avec plus ou moins de bonheur suivant l'état d'humeur du moment. Mais dans aucune de ces situations "la nation que l'on gouverne" n'apparait en tant que telle. Elle n'est tout simplement pas réelle. Pourtant, la réalité concrète humaine, chacun de nous semble y souscrire, et depuis l'invention des médias de masse, on a jamais autant causé : guerres, incendies, crimes, politique politicienne, montée des extrémismes, faits d'hivers atroces... où est le Dieu aimant et omnipotent dans cette horrible réalité humaine ? S'il y a un Dieu d'amour, alors il n'est pas très puissant et si c'est un Dieu omnipotent, alors il n'est pas très aimant, c'est le moins que l'on puisse dire.

La réalité objective et Dieu s'excluent mutuellement. Là où j'en suis (mais je simplifie peut-être un peu trop le problème), c'est de dire que pour l'homme athée, la réalité objective est une évidence qui remet l'existence de Dieu en question alors que pour le croyant, pour l'homme de foi, l'expérience de Dieu, (vécue subjectivement, et non pas comme une apparition miraculeuse au sein d'une réalité objective) remet en question l'essence même d'une réalité objective.
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ponkhâ



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MessagePosté le: Me 23 Août 2006 17:41    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour les amis, je ne fait que vite m'immiscer en apportant que quelques sensations, sans malheureusement beaucoup argumenter !
Pierre a écrit:
...Je ne comprends pas comment, pour une personne éveillée, une réalité concrète - contradictoire ou pas - pourrait continuer à exister en soi. L'éveil, de ce que j'en ai compris, est le dépassement de l'opposition moi/le monde en s'engouffrant nu dans ce chas d'aiguille qu'est le moment présent...

Le noeud viens me semble t'il parce qu' il n'existe pas d'éveil personnel. Ou bien comme cela à déjà était décrit, l'éveil c'est la réalisation qu'il n'y a personne qui peut s'éveiller. On peut partir du postulat que je suis ou, celui-là est éveillé, est un non sens.
Si l'éveil est hors espace- temps et que le corps y est plein dedans, il ne resterai dans le corps (personnalité) que la sensation qui se répercute, et je suppose que c'est celle de se sentir libre.
Et cette liberté ce concrétisant (certainement d'une manière progressive) par la quiétude de la personnalité dans ce monde. Pour le reste rien ne devrait changer. Et si c'ést ainsi, c'est déjà pas si mal, non ?
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joaquim
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MessagePosté le: Me 23 Août 2006 22:34    Sujet du message: Répondre en citant

Il n’y a pas de contradiction dans la réalité. Les contradictions sont toujours dans le regard que l’on porte sur la réalité. L’éveil, c’est cesser de porter un regard sur la réalité, et être un avec la Réalité. Dans ce sens-là, des “Regards sur l’éveil” ne peuvent être que duels, même s’ils pointent vers quelque chose qui se trouve hors de la dualité.

Pierre a écrit:
joaquim a écrit:
Mais il subsiste malgré tout un problème têtu. Car s’il est vrai que pour la personne éveillée, les contradictions n’existent plus en tant que telles, ces contradictions existent bel et bien dans la réalité concrète du monde humain.


Je ne te suis pas. Je ne comprends pas comment, pour une personne éveillée, une réalité concrète - contradictoire ou pas - pourrait continuer à exister en soi.


Tu as mal lu ce que j’ai écrit. Wink J’ai dit qu’il est vrai que pour la personne éveillée, les contradictions n’existent plus en tant que telles. Je suis donc parfaitement d’accord avec toi: il n’y a plus pour elle aucune contradiction, puisqu’elle-même ne se perçoit plus séparée de la Réalité. Et pourtant — je pense que c’est cette assertion qui pose problème — dans la réalité concrète du monde humain, ces contradictions existent bel et bien. Pourquoi Bouddha a-t-il continué à parler, même à partir du moment où il n’a fait plus qu’un avec la Réalité? — C’est parce que les contradictions qui n’existaient plus pour lui persistaient dans le monde humain qui l’entourait. Même si lui-même ne les percevait plus, ceux qui l’entouraient les percevaient bel et bien, et à ce titre, ces contradictions avaient malgré tout une existence, à défaut de réalité. Et le Bouddha a pris en compte leur existence, puisqu'il y a consacré son enseignement.

La réalité concrète du monde matériel (naturel), c’est ce dont s’occupent les sciences naturelles. Dans ces sciences-là, les nouvelles théories qu’on développe ont pour but d’éliminer les contradictions présentes dans l'ancienne théorie, afin de coller toujours mieux à la réalité du monde, jusqu’à parvenir, peut-être un jour, à une théorie globale qui unifierait tout.

Dans le monde humain, par contre, celui dont s’occupent les sciences humaines, il n’en va pas du tout ainsi. La contradiction est inhérente à l’objet qu’elles étudient. L’existence humaine est elle-même construite sur une contradiction (“je” suis séparé du “monde”), qui est celle qui génère toutes les autres. On ne cherche pas ici à lever des contradictions, mais à les mettre en lumière, ou plutôt à leur trouver, ou à leur donner un sens. L’être humain vit dans des contradictions, et cherche à leur donner du sens. Voilà quelque chose de spécifiquement humain. L’animal ne cherche pas un sens à sa vie. L'être humain, lui, cherche toujours à décoder la réalité, pour en déchiffrer le sens. Pourtant, il n’y a aucun sens “pré-inscrit” dans la réalité: le sens se découvre en même temps qu’il se crée. C’est pourquoi le sens, à l'opposé des formules des sciences naturelles, est toujours touffu et enchevêtré, jamais simple et linéaire. On s'en convainc en réalisant que la recherche du sens prend elle-même un sens qui peut n’apparaître que plus tard. C’est ainsi par exemple que les rituels des populations primitives étaient en eux-mêmes une recherche de sens, et permettaient à la société de se souder autour d’eux. Aujourd’hui, l’anthropologie examine ces rites et ces sociétés, en essayant de dégager, avec une perspective qui n’était pas celle des populations primitives, mais qui est nôtre, un sens à ces rites, qui surprendrait peut-être ces populations elles-mêmes. Comme peut surprendre une personne l'interprétation psychologique qu'on fait ("juste" ou "fausse", c'est égal) de son comportement ou de ses paroles. A son tour, l’anthropologie, en étudiant aujourd'hui le sens de rites anciens, crée, sans s’en rendre compte, de la matière qui se prêtera, pour les historiens du futur, à la recherche d'un sens qu'on n'imagine pas aujourd'hui.


Pierre a écrit:
guerres, incendies, crimes, politique politicienne, montée des extrémismes, faits d'hivers atroces... où est le Dieu aimant et omnipotent dans cette horrible réalité humaine ? S'il y a un Dieu d'amour, alors il n'est pas très puissant et si c'est un Dieu omnipotent, alors il n'est pas très aimant, c'est le moins que l'on puisse dire.

Vouloir faire intervenir Dieu dans le monde du sens, c’est le faire chuter dans le monde de la dualité. Le sens n’existe que dans le monde de la dualité. Les notions de justice, d’égalité, de puissance, etc., qui donnent sens à notre action humaine, sont des abstractions sans réalité. Elles n’existent qu’à l’intérieur de la conscience duelle. La conscience duelle a besoin de donner un sens à son action. Le sens est son mobile nécessaire. La conscience unie à la Réalité ne donne pas de sens à son action. Son seul mobile, c’est l’amour. Le seul geste que Dieu accomplisse, c’est le don total de lui-même, à chaque instant. Et nous-mêmes n’avons qu’à répondre à son amour, pour être soulagé de la souffrance et réintégrer l’unité.

    «Ici réside le plus insondable dans le Mystère de Dieu: Celui qui est le Tout-Puissant n’est pas une Réalité qui reposerait en elle-même et serait du même coup insaisissable; il est une réalité telle qu’elle consiste uniquement dans le mouvement de se donner: source qui coule sans avoir en arrière d’elle-même une fontaine où elle puiserait, acte qui engendre sans avoir un réservoir de semence auquel il recourrait et sans tout un organisme qui accomplirait l’acte en question. C’est dans un pur acte de se répandre, que Dieu le Père est lui-même, qu’il est, s’il on veut, “personne” (d’une manière éminente).

