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Changement d'identité
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Jean-Marie



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MessagePosté le: Ve 27 Oct 2006 23:42    Sujet du message: Changement d'identité Répondre en citant

Le basculement me fait pénétrer dans un monde où je me sens mu par la douceur, la tendresse. La joie aussi. La joie la plus grande vient de ce que mon petit moi a enfin ouvert les yeux sur ma présence. Il sait maintenant qu’il est observé. Il ne manifeste plus sa volonté d’être aux commandes. Il lui arrive même parfois de fondre en larmes car il réalise avec quel aveuglement il a mené ma barque pendant 57 ans et, pendant ce temps, j’attendais, sans l’ombre d’un reproche, dans une patience infinie mais avec l’immense espoir d’être aperçu. Et lorsque le moment est arrivé, la joie explose, sans la moindre nuance d’amertume.

Après avoir dilapidé tout son héritage, au bout du rouleau, le fils prodigue veut revenir vers son père et lui dire : « Père, j’ai péché contre le Ciel et envers toi ; je ne mérite plus d’être appelé ton fils, traite-moi comme l’un de tes mercenaires. » … Tandis qu’il était encore loin, son père l’aperçut et fut pris de pitié ; il courut se jeter à son cou et l’embrassa tendrement …Le père dit à ses serviteurs : « Vite, apportez la plus belle robe et l’en revêtez, mettez-lui un anneau au doigt et des chaussures aux pieds. Amenez le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé ! » Lc 15, 11

C’est comme si je vivais cette parabole, d’abord pendant 57 ans dans le chef du fils, ignorant et niant même l’existence du père, puis dans le chef du père.

J’éprouve fortement cette sensation d’avoir changé d’identité. Plusieurs d’entre vous sur le forum vivent le même genre de sensation. Par contre, d’autres peuvent vivre une spiritualité très riche sans rapporter ce déplacement identitaire. Pour reprendre les termes de la parabole, comment être habité par la bonté du père si on se sent vivre dans la peau du fils ? Certains veulent-ils témoigner de leur vécu ?

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Jean-Marie
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Denis



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MessagePosté le: Sa 28 Oct 2006 12:12    Sujet du message: Répondre en citant

Tes paroles sont un réconfort et un encouragement.
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Jean-Marie



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MessagePosté le: Sa 28 Oct 2006 22:15    Sujet du message: Répondre en citant

Je veux bien te croire, Denis, mais tu es peu explicite. Pour qui mes paroles seraient-elles un réconfort et un encouragement ? Elles sont plutôt un questionnement.
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Jean-Marie
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cieletbaie



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MessagePosté le: Di 29 Oct 2006 13:19    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour Jean-Marie

"vivre une spiritualité très riche sans rapporter ce déplacement identitaire"

Il m'est clair, de façon absolument définitive, que tout ce que je peux dire à ce propos n'est que commentaire, évocation, suggestion, mais en aucun cas la description de ce qui est vécu. Alors je vais employer une image très simple, de vraiment tous les jours: j'ai l'impression de ressembler à une passoire à légumes.
Le corps de la passoire a une forme bien définie et parfaitement résistante. De même, je connais bien les modes opératoires de ma personnalité. Ils sont solidement bâtis.
Pourtant,il y a suffisament de trous pour, non pas essorer l'eau en trop, mais au contraire pour laisser entrer les rayons du soleil. Et le soleil n'est pas avare...

(en somme, je suis une passoire à légumes qui fonctionne à l'envers!
Bon, c'est pas génial, mais je ne peux pas m'en empêcher...)


Longtemps j'ai désiré une sorte de dissolution qui m'aurait fait basculer.
Maintenant,Je ne puis plus discerner une frontière qui délimiterait un versant spirituel d'un autre qui, lui, ne serait "que" matériel.

La notion même de séparation me semble même de plus en plus incongrue...

Tu cites les Evangiles, je vais pouvoir le faire à mon tour:

Lorsque, en un instant, sur le lit des urgences, alcool et délirium ont disparu, c'est à moi que la vie a dit:
"lèves-toi et marche"

Le cadeau, la merveille, c'est que cet amour que la vie m'a donné n'est pas resté à l'extérieur,il n'est pas venu faire un petit tour, pour repartir ensuite.
oh non!
Il s'est installé en moi, le bougre. Il me squatte. Il me fait m'aimer.Il me fait rire.
Mes haines et mes colères sont devenues des souvenirs, c'est presque un peu curieux.


Cette transformation a permis à ma fille de pouvoir ressentir enfin l'étendue de ses souffrances à elle.

Ce qui aurait pu être du domaine de la simple thérapie, a été transfiguré par un désir d'amour pour un autre "être humain", dans une relation de totale égalité,non obscurci par l'ambiguité d'une relation parentale.

Je parle d'un désir gratuit, pas pour me faire pardonner,pas pour rattraper quelque chose.

Juste l'envie de ne plus être une occasion de souffrance pour quelqu'un.

Dans l'évidence de la Foi en notre intime réalité, laisser agir ce bien-être, par contagion naturelle.

Lui faire toute confiance.

Avec ce qu'il y a de plus beau et délicat dans nos ressources humaines, suggérer à ma fille que la sortie du malheur intérieur peut prendre les habits de la psychologie,

mais qu'il y a aussi quelque chose de plus vaste, de plus radical.

Remplacer des béquilles usagées par des béquilles toutes neuves, c'est joli cinq minutes, mais se passer de béquilles....


Ma fille a plus parlé en six mois qu'en trente ans.
Une qualité d'être non prévisible s'est invitée.

Le ciel est descendu de son nuage. Il a pris son sourire. Il parle à travers sa voix lorsqu'elle me dit au bout d'une heure de téléphonne: "attends, papa, j'ai pas encore fini...."

Des "illusions" comme ça? repassez-moi donc le plat, j'en reprendrais bien volontiers...


L'ultime ne serait-il donc pas l'englobant total??
Si je ne reconnais pas à travers les petites choses quotidiennes le surgissement de l'ultime, alors je n'ai pas vu grand-chose, et j'ai sérieusement besoin de changer de lunettes!!!!!


Parcequ'il y a de la "grande cuisine", on va mépriser le petit déjeuner du matin?

Ma vie, ma vie toute simple, celle de tous les jours, est belle.

Pas de bascule, pas d'extase ou ce genre de choses.

La libération que j'ai cherchée pendant si longtemps était un rêve, une utopie,
une fuite du monde que je haïssais et dont j'avais très peur.

J'ai envie d'utiliser le mot de "jubilation", pour qualifier la vie.

Michel


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Jean-Marie



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MessagePosté le: Di 29 Oct 2006 23:54    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour Michel,

Merci pour ce témoignage plein de vie.

Tu dis que pour toi, il n’y a …
Citation:
Pas de bascule, pas d'extase ou ce genre de choses. La libération que j'ai cherchée pendant si longtemps était un rêve, une utopie, une fuite du monde que je haïssais et dont j'avais très peur

Or, par ailleurs, tu nous parles d’un bouleversement survenu au sortir d’un delirium :
Citation:
cet amