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Stephen Jourdain : la face nord de l'Eveil en solitaire
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joaquim
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MessagePosté le: Me 16 Fév 2005 0:01    Sujet du message: Stephen Jourdain : la face nord de l'Eveil en solitaire Répondre en citant

Tiré de: Stephen Jourdain, Nova, in Revue 3ème millénaire, No 5, juin 1987, pp. 16-17 [les phrases entre crochets sont tirées d’une édition revue et augmentée: Nova, Editions Le Pays d’Ici-Haut (chez l’auteur)]

LES “INSTANTS”

Ça ne vous est jamais arrivé, de vous promener dans une rue, et puis tout à coup, ce n’est plus dans une rue que vous êtes, c’est La Rue, tout vous arrive précédé de l’article défini, et se met comme à briller, et un extraordinaire bonheur fondant et bourdonnant est là, avec l’impression qu’il y a des siècles que vous vivez cette seconde, qui durera toujours?

Je regarde le nuage...

Et soudain il se passe cette chose fantastique, et, pour une seconde ou deux, les portes du Paradis s’ouvrent: soudain, la substance du nuage change, il se transmue en un pan d’une matière inconnue, angélique — barbe-à-papa spirituelle? Intériorité faite talc?...; en même temps, l’intervalle entre lui et moi meurt — le nuage devient vivant, s’anime d’une vie immense. Cette vie m’aime; cette vie, avec laquelle mon esprit (où Je est étrangement évident) communique directement, m’aime d’un amour infini et me le dit. Et dans cette voix, oh fabuleux bonheur! Je reconnais la mienne, JE SUIS LE NUAGE.

(...)

(La dernière fois que ça m’est arrivé, c’était avant; dans le métro, à six heures du matin, en rentrant de surboum.)

J’étais réveillé depuis un bon bout de temps, mais l’idée: “je suis réveillé” ne m’était pas, cette fois-là, venue. Et cette veille innocente gardait la spontanéité du rêve, elle courant, courait sans frein, vive et pure, s’incarnant en une cascade de pensées menues (mais était-ce exactement des pensées?), mince et solitaire ruisseau d’or dévalant sans un bruit, gaiement, au coeur des ténèbres.

A un moment, la conscience “je veille” est venue me visiter au fond de cet or, doucement et silencieusement, comme un flocon de neige vous arrive sur la joue; sans rompre le charme, sans que certaines machineries se remettent en marche, sans rien altérer.

Et instantanément, de cette veille qui se redoublait, j’ai glissé dans la clarté incroyablement intense et douce, sans âge, abyssalement centrale d’une perception nouvelle de mon propre fait — saisie miraculeuse, sans fin, de l’essence “moi” par elle-même, conscience, connaissance d’être, existence, ineffable “moi-ité”, merveille.

(Ce pourrait être une description de “l’éveil”. Pourtant, je dois l’affirmer, il ne s’agissait encore que d’un “instant”, d’un état; sans commune mesure ni commune nature avec cet avènement intraduisible: l’usage véritable de la faculté de conscience.)

L’EVEIL

C’était le soir, j’étais dans ma chambre, allongé dans l’obscurité, et je tournais et retournais dans ma tête depuis un long moment, probablement depuis une demi-heure, la petite phrase du Cogito de Descartes: “Je pense, donc je suis”. Il m’avait semblé, dans les jours précédents, entrevoir une prodigieuse vérité dans cette petite phrase, et j’essayais de retrouver cette vérité entrevue dans un éclair. Je réfléchissais depuis très longtemps, en me répétant inlassablement: “je pense, donc je suis”, et en faisant chaque fois le voyage depuis la réalité vivante qui en moi-même correspondait à “je pense” et “je suis” jusqu’à ce que ces mots, pour les charger, dans la petite phrase, de leur vrai sens. En m’efforçant de penser le Cogito avec ma vie. C’était un travail très difficile, j’étais épuisé, le déclic qui m’aurait révélé la signification mystérieuse de la phrase ne se produit pas, mais, à un certain moment, un autre déclic, que je n’attendais pas, a dû jouer. [Un ressort secret qui devait être enfoui dans la conscience humaine depuis la Création, qui attendait son heure et que je viens d’effleurer par hasard.]. Et l’événement s’est produit, avec une soudaineté surnaturelle.

Et tout d’un coup je me suis retrouvé dans un avant, un commencement insoupçonné de moi-même, veillant d’une veille sans limite, me sachant — et me sachant me sachant — et me sachant me sachant me sachant: à l’infini, et m’éprouvant totalement identique à cette veille, cet abîme d’auto-conscience, qui n’était point chose qui m’était donnée, mais au contraire qu’essentiellement je ne subissais pas, faisais moi-même brûler.

[Et puis vlan! Quelque divinité, dans le royaume métaphysique, a tripoté un bouton, je me suis retourné comme un gant, et déjà cette chose insensée était là au milieu de moi, comme un membre vivant à la place d’une prothèse.]

A brûle-pourpoint, je glisse dans une lucidité sans nom, achèvement inouï de l’aurore qu’on nomme conscience de soi. Cette lumière n’est pas un état passivement subi: c’est un acte que désormais je sais accomplir. Elle n’est point non plus, à proprement parler, une expérience que je fais: elle est moi, elle est exactement Steve Jourdain.
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joaquim
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MessagePosté le: Ve 04 Mars 2005 22:27    Sujet du message: Répondre en citant

Il y a un élément qui me trouble dans la description que fait Stephen Jourdain de l'éveil. Lorsqu'il dit: «Et instantanément, de cette veille qui se redoublait, j’ai glissé dans la clarté incroyablement intense et douce, sans âge, abyssalement centrale d’une perception nouvelle de mon propre fait — saisie miraculeuse, sans fin, de l’essence “moi” par elle-même, conscience, connaissance d’être, existence, ineffable “moi-ité”, merveille», je lis dans ces mots le vécu d'un éveil. Et pourtant, il précise aussitôt après: «Ce pourrait être une description de “l’éveil”. Pourtant, je dois l’affirmer, il ne s’agissait encore que d’un “instant”, d’un état; sans commune mesure ni commune nature avec cet avènement intraduisible: l’usage véritable de la faculté de conscience.»

Voilà qui est bien troublant. Que manque-t-il à cet "instant" pour être un "éveil"? Il y a en lui l'expérience rimbaldienne du "Je est un Autre" l'accession à une "connaissance d'être", non seulement en ce qui concerne les objets, mais "de l'essence “moi”".

Pour ma part, je pense qu'il existe bien deux étapes à l'éveil, la première consistant à percevoir avec une acuité totale l'Etre qui s'offre à travers chacune de ses manifestation, recevoir la Présence de l'Etre, et sa propre présence à Lui. Et la deuxième étape, au cours de laquelle le point focal de la conscience, qui, dans l'expérience de la Présence, reçoit celle-ci comme un cadeau, s'anime tout-à-coup, découvre qu'il peut "bouger", et s'élargit à cet instant aux dimensions de l'univers, comme s'il se retournait tel un gant, passant de l'état de point focal virtuel à celui de circonférence englobant tout.

A la première lecture, la description de Jourdain me semblait faire se chevaucher ces deux étapes, dans la mesure où glisser «dans la clarté incroyablement intense et douce, sans âge, abyssalement centrale d’une perception nouvelle de mon propre fait» me semblait s'appliquer à la seconde plutôt qu'à la première étape. Mais je pense que les mots sont trompeurs. Je m'en convaincs à la seconde lecture, en découvrant avec netteté le point décisif qui caractérise pour lui l'éveil: «je me suis retourné comme un gant, et déjà cette chose insensée était là au milieu de moi, comme un membre vivant à la place d’une prothèse.»
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joaquim
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MessagePosté le: Sa 05 Mars 2005 17:05    Sujet du message: Répondre en citant

Voici un autre témoignage de José Leroy, qui fait comme écho à celui de Jourdain.

«Il se produisit alors un événement inattendu et incompréhensible. Je me trouvais à ce moment-là dans le café Beaubourg à Paris, à la fin du mois de février 1992. J’étais assis à une table et attendais mon amie. Tout-à-coup, sans raison apparente, ma perception se modifia. Le café, le décor, les murs, le sol, les tables et les gens furent baignés en un instant dans une transparence et une lumière nouvelle. Les objets m’apparaissaient extrêmement proches et brillants, comme si un voile avait été ôté à ma perception.

J’avais percé quelque chose du monde mais je ne savais pas quoi. Je ne comprenais pas ce qui arrivait et pourtant c’était réellement stupéfiant. Ma perception redevint normale au bout d’une demi-heure et je demandais alors: qu’est-ce qui s’est passé?

Je laissais de côté cet événement que je ne parvenais pas à reproduire ignorant ce qui l’avait fait naître et je me replongeais dans ma quête ininterrompue dans la connaissance de moi-même. Je continuais à lire Maharaj et persévérais à retourner mon attention vers sa source à la recherche de ma véritable identité.

Un samedi après-midi, un événement se produisit dont aucun mot ne peut vraiment rendre compte, Un instant avant je me croyais un individu; un instant après...

J’avais disparu du monde.

En fait, je ne reconnus pas ce qui venait d’arriver. Cela ne correspondait pas à l’idée que je m’étais faite de l’Eveil, ou de la connaissance du Soi. Je m’imaginais avant cet événement un individu éveillé, transformé; or c’est l’individu qui avait disparu du monde. Je n’étais tout simplement plus là. Volatilisé, évaporé! Le monde absolument transfiguré, brillait de mille feux, et se tenait, tout seul, là, sans observateur.»


Un chemin de connaissance de soi, in Revue 3ème Millénaire, No 68, 2003, p. 7

Leroy décrit, comme Jourdain, deux étapes sur le chemin de l’éveil. Tout d’abord une modification de la Présence du monde, la découverte enivrante de la totale Réalité de celui-ci, puis une modification radicale du sujet. Leroy décrit que le sujet disparaît, s’évapore, alors que Jourdain se découvre advenir en tant que sujet. Il écrit d'ailleurs à la suite du texte cité plus haut: «Quand à ce type-là, la chose est manifeste: il commence en cet instant.» Je pense que là aussi, les mots sont trompeurs, ce qui n’est pas étonnant, puisqu’ils sont enfants de la scission du Tout en sujet et objet, et sont donc intrinsèquement impropres à rendre compte du retour à la totalité. Le sujet n’existe plus ou le sujet adevient: c’est la même chose. Jourdain a écrit plus tard ces mots assez percutants: «Pendant mon adolescence, le ciel m’est tombé sur la tête et la terre s’est ouverte sous mes pas. En une fraction de seconde, tous mes appuis, toutes mes bases, tous mes repères ont été volatilisés; l’homme que j’étais, en son double aspect mental et physique, a éclaté comme bulle de savon; et l’Univers, mon vieux compagnon, et le Temps qui nous emportait tous deux sur ses ailes, ont péri de la même manière silencieuse et radicale. Un nouveau moi-même est né instantanément de cet anéantissement. Si incroyable était la splendeur de cet être, si impérieuse la nécessité de l’actionner et de le célébrer, que deux années s’écoulèrent avant que ne me frappe l’étrangeté de mes origines apocalyptiques, que ne m’étonne le paradoxe de la persistance de mon expérience terrestre au sein de sa totale destruction.»


Dernière édition par joaquim le Me 04 Oct 2006 22:20; édité 1 fois
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aksysmundi



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MessagePosté le: Me 01 Juin 2005 23:59    Sujet du message: "une expérience"... Répondre en citant

Elle est le "monde des phénomènes" perçu comme un mouvement perpétuel, où même notre propre corps et nos sensations y apparaissent comme une réalité "fuyante, glissante".

A la question "qui perçoit ?", on ne peut que répondre : c'est perçu !
Par le "sans nom", par la seule réalité qui ne soit pas soumise à ce mouvement perpétuel.

Tout apparaît riche d'une vie inépuisable et illimitée.

Cette conscience pure, LA conscience, est présente depuis toujours. Elle est le témoin neutre d'un présent éternel et complet.

Elle est le centre vacant et imperturbable de la roue, l'"axis mundi".

Cette expérience pure de l'être est l'Expérience. On ne peut s'en vanter car ce qui est "vantable" et "flattable" n'y a pas de réalité absolue. D'ailleurs tout est relatif sauf cette conscience parfaite, impersonnelle.

Elle est la source de "Je", là seul où est possible la paix éternelle.

La paix éternelle n'est réalisable que dans le "Je" . Par contre, dans ce "Je", tout se produit ; tout EST.
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Oniris



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MessagePosté le: Sa 18 Juin 2005 23:38    Sujet du message: Stephen Jourdain : la face nord de l'Eveil en solitaire Répondre en citant

J'ai trouvé une interview filmé de Jourdain ICI je ne connaissais pas le personnage... ni ces écrits.

[edit joaquim] nouveau lien ici : https://www.youtube.com/watch?v=AIAmM32BUy0
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joaquim
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MessagePosté le: Sa 25 Juin 2005 2:01    Sujet du message: Répondre en citant

Merci pour l’info.

J’ai regardé la vidéo avec un grand intérêt, en même temps qu’avec un certain malaise. Jourdain dit des choses tout-à-fait essentielles sur l’éveil. Mais je trouve le personnage assez arrogant. J’admire qu’on puisse durant une heure parler de l’éveil en se racontant simplement, mais je m’étonne en même temps qu’on puisse parler de soi à quelqu’un, sans jamais donner l’impression que ce quelqu’un en face de soi existe. Il s’agit d’un long monologue, où les séquences ne sont entrecoupées que par des lectures de ses textes. Il y a bien quelqu’un en face de lui qui tient le micro, mais jamais il n’apparaît que Jourdain rebondisse sur une question ou une remarque de cette personne. Il n’y a que lui. Avec une impression de mépris pour toute cette humanité qui croupit dans la banalité. Même s’il s’en défend. Certaines de ses déclarations, comme celle-ci, en disent d'ailleurs long: “Il est très probable qu’en Orient, des sages tels que Nisagardatta , Maharshi et [je n’ai pas compris le nom] ont atteint ce que j’ai atteint; il y a un autre homme en Occident qui a atteint cela, c’est Roger Godel”. Point. D'autres phrases, en particulier: “je n’utilise pas le mot «amour» parce qu’il est galvaudé”, me laissent perplexe. Comme s'il lui aurait fallu un autre mot pour se départir du commun. Me laisse aussi perplexe le ton parfaitement monotone de son exposé. Il ne sourit pas, ne plaisante pas, s’écoute parler, et s'il se laisse parfois un peu aller, c'est plutôt à une forme de provocation à la limite de la vulgarité qu'à une quelconque légèreté. Il a connu l’éveil, bon, c’est indéniable, il a touché le fond de l’Etre. Mais je suis encore plus convaincu, en le regardant et en l’écoutant, que ce n’est pas tout que d’avoir découvert l’éveil. C’est essentiel, d’accord, mais ce n’est pas cela qui tisse l’étoffe de la vie. C'est aller à la rencontre de la vie, du monde, de l'autre. Je ne veux pas dire que Jourdain ne l'a pas fait, certainement pas; mais là, dans cette émission, il ne le fait pas. Il reste assis sur ce qu'il a.

Joudain dit: “Il est impossible de retourner dans l’état antérieur; c’est impossible!”. Je ne vois personnellement pas très bien pourquoi cela serait impossible. Bien sûr, il est impossible de gommer le souvenir de l’ouverture à l’Etre une fois que celle-ci s’est produite. Mais on peut parfaitement retomber dans l’obscurcissement de la conscience limitée. Et on risque bien de devoir le faire une fois ou l’autre en se frottant aux exigences de la vie matérielle ou aux difficultés de la vie relationnelle. Jourdain semble avoir eu une chance particulière, celle de ne jamais avoir eu à faire quelque chose qui ne lui plaisait pas, comme il le dit, et celle de jouir d’une personnalité équilibrée, parce qu’il a pu grandir semble-t-il sans blessures intérieures. Ce n’est pas la souffrance qui l’a poussé vers l’éveil, mais la passion de savoir. Or c’est bien souvent la souffrance qui pousse sur le chemin de l’éveil, et une fois celui-ci advenu, les causes qui provoquaient cette souffrance ne disparaissent pas pour autant, qu’elles soient extérieures ou intérieures. Il faut encore et encore se frotter à elles, pour les assouplir et les aplanir, et il n’est alors pas toujours possible de demeurer continuellement dans l’état de sérénité de celui qui est en acte d’éveil. Mais ce n'est pas grave, au contraire, c'est même à cela que sert la vie. A grandir, à incarner la lumière. Et cela ne se fait pas toujours sans douleur. Comme le dit si bien Braque (merci lune): "La peinture, c'est de la douleur qui devient lumière". Je trouve dans ce sens assez salutaire des ouvrages comme celui de Jack Kornfield: “Après l’extase, la lessive”, d’où j’ai extrait ce passage que j’avais cité ailleurs.

Je me rends bien compte qu'il n'est pas très délicat ni très charitable de critiquer un homme que par ailleurs je respecte, mais je n’ai pas pu me retenir. Triste imperfection... Mais j'assume. Et reconnais en même temps que je serais bien incapable de traiter avec une telle limpidité un sujet aussi difficile.
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Mélysange



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MessagePosté le: Sa 25 Juin 2005 5:55    Sujet du message: Répondre en citant

Bon jour en vous,

Il y'a quelques jours lorsque j'ai lu les passages des textes de Jourdain que vous avez communiqué, je n'ai pas réussi à voir le vidéo de l'entrevue. Aujourd'hui, j'ai réussi. Je ne connaissais pas cet homme, donc n'avait aucune image en moi de ce qu'humainement était S. Jourdain.
J'ai reconnu en lui des traits de mon grand-père, qu'on appelait le sage, et en qui l'arrogance, la passion, la révolte, l'émerveillement, le mépris de la sotise humaine se côtoyaient. Il ne fallait jamais être tiède devant lui, car à ses yeux c'était tout simplement être stupide.Pour être honoré de son écoute vraie, il ne fallait pas blablater, dans le sens de ne pas être " présent " aux paroles dites. Il aimait être bousculé, impressionné, chamboulé, par nos expériences de vie, qu'on lui racontait presque quotidiennement. Il était fièr de nous, quand on arrivait à le faire sortir du connu, et des croyances qui réussissaient à se coller à lui dans son humanité, malgré son esprit révolutionaire. Ce qui peut-être influence mon regard sur ce personnage, ayant aimé et gouté pleinement à la présence d'un être cher, lui ressemblant.
Vous avez raison en ce qui concerne l'arrogance qui émane de Jourdain. J'ajoute, qu'il se contredit même souvent dans ses dires, selon le regard que je peux porter en ce moment.
Mais je sais, que l'éveil n'a rien à voir avec l'expression limitée de l'humain. L'état d'éveille et de veille, n'est à mon avis, rien qui ne puisse s'exprimer en dehors de part la présence d'être, à soi, à la Vie à Tout. Si expression nous pouvons faire, elle ne sera jamais précise, car l'éveil tout comme tout ce qui est, est vivant;bouge, change, vit.
L'Éveil n'est pas le résultat ou l'expression d'un être, répondant à l'image d'un idéal humain.
L'éveil n'est-il pas simplement une fenêtre ouverte en soi, à la connaissance intuitive, où tout s'explique, mais que plus, et toujours plus il y a, et que rien ne meurt ni ne naît.

Citation:
Je me rends bien compte qu'il n'est pas très délicat ni très charitable de critiquer un homme que par ailleurs je respecte, mais je n’ai pas pu me retenir. Triste imperfection... Mais j'assume.


Triste imperfection? Pourquoi? Selon ses dire, celui qui acceptte tout sans se révolter, se perd dans la paresse et dans la médiocrité. Je ne puis l'exprimer ainsi, mais sentant l'essence de ce qu'il veut exprimer, c'est aussi ce que je sais.

Citation:
Et reconnais en même temps que je serais bien incapable de traiter avec une telle limpidité un sujet aussi difficile.


Permettez-moi d'en douter. La limpidité avec laquelle vous dites qu'il traite du sujet, n'est que le reflet du vécu, du senti, et du regard que porte S.Jourdain, sur l'éveil. La limpidité tout comme ce qui est, est relatif. Alors peut-être que vous n'osez simplement, être le reflet de votre" je suis" dans ce qu'il vit de l'éveil. Serait-ce cette même sensure que vous avez lu en moi...

Merci du/de votre/de vos partage(s), ils m'aident à exprimer une dimention de ce que je suis.

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lune



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MessagePosté le: Sa 25 Juin 2005 16:40    Sujet du message: Répondre en citant

Cher monsieur Jourdain, vous qui avez reçu le don de « déboulonner toutes les idoles, le don de l’audace, de la révolte », aurez- vous aussi celui de dépasser l’idée (reçue ?) que vous vous faites de la médiocrité de vos semblables, les humains? Peut-être découvrirez-vous que du « bourbier » où ils se débattent émergent aussi des beautés quotidiennes très simples et pourtant essentielles, pour peu qu’un regard très doux les accueille, qu’une main généreuse se tende ? Vous qui ne souhaitez pas employer le mot amour, si souvent « galvaudé »… vous l’utilisez , ce mot amour, pour décrire votre rigueur…qui n’est pourtant qu’une chose, une aptitude…qui pourrait aussi déboucher sur la rencontre avec l’autre ? Ne serait-ce pas cela, le comble de l’audace ? Si chaque homme « est une âme, une essence », comme vous le dites fort justement, partir à la découverte de l’autre doit être, j’imagine, un voyage aussi fascinant et surprenant que de pénétrer dans le « qu’est-ce que moi ? », avec le défi d’un face à face inhérent à toute vraie rencontre en plus…
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joaquim
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MessagePosté le: Lu 27 Juin 2005 1:35    Sujet du message: Répondre en citant

La “polémique” que j’ai déclenchée en disant sans détours ce que j’avais ressenti au visionnement de cette vidéo du grand Jourdain m’a donné bien à réfléchir. Je dis “grand”, car dans son genre, je pense vraiment qu’il est grand. Les critiques que je formulais me semblent néanmoins vraies, et lune l’a précisé de manière encore bien plus percutante que moi. Mais la réaction de Mélysange me touche aussi, car je crois que Jourdain ne mérite pas d’être réduit à ce qu’il donne à voir dans cette vidéo. J’ai donc bien réfléchi — pas inutilement, je crois — car cette polémique m’a obligé à voir plus clairement les différences entre les différentes voies de l’éveil. Jourdain incarne de manière très pure la voie du questionnement intérieur, la voie méditative, ou philosophique, au sens où la philosophie était à l'origine, et l’est aujourd’hui encore partiellement, un chemin d'éveil à travers la pensée. Il est d'ailleurs très illustratif que le motif sur lequel il a concentré toute sa puissance méditative, cette clé qui lui a ouvert la porte arrière de sa conscience, était une phrase philosophique par excellence: “Je pense, donc je suis”.

Pour me faire une idée plus précise du personnage, que je ne connaissais qu'à travers deux de ses ouvrages, j’ai écouté hier des CD de lui que j’avais commandés il y a quelques mois, et que j’avais oubliés dans un coin. Il s'agit d'une causerie qu’il a donnée à Nice en 1995, dans un groupe manifestement restreint de personnes qui n’en étaient pas à leur première rencontre commune. Jourdain y apparaissait beaucoup moins arrogant que dans la vidéo. Il décrivait les découvertes qui accompagnent l’éveil comme un promeneur le fait du paysage qui s’offre à sa vue. Mais il s’agissait là d’un paysage intérieur, qu’il décrivait en des termes philosophiques. La précision de son regard est étonnante. On voit qu’il a passé des décennies, toute sa vie, à chercher à mettre des mots sur ces impalpables événements intérieurs. Mais encore une fois, comme dans la vidéo, bien que d’une manière adoucie, il ne s’agissait nullement d’un échange au sens propre avec ses interlocuteurs, mais d’un enseignement. Jourdain raconte ce qu’il voit, et puisque ce sont les faits et gestes de son “moi” qu’il voit (si bien!), c’est de lui qu’il parle. La découverte, l’audace, la passion, sont toutes occupées à cette quête intérieure du Graal. Ou plutôt, puisqu’il a découvert le Graal depuis longtemps, à décrire le chemin et le château.

Comme le dit très justement lune, Jourdain ne donne nullement l’impression que sa quête implique la découverte de l’autre, il ne semble pas concevoir la rencontre avec l'autre comme une clé qui lui ouvrirait les portes de la conscience pour le conduire derrière le rideau des apparences. Il se trouve déjà derrière le miroir, et à ce titre n’a pas besoin des autres. Et c'est certainement cela qui lui confère son côté suffisant. L’échange avec les autres semble être pour lui un agrément qui embellit sa vie, mais qui n'est pas nécessaire pour qu'elle trouve son sens. Il est résolument dans une voie contemplative, comme ces moines orientaux (et aussi occidentaux) qui se murent dans la solitude pour que rien ne vienne troubler leur dialogue avec Dieu. Cela vous semble à vous, chère lune, impensable, car pour vous, tout est dans l’échange et le don. Si on veut catégoriser la choses - pardonnez les étiquettes -, vous vous éveillez à partir du coeur, et non à partir de la tête. J’ai emprunté pour ma part le même chemin que Jourdain, la voie contemplative, ou méditative, mais les vicissitudes de la vie et les difficultés intérieures ne m’ont pas permis de demeurer dans la sereine possession de ce joyau, comme a pu le faire Jourdain. J’ai dû errer, j’ai perdu le château du Graal, et j’ai dû régler mes problèmes. Je n’en veux pas à la vie, au contraire, car elle m’a amené sur des sentiers dont j’ignorais l’existence, elle m’a obligé à m’avancer sur une voie qui ne m’était pas familière, elle m'a conduit sur la voie du coeur. La réalisation qu'apporte le coeur, même si elle est dans son essence exactement la même que celle de la voie contemplative (puisque c'est l'Etre), prend, si j’ose dire, une plus large part d’humanité avec elle, crée une pulsation vivante dans l’échange que la voie méditative, plus statique, plus centrée sur l’immuable, ne connaît pas. Il vaut peut-être mieux se concentrer sur une seule voix, mais je remercie malgré tout le Ciel de me permettre d’embrasser une si large frange d’humanité. Cette lumière qui m’inonde, même si je ne suis pas pour elle un diamant aussi pur que Jourdain, ni une terre aussi offerte que lune, me permet pourtant de vibrer aux harmoniques de chacuns, et peut-être de les réunir.

Mélysange a écrit:
Alors peut-être que vous n'osez simplement, être le reflet de votre "je suis" dans ce qu'il vit de l'éveil. Serait-ce cette même censure que vous avez lu en moi...

Il est bien vrai que j'ai de la difficulté à oser être moi-même. Ce qui ne semble pas être le cas de Jourdain... Mais ce n'est certainement pas par jalousie que je lui ai adressé ces critiques. Au contraire, cette force-là, qui l'habite (comme elle habitait semble-t-il votre grand-père ), je l'admire ouvertement. Mais cela ne m'empêche pas de voir aussi ce qui lui manque.
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Mélysange



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MessagePosté le: Lu 27 Juin 2005 17:53    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour en vous Joaquim,

Citation:
Mais ce n'est certainement pas par jalousie que je lui ai adressé ces critiques.


Je ne croyais pas avoir écrit quelque chose qui puisse insinuer que la jalousie ait guider vos paroles, vous m'en voyez désolée.

Ce que vous dites sur les deux chemins qui conduisent à l'éveil me touchent, et je crois également qu'on puisse d'un même temps chevaucher ces deux voies, tout au long du chemin qui conduit à l'éveil. Nous ramenant d'une expérience à l'autre, à un ajustement, afin de ne pas trop dépasser les limites du respectable établies en soi.
Je trouve que vous exprimez clairement vos réflexions,ce que j'admire.
Citation:
Mais cela ne m'empêche pas de voir aussi ce qui lui manque.

Quel manque y'a t-il par rapport à ce qu'il est (Jourdain). Les manques que l'on perçoit chez l'autre, ne viennent-ils pas de la vision de notre prorpre perception face à ce que l'on conçoit être comme parfait, face à notre propre "volonté" de devenir. Si pour l'autre tout est là, et que l'Éveil lui/nous permet d'être dans la réalisation de sa/notre vie, où est le manque...?

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Mélysange *!*
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lune



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MessagePosté le: Lu 27 Juin 2005 18:18    Sujet du message: Répondre en citant

Loin de moi l’idée de vouloir réduire Jourdain et son paysage intérieur, que par ailleurs je respecte, à une seule image. Je m’étonne simplement, que, s’il se trouve déjà, comme le dit Joaquim, derrière le miroir et n’a de ce fait pas besoin des autres, il éprouve alors celui de partager son expérience, que ce soit par des écrits, des vidéos ou des conférences. Ce qui me semblerait réducteur serait de ne voir l’accès à l’éveil que d’une manière unilatérale. On peut tracer des voies différentes sur le chemin de l’éveil, mais je crois qu’elles ont de nombreuses interférences, se complétant sans cesse. Et comme je n’aime pas vraiment les étiquettes , je pense qu’on peut s’éveiller à partir de son cœur et de sa tête, sans que l’un exclue forcément l’autre. La voie contemplative, méditative, que Joaquim attribue à l’éveil par la pensée, me semble essentielle pour approfondir la voie du cœur. Pour bien vivre l’échange, le don, on a aussi besoin de ces instants de repli, de réflexion. C’est beau d’offrir, mais encore faut-il savoir quoi offrir, et savoir ajuster son don ou son échange aux besoins de l’autre. Je ne connais rien à la philosophie des moines orientaux, j’ai par contre souvent partagé des instants de vie avec des moines ou des moniales occidentaux. Je n’ai pas ressenti leur solitude comme une manière d’exclure le monde pour dialoguer avec Dieu, mais comme un désir de se défaire des entraves matérielles pour se rapprocher de l’essentiel. Je les ai sentis porteurs, dans leur face à face avec Dieu, de l’humanité entière. On peut croire ou ne pas croire, avec sa tête ou avec son cœur, à un Dieu qui s’est fait homme, par amour pour celui-ci. Mais ce que nous savons avec certitude, c’est que nous sommes tous façonnés de la même terre, et que si notre intelligence nous permet d’y distinguer des composantes différentes, c’est notre intelligence du cœur qui nous pousse à dépasser les limites que Jourdain nomme « médiocrité » pour révéler et mettre en lumière la beauté et le caractère unique de chaque être.
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joaquim
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MessagePosté le: Lu 27 Juin 2005 22:05    Sujet du message: Répondre en citant

Chère Mélysange,

Je ne pense pas que l’acceptation totale et inconditionnelle d’une personne soit incompatible avec la critique. Au contraire, aimerais-je dire. Car pour que l’acceptation soit totale, il faut un engagement total dans l’instant relationnel. Or, s’engager totalement, c’est le faire avec tout ce qu’on est, y compris cette partie éminemment noble de soi-même qui est la capacité de jugement. Il m’est arrivé de faire des critiques à certains membres du forum, alors même qu’il m’eût été plus facile de m’abstenir: l’acceptation de façade que j’aurais montrée en m’abstenant aurait peut-être semblé plus totale, mais elle aurait été moins vraie que l’acceptation de l’autre en osant la critique. La critique, lorsqu’elle est constructive (c’est-à-dire lorsqu’on dit ce que l’on pense sans autre but que de le partager), permet de toucher l’autre bien plus profondément que la simple acceptation. Elle permet même de franchir un pas “critique” dans la relation, celui d’oser entrer vraiment en relation. J'en ai la preuve pour ainsi dire sous les yeux, car bien que je n’aie pas établi avec Jourdain une relation dans la réalité, je me suis pourtant aperçu que les critiques que j’ai formulées à son endroit m’ont permis de m’approcher de lui bien plus que je ne pouvais le faire auparavant; il est devenu bien plus vivant pour moi, j’ai pu accueillir de lui une bien plus grande part que si j’en étais resté à un acquiècement de surface.

Il y a encore un autre élément dont il faut tenir compte dans le cas précis: Jourdain offre de lui une image; tout-à-fait délibérément, il pose devant la caméra, et délivre un message. On ne peut dès lors plus mettre sur le même pied les critiques qu’on adresse à cette image et à ce message, et celles qu’on adresserait à une personne qui ne se serait pas ainsi exposée. Aussitôt que quelqu’un exprime quelque chose et le pose dans le monde, il l’offre tacitement à la critique. Ainsi, lorsque je dis que j’ai perçu aussi ses manques, je me réfère à ce qu’il a déposé devant mes yeux. J’ai en effet observé une certaine discordance entre le contenu de son discours et son attitude, dans la mesure où il parlait de la découverte de ce qui Est, de la présence à l’Etre, sans donner en rien l’impression que la présence de celui à qui il s’adressait, ici-et-maintenant dans l’entretien, celui qui tenait le micro et qui lui faisait face, comptait pour lui ou était même seulement perçue. Je trouve cela quand même assez troublant. Cette impression se trouvait de plus confirmée par le peu de cas qu’il faisait, dans son discours, des pauvres humains qui croupissent dans leur misère intérieure. C’est cela que j’entendais par “manque”. Non pas l’absence de quelque chose qui serait nécessaire pour qu’il soit complet, mais un manque de cohérence. Manquer de cohérence, c’est manquer de fidélité à ce qu’on est, c’est ne pas être aussi totalement “soi” qu’on pourrait l’être. La critique me semble d’ailleurs d’autant plus pertinente que le contenu de son discours traitait justement du fait d’être totalement soi. Dès lors, il est peut-être bien totalement lui-même dans les moments qu'il décrit (sa description elle-même en atteste), il est peut-être aussi totalement lui-même à l'intérieur du discours qu'il nous livre à l'instant, mais il lui “manque” néanmoins le contact vivant avec la réalité relationnelle dans laquelle il baigne au même instant. Notez bien qu'en disant cela, je ne veux certes pas lui jeter la pierre, car qui, sinon un saint (et encore...) est parfaitement cohérent avec lui-même?
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joaquim
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MessagePosté le: Ma 28 Juin 2005 23:12    Sujet du message: Répondre en citant

Je lis à l'instant dans les “Carnets intimes” de Didier Tronchet (mon auteur de BD favori... avec Watterson) ces réflexions à propos de Raymond Calbuth, un de ses anti-héros:

«J’ai parfois entendu parler de Raymond Calbuth comme d’un “beauf”. Un genre de Bidochon. Ça m’a toujours attristé (avec l’immense respect que j’ai pour les Bidochon). Car c’était mal percevoir l’infini dont est porteur le personnage. Comme il y a un infiniment grand (l’espace sidéral) et un infiniment petit (le monde microscopique), je prétends qu’il y a un infiniment moyen. Dont Raymond serait le chantre. Un genre de médiocrité insondable, sans limite, absolue, et qui en devient lumineuse, quasi cosmique.

J’ai toujours eu un faible pour la petitesse, la mesquinerie, la veulerie. Il me semble que ce sont des sentiments dont nous sommes porteurs plus souvent que la grandeur d’âme. Raymond Calbuth, c’est nous tous dans ce que nous avons de plus médiocre. Mais sa façon de le porter bien haut est rédemptrice. Il nous sauve un peu. Il nous anoblit beaucoup. Il restitue à notre quotidien réputé étroit, une parcelle de dignité, un souffle de vie.»

En voici un petit exemple:


Dernière édition par joaquim le Je 30 Juin 2005 20:18; édité 1 fois
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waxou



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MessagePosté le: Me 29 Juin 2005 14:59    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour!
J'ai bien du mal à participer à cette conversation car je n'arrive pas à en comprendre l'intérêt, d'autant plus que je ne connais pas Jourdain. Bien sûr on peut discuter sans qu'il y ait d'intérêt particulier mais je crois qu'ici il y en a un que je ne saisis point.
J'ai trouvé cet homme très intéressant, mais j'ai dû me détacher au moins une trentaine de fois de ce qu'il disait pour ne pas être projeté dans ce malaise que Joaquim a décrit. Bien qu'il dise des choses très intéressantes, on dirait qu'après cet éveil, il ne se soit pas demandé comment celà pouvait transformer sa vie.
Pour ce qui est d'en parler, comme il le dit, ça ne sert à rien, sauf sur un forum tel que celui ci puisque celà permet de constater les différents ressentis, les variantes, les intérprétations, les différentes retranscriptions des mêmes sensations...
Maintenant je ne pourrais expliquer pourquoi, mais je sais que depuis ma compréhension, mon contact avec certains principes, je ne peux qu'essayer de permettre à ces sensations d'être écoutées par ceux qui n'en ont pas encore eu l'occasion. Comme je le disais dans un autre post, il m'arrive d'en apprendre moi même lorsque je répond à des questions venant d'amis curieux. Si j'ai parfois du mal à percevoir dans quelle impasse je butte, il m'est plus facile de le sentir pour un ami, et parfois celà répond à des questions que je n'aurais pas osé me poser, pensant que j'étais au dessus de ces doutes. Je crois réellement que le contact avec l'autre, peut faire reculler les limites des conscience (qui pendant un moment paraissent infinies), et donne une vraie incarnation à l'Eveil.


Pour en revenir à la déception qui a été manifestée dans cette discussion: parfois, j'ai lu des auteurs qui m'ont beaucoup touché dont le Dalaï Lama, et j'ai eu tendance par la suite à boire leur paroles. Je leur offrait une ouverture que je ne réservais qu'à très peu de personnes. Malgré celà, il m'est tout de même arrivé d'être déçu par la suite. Trouvant étrange que l'on puisse souffrir à cause d'une personne qu'on ne connaît pas, j'ai voulu comprendre. Mais lorsque j'analysais ce sentiment, je me rendais compte que je m'étais fait une image des auteurs et que je m'y étais attaché, tout comme il m'est arrivé de m'attacher à des personnages de films ou de romans lorsque j'étais plus jeûne. Ce qui veut dire que cette image, bien qu'émotionnellement riche, est artificielle car n'a aucun lien réel avec la personne représentée.
A l'inverse, lorsqu'on déçoit une personne alors que l'on n'a fait qu'être soi même, avec nos limites personnelles, il arrive qu'une autre personne dont le regard nous est cher se sente déçue. Celà m'a toujours attristé que mes proches puissent souffrir et limiter leur ouverture à cause du fait qu'ils m'aient réduit à une image. Il est si facile de se laisser prendre au piège de conceptualiser un être et de le juger sur la distance qu'il y a entre cette image et lui.
la déception va avec l'attachement-lien et non avec l'Amour. Une personne que nous n'aimons pas pour x raisons ne peut pas nous décevoir car il n'y a pas ce lien.
Ainsi, nous pensons facilement qu'un être éveillé ne dit que des choses vraies, et ne sombrera que très rarement dans l'illusion, et donc nous tolérerons moins ses écarts. D'ailleurs ce qui m'a interpelé, c'est lorsque Jourdain dit qu'il écoute à travers une porte des bribes de discours de son être éveillé qu' il ne comprenait pas toujours, mais qu' il pense mieux comprendre maintenant (avec une certaine idée de prévision). Pourtant je me demande si c'est véritablement le cas, car il semble parfois étonnemment fermé. De même, il parle à un moment de sages qui ont un discours capable de désorienter tous leurs disciples, et je trouve personnellement qu'il en est une bonne illustration.


Ce n'est pas la première fois que l'Eveil est différencié en deux catégories. Lorsque j'ai parlé du Film American Beauty, j'avais déjà remarqué que deux formes d'Eveil avaient été mises en valeur, une qui transcendait l'égo, et une autre ou celui ci était presque mort. Ici, vous avez parlé d'une forme méditative plutot intérieure, et d'une autre qui se déploie sur l'extérieur (qui paraît du reste plus "incarnée").
Je ne pense pas qu'il convienne de différencier ces deux types d'Eveil. L'Eveil n'est qu'un évênement (ou non évenement), qui est à la base de ces deux comportements. On peut choisir d'aller bien plus loin dans la quête de la vérité, ou l'on peut choisir de poursuivre sa vie avec cette nouvelle dimension. Ce que j'ai aimé dans l'histoire du Bouddha (racontée par l'historien José Freches), c'est qu'il découvre la souffrance, mais succombe à la pression familiale. Alors il reste au palais et finit par se marier. Mais lorsque sa femme meurt (évenement dont la réalité est discutée), après s'être morfondu dans l'amertume, au retour d'Ananda, son ami de toujours, il décide de partir à la découverte de la Vérité pour se libérer lui, puis les autres de la souffrance. Il a déjà la compassion, mais il sait que pour libérer les autres, il doit d'abord atteindre l'Eveil. Si on atteint l'Eveil avant de comprendre la réalité de la compassion (ce qui me paraît susceptible de le limiter) on peut rester bloqué dans cette exploration de la vérité sans jamais lui donner d'incarnation.
Malgré celà, il est admis que le Bouddha a beaucoup hésité avant de faire entrer la première femme dans la Sangha. Ce n'est pas parcequ'on est éveillé qu'on se libère de toutes les lois terrestres, de son caractère et de ses réflexes.
Si je peux me permettre d'emmettre un jugement, je pense que Jourdain a un caractère trop vif pour arriver à être en contact continu avec l'amour inconditionnel dont il parle tout à la fin de l'interview. C'est peut être pour celà qu'il n'a pas cherché à développer son contact avec l'autre.

Lorsque j'ai été sujet à un éveil intérieur, j'ai tout de suite réalisé qu'il me serait impossible de continuer à vivre comme si les autres n'étaient pas importants. J'étais en effet, avant celà assez renfermé à force de constater la répétitivité, et la prévisibilité des interactions humaines. Mais après cette réalisation je me suis rendu compte que chacun avait un être eveillé en lui, et que si on s'y prenait bien, on pouvait faire en sorte de le faire emmerger. Cependant, lorsqu'il y avait une discussion philosophique, je refusais d'y participer, voyant la fermeture des débats, et l'absence d'attention collective. Celà ne m'irritait pas car je comprenais la raison de cette surdité générale. Pourtant j'avais peur moi aussi d'en venir à défendre les modélisations que j'aurais pu offrir en étant touché par des rejets égoiques. Comme si la réalité avait besoin d'être défendue contre l'illusion. Comme le dit Jourdain, l'Eveil n'est pas une cause à défendre. J'aurais pu me dire que finalement ces personnes étaient trop obtues, ou aveugles, mais j'ai senti plus de réalité dans le fait de me dire que c'était plutot moi qui manquait de maîtrise et donc de conscience. J' avais parfois peur que l'on me fasse douter de "mon" éveil, et j'ai donc compris que cette peur était due à cette appropriation résiduelle qui finalement, m'exposait aux même risques de réactions défensives que les autres. Une fois cette peur disparue, j'ai décidé d'attendre encore et de consacrer mes méditation à la bienveillance et la compassion car je trouvais que certaines personnes trop perverties arrivaient encore à m'éloigner de ces "sensations".
J'ai à peine commencé à expérimenter le contact avec la "malconscience" collective de ces débats. Je me rends compte que j'ai bien fait d'attendre, car celà me permet d'apprendre, et d'avoir des expériences bien plus riches qu'elles ne l'auraient étées avant. Pour le moment j'y vais en douceur et je remarque une chose étonnante, qui ne m'arrivait jamais jusqu'alors: j'obtiens souvent des longs silences en retour, qui pourraient être assimilables à de l'attention profonde. Aussi, si j'échoue, je n'insiste pas, ce que j'aurais été tenté de faire auparavant.
Grâce au contact avec les autres, j'ai pu répérer de nombreuses illusions personnelles que j'aurais eu du mal à réaliser tout seul.
Lorsque j'écris sur ce forum, je réalise aussi malheureusement que je suis plus à l'aise avec des personnes nageant dans l'illusion qu'avec des personnes éveillées ou proches de l'éveil. Je suis même presque rassuré qu'il n'y ait pas de Jourdain ici Razz .
Au passage, j'ai souvent vu dans des enseignement bouddhiques peu officiels parlant de développement de l'attention, Satî, des conseils comme quoi il fallait éviter d'être en présence de personnes peu attentives, pas uniquement pour l'entrainement, mais aussi pour la pratique, même maîtrisée. J'ai trouvé celà un peu triste. Pourquoi apprendre à nager si c'est pour rester dans une baignoire? Tant de personnes se débattent dans l'océan de la vie, et par peur qu'elles nous entraînent, il ne faudrait pas les approcher?
ps: vraiment désolé pour la longueur, il apparaît que finalement, j'avais beaucoup de choses à dire Rolling Eyes


[edit joaquim] La suite de la discussion ayant dérapé, les messages ont été transféré dans le coin polémique, ICI.
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feuille



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MessagePosté le: Ma 02 Août 2005 16:58    Sujet du message: Répondre en citant

Et jourdain? Confused

Parceque j'ai posé une ptite question à propos de jourdain quand même?

Vous focalisez là! Smile
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