    Si en différents endroits, le Nouveau Testament nomme le Père “tout-puissant”, on voit déjà, à partir de ce qui précède, que cette toute-puissance ne peut pas être une autre que celle d’un don de soi que rien ne peut limiter. Qu’est-ce qui pourrait surpasser la puissance de susciter une réalité “de même nature”, c’est-à-dire de même amour et de même puissance: non pas un autre Dieu, mais un autre en Dieu?»

    Hans Urs von Balthasar, Credo, Ed. Nouvelle cité1992.
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Pierre



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MessagePosté le: Je 24 Août 2006 16:04    Sujet du message: Répondre en citant

joaquim a écrit:

La conscience duelle a besoin de donner un sens à son action. Le sens est son mobile nécessaire. La conscience unie à la Réalité ne donne pas de sens à son action. Son seul mobile, c’est l’amour.


Shocked Ouf !

Pressé par les contingences de ma vie domestique, je n'ai guère le temps de me répandre en commentaires sur cette phrase. Il y a bien longtemps que je n'ai lu quelque chose d'aussi jubilatoire et libérateur ! J'en suis tout ému. Je ne sais si j'ai bien compris (je m'en fiche un peu, ce que j'éprouve me satisfait amplement), mais cette phrase me permet de voir, de l'extérieur, le douloureux cercle vicieux dans lequel je m'enferme dès lors que, éprouvant un mal-être passager, j'en cherche le sens pour en sortir. Chercher le sens ne fait que renforcer la dualité entre un moi qui souffre et un moi qui - ne voulant plus souffrir - se met en quête d'une explication.Mais cette explication n'a de sens que dans cette dualité moi souffrant/moi refusant la souffrance. Elle n'est donc d'aucune utilité pour s'en libérer. De plus cette quête de sens masque la racine véritable du mal-être qui est -restons simples - un manque d'amour, pour soi même, pour les autres, pour la Vie et pour la multitude d'actes du quotidien. Eh oui, lorsqu'on aime, on ne se demande pas pourquoi. C'est lorsque l'on cesse d'aimer que ce genre de question surgit.

Citation:

Oublier ces heures
Qui tuaient parfois
A coups de pourquoi
Le cœur du bonheur


"Mais, mais, mais, de qui se moque-t-on ? " bafouile mon égo-chercheur-de-sens affolé ! "La Vie n'aurait aucun sens ? Si ça peut me rendre plus heureux, je veux bien y souscrire, mais à condition qu'on m'explique pourquoi ! "

:Cool:
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joaquim
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MessagePosté le: Ve 25 Août 2006 15:31    Sujet du message: Répondre en citant

Trop heureux que tu te sois libéré d’un enfermement. Smile

Pierre a écrit:
cette phrase me permet de voir, de l'extérieur, le douloureux cercle vicieux dans lequel je m'enferme dès lors que, éprouvant un mal-être passager, j'en cherche le sens pour en sortir.


Tu valides encore une fois Wink, par l’expérience dont tu nous fait profiter en direct, une réflexion théorique développée un peu plus haut:

joaquim a écrit:
La solution ne se trouve jamais à l’intérieur du problème, mais toujours en dehors de celui-ci.

(...)

C’est de la même manière, mais à un autre niveau, en-dehors du cadre dans lequel semble limité l’énoncé des énigmes, que se trouve toujours leur solution.


Prenons par exemple l’énigme du puzzle impossible (pour celles et ceux qui n'ont pas trouvé ou pas cherché):



Tant qu’on ne remet pas en question les données apparentes du problème, celui-ci demeure insoluble. Comment, en effet, une même surface pourrait-elle être composées de parties dont la somme n’est pas constante? Pour résoudre l’énigme, il faut sortir d’une réflexion qui tourne en rond, empêtrée dans des données biaisées, et remettre en question, plutôt que la fiabilité de la raison, la paresse qui nous fait prendre pour acquises des données qui ne sont pas vérifiées. En effet, dans cette énigme, il existe une donnée que l’on prend pour acquise, alors qu’elle n’est même pas énoncée: c’est le fait que les deux figures que forment les pièces assemblées seraient des triangles. Il semble que ce soit le cas, et on prend cette apparence pour vraie. Or on peut se convaincre qu'il n'en est rien en constatant que la pente du triangle rouge (3/8) est plus faible que celle du triangle vert (2/5) : 15/40 < 16/40. Leur juxtaposition ne peut dont pas créer une droite, mais une ligne brisée. Dès lors, il existe, par rapport à la droite d'un triangle idéal, une surface en-dessus resp. en-dessous de la ligne brisée, qui est la même que celle d'un demi petit carré (je ne l’ai pas vérifié, mais je fais confiance à la raison Wink).

