Regards sur l'éveil Regards sur l'éveil
Café philosophique, littéraire et scientifique
 
 liensAccueil   FAQFAQ   RechercherRechercher   Liste des membresListe des membres   GroupesGroupes   Devenir membreDevenir membre 
 ProfilProfil       Log inLog in  Blog Blog 

Etty Hillesum

 
Ce forum est verrouillé, vous ne pouvez pas poster, ni répondre, ni éditer les sujets.   Ce sujet est verrouillé, vous ne pouvez pas éditer les messages ou faire de réponses.    Index du forum -> Lumières sur le chemin
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant  
Auteur Message
Pascal



Inscrit le: 27 Août 2007
Messages: 140
Localisation: Val de Marne (94)

MessagePosté le: Je 06 Sep 2007 21:24    Sujet du message: Etty Hillesum Répondre en citant

Voici un texte écrit par Etty Hillesum en 1943, jeune juive hollandaise, dans la certitude d'une déportation et donc d'une mort probable.
Elle mourut peu de temps après à Auschwitz.

"C'est une expérience de plus en plus forte chez moi ces derniers temps: dans mes actions et mes sensations quotidiennes les plus intimes se glisse un soupçon d'éternité. Je ne suis pas seule à être fatiguée, malade, triste ou angoissée, je le suis à l'unisson de millions d'autres à travers les siècles, tout cela c'est la vie; la vie est belle et pleine de sens dans son absurdité, pour peu que l'on sache y ménager une place pour tout et la porter tout entière en soi dans son unité; alors la vie, d'une manière ou d'une autre, forme un ensemble parfait. Dès qu'on refuse ou veut éliminer certains éléments, dès que l'on suit son bon plaisir et son caprice pour admettre tel ou tel aspect de la vie et en rejeter tel autre, alors la vie devient en effet absurde: dès lors que l'ensemble est perdu, tout devient arbitraire. (...)
Je suis surtout reconnaissance de n'éprouver ni rancoeur ni haine, mais de sentir en moi un grand acquiescement qui est bien autre chose que de la résignation, et une forme de compréhension de notre époque, si étrange que cela puisse paraître! Il faut savoir comprendre cette époque comme on comprend les gens; après tout c'est nous qui faisons l'époque. Elle est ce qu'elle est, à nous de la comprendre en tant que telle, malgré l'effarement que son spectacle nous inspire parfois. (...) Une chose est sûre: on doit tout accepter, être prêt à tout et savoir qu'on ne saurait nous prendre nos retranchements les plus secrets; cette pensée vous donne un grand calme intérieur et l'on se sent à même d'accomplir les démarches pratiques réclamées par les circonstances (...). Là où on est, être présent à cent pour cent. (...). Le grand obstacle, c'est toujours la représentation de non la réalité. La réalité, on la prend en charge avec toute la souffrance, toutes les difficultés qui s'y rattachent - on la prend en charge, on la hisse sur ses épaules, et c'est en la portant que l'on accroît son endurance. Mais la représentation de la souffrance - qui n'est pas la souffrance, car celle-ci est féconde et peut vous rendre la vie précieuse- il faut la briser. Et en brisant ces représentations qui emprisonnent la vie derrière leurs grilles, on libère en soi-même la vie réelle avec toutes ses forces, et l'on devient capable de supporter la souffrance réelle, dans sa propre vie et dans celle de l'humanité.(...) Je ne pense plus en termes de projets ou de risques: advienne que pourra et tout sera bien".


Etty Hillesum, une vie bouleversée, Journal (Seuil)
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé Envoyer l'e-mail
toniov



Inscrit le: 24 Fév 2007
Messages: 647

MessagePosté le: Ve 07 Sep 2007 0:15    Sujet du message: Répondre en citant

Voila une manière de parler de la réalité, de la vie face au pire. Envisager l'existence comme une globalité et se résoudre à tout accueillir quand on ne peut faire autrement. Je possède un recueil de poésies écrites dans les camps de concentration par des anonymes. C'est la meme acceptation ( résigniation ) qui transparait. Bien sur, on peut considérer l'existence comme un tout sans en arriver à ces extrèmes, mais peut etre que les situations exeptionnelles déclenchent comme une " urgence " de tout prendre ou de tout laisser.
Il y a un bouquin à lire la dessus: Les sorciers du ciel, de Christian Bernadac. DEs prètres dans les camps de concentration que les SS appelaient " sorciers du ciel ". Ceratins, face à la souffrance, eurent un comportement héroique.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
Pascal



Inscrit le: 27 Août 2007
Messages: 140
Localisation: Val de Marne (94)

MessagePosté le: Ve 07 Sep 2007 11:57    Sujet du message: Répondre en citant

Ce qui frappe lorsqu'on lit les témoignages de rescapés, c'est la capacité de faire face à la réalité, dans ce qu'elle a de plus crue et terrifiante.
Et ce qui n'entravait pas en effet une certaine solidarité (en tout cas lorsqu'un certain degrè d'horreur n'avait pas été dépassé, et il faut bien faire la nuance morbide entre camp de concentration et camp d'extermination).

Antelme par exemple, dans "l'espèce humaine" explique que l'aboiement d'un chien lui rappelle son "humanité", et l'un des rôles de la musique (qui n'échappait pas à l'intelligence démoniaque des nazis) était de réveiller en eux des émotions ou des souvenirs qu'ils avaient alors du mal à revivre pour continuer à tenir face à cette réalité.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé Envoyer l'e-mail
toniov



Inscrit le: 24 Fév 2007
Messages: 647

MessagePosté le: Ve 07 Sep 2007 13:02    Sujet du message: Répondre en citant

Peut-etre as tu vu le film "le pianiste " de roman Polansky. Cela illustre très bien ce que tu dis sur la musique et les nazis. C'est l'histoire d'un pianiste juif qui échappe à la déportation en se cachant dans le ghetto de Varsovie. Un officier allemand le débusque et lui demande de jouer sur son piano une ballade de Chopin. C'est a cause de cela ( et seulement à cause de cela ) que l'officier ne le dénoncera pas et ira meme jusqu'à le protéger.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
Pascal



Inscrit le: 27 Août 2007
Messages: 140
Localisation: Val de Marne (94)

MessagePosté le: Ve 07 Sep 2007 13:21    Sujet du message: Répondre en citant

Oui mais je me demande souvent si dans les cas (fréquents) où les nazis ont protégé des musiciens (même si dans le film de Polanski l'accent est mis sur l'effet de la musique sur le nazi), cela ne provenait pas le plus souvent d'un conditionnement provenant d'une quasi sacralisation de la musique, et à une identification à leur propre culture qui a vu naître les plus grands génies. Les musiciens de toutes origines (même les "pires") semblaient ainsi rendre hommage à ce qui faisait la grandeur d'une nation qui devait au regard des nazis devenir l'emblème du monde.

Pour le reste, je reste bien sûr persuadé de l'effet libérateur que peut provoquer la musique. Comme cette anecdote sur Lénine ne souhaitant plus écouter une sonate de Beethoven qui adoucissait trop son caractère en des temps de conflits.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé Envoyer l'e-mail
Montrer les messages depuis:   
Ce forum est verrouillé, vous ne pouvez pas poster, ni répondre, ni éditer les sujets.   Ce sujet est verrouillé, vous ne pouvez pas éditer les messages ou faire de réponses.    Index du forum -> Lumières sur le chemin Toutes les heures sont au format GMT + 2 Heures
Page 1 sur 1

 
Sauter vers:  
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous pouvez répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages
Vous ne pouvez pas voter dans les sondages


Powered by php B.B. © 2001, 2002 php B.B. Group
Traduction par : php.B.B-fr.com