L’énigme des hommes enterrés demande elle aussi que l’on réfléchisse au-delà du cadre que semblent délimiter les données. Ce qu’on fait en général, dans un premier temps, c’est de se mettre successivement à la place de chacun de ces hommes, et de regarder les données du problème du point de vue de chacun. Et il n’y a pas de solution. Le décentrage qu’il s’agit d’opérer ici, ce n’est plus par rapport aux données du problème, mais par rapport au champ de réflexion dans lequel on recherche la solution. On part paresseusement du principe que ce champ est limité au regard que chacun des hommes porte sur la scène, de son propre point de vue. Or, la solution se trouve dans la réflexion que chacun peut se faire quant au regard que ses autres collègues peuvent porter sur la scène. Il s'agit-là de s'élever au-dessus de sa propre réflexion, et de prendre en compte la réflexion possible d'autrui. Ce décentrage-là ouvre un tout nouvel espace de réflexion, plus large que le précédent, et dans ce nouvel espace, il existe une solution à l’énigme. Wink
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ponkhâ



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MessagePosté le: Ve 25 Août 2006 17:57    Sujet du message: Répondre en citant

joaquim a écrit:
L’énigme des hommes enterrés demande elle aussi que l’on réfléchisse au-delà du cadre que semblent délimiter les données


mefiant15 :eureka:

Alors je me lance :
A ne vois que le mur est donc n'a qu'une chance sur deux de dire juste, alors il se tait.
B est dans la même situation, il se tait.
C ne vois que B et son chapeau blanc, tout de même qu'une chance sur deux, alors silence.
D vois C et B et un chapeau de chaque couleur. C'est lui qui vois le plus, mais pas assez pour être sûr à 100%

En fait il y a un troisième indice et c'est celui-là qui est la clé de cette énigme: Le silence.

C n'entendant pas D se manifester, il en déduit qu'il ne vois pas deux chapeau de la même couleur, car autrement il aurai parlé n'ayant aucune chance de se tromper sur le sien.
Grâce au silence de D et le chapeau blanc que C vois, lui il ne peut avoir qu'un noir. Il est de se fait sûr à 100% de ne pas se tromper.

Ouf !! Par contre il ma fallu plus de dix minutes, on aurait tous passé comme même Confused
Merci joaquim pour le tuyau :good:
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joaquim
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MessagePosté le: Di 27 Août 2006 1:57    Sujet du message: Répondre en citant

Lorsqu’on a résolu une énigme, on ressent une sorte de jubilation, qui n’est pas de l’orgueil, mais le bonheur de s’être libéré de quelque chose qui nous entravait et nous maintenait dans l’obscurité. Wink

Je suis tombé hier sur un texte de Stephen Jourdain (le personnage est décidément fascinant et résolument hors-norme...) qui apporte un éclairage capital sur ce point:

    «Au début de ma onzième, j’ai fait un blocage sur 2 + 2 = 4. Comprenais pas. Sentais bien qu’il y avait quelque chose à attendre de l’énigme, probablement une espèce de miracle, je m’énervais — mais rien! si ce n’est, dans ma tête, une sorte de brume acide... Et un jour, tout d’un coup, j’ai compris! J’ai eu l’illumination (ne riez pas: le soleil de l’intelligence n’émet pas de rayons mineurs): j’ai connu cette magique émotion de l’âme qu’est la rencontre avec le Vrai. 2 + 2 = 4 : l’impression qu’un ange me touche, que Dieu lui-même m’effleure! Un autre monde s’ouvre pour moi, où l’Esprit et l’Eternité mêlent leur deux parfums!...

    Je crois bien que ce devait être ma première rencontre avec le Vrai, ma naissance au Vrai... Brève effusion!

    Généralement, quand le Vrai visite une âme, il ne s’attarde guère, et, en cette occasion, il n’a pas rompu avec son habitude: à peine m’avait-il inondé de sa lumière que déjà il prenait congé et disparaissait, remportant avec lui dans l’éternité son attirail illuminatoire...

    Quand quelqu’un est sorti de chez vous, normalement, il n’est plus là.

    Il n’est plus là du tout.

    J’estime à un dixième de seconde le temps qu’il m’a fallu pour sentir que dans ma maison, quelque chose ne tournait pas rond; et à un autre dixième de seconde, celui que j’ai mis à identifier l’anomalie: 2 + 2 pour moi faisaient toujours 4, le Vrai me tenait compagnie; oui, il se tenait là, devant le regard de mon esprit, espèce de corps, d’objet commodément stocké dans une étendue abstraite, l’air ingénu, offert à ma cupidité et à ma vénération... Je ne disposais ni du commencement d’un mot ni du commencement d’une idée pour m’expliquer ce que je vivais; mais les possibilités de compréhension implicites d’un enfant de 5 ans doivent être illimitées, car j’ai su, j’ai reconnu instantanément, avec limpidité, que ce Vrai-là était un imposteur, l’écho nauséabond, cadavérique, jailli inexplicablement du fond de soi, du dieu que je venais d’avoir le privilège suprême de connaître; et compris également, même si cette fois ce ne fut que confusément, que l’apparition en moi de cet écho n’avait rien d’anecdotique, que cette pauvreté et cette corruption allaient désormais régner sur mon esprit, qui abordait une ère de falsification et de mort.

    (...)

    Cette révélation de l’existence d’un processus, implacablement prompt, quasiment indécelable, de dégénérescence de Vrai, par coagulation, cette vision terrifiante de l’éternité vivante, de l’éternité-vie, de l’éternité-dynamisme-pur se dégradant en un caillot, s’échouant en l’on ne sait quelle empreinte d’elle-même, devenant sa propre trace.»
    Stephen Jourdain, Péril en ma demeure, in Revue 3ème Millénaire, No 21, 1991.

Je n’ai jamais lu quelque chose d’aussi fort sur la dégradation que subit l'innocence lorsque l'objet qu'elle découvre avec émerveillement chute dans le registre de l'acquis. Jourdain a vraiment cueilli cet instant dans son status nascendi, avec une acuité et un discernement stupéfiant.

Cette expérience dévastatrice me rappelle celle d’Alexandre Voisard, relatée ici, qui à 6 ans, saisissant avec émotion dans sa main le coeur du monde qu'il venait de déterrer, s'est retrouvé brutalement terrassé par son propre geste en réalisant la profanation qu’il venait d’accomplir.
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Jean-Marie



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MessagePosté le: Sa 26 Mai 2007 14:50    Sujet du message: Répondre en citant

Ici, il ne s'agit plus de "voir" un stéréogramme, mais simplement de compter les membres de l'équipe. Y en a-t-il 12 ou 13 ? Comptez puis observez, puis recomptez.


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Jean-Marie
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chris



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MessagePosté le: Sa 26 Mai 2007 19:08    Sujet du message: Le cerveau Répondre en citant

Jean Marie ,

à un moment donné il y en a 13 et à un autre moment il y en a 12 Rolling Eyes
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chris



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MessagePosté le: Sa 26 Mai 2007 19:11    Sujet du message: Le cerveau Répondre en citant

Jean Marie , par contre je ne comprends pas comment cela est possible ? Question
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Jean-Marie



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MessagePosté le: Sa 26 Mai 2007 21:28    Sujet du message: Répondre en citant

Moi non plus, je suis toujours en train de chercher.

Par contre, pour les amateurs d'énigme, il y en a d'autres(ici) ou (ici)

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Jean-Marie
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feuille



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MessagePosté le: Di 27 Mai 2007 9:56    Sujet du message: Répondre en citant

Cette énigme ressemble à cette des nains de jardins.
Le principe est d'avoir au moins un personnage qui se retrouve à la limite du découpage (pas du tout coupé) : ainsi, en déplaçant les traits, on peut très bien diminuer ou augmenter le nombre de personnage par cet artifice.

Cette solution est assez bien expliquée sur le même site ici, en remplaçant les nains par des bâtons, on remarque que notre perception change et que l'artifice est identifiable...

En d'autres termes, la séparation créait une illusion...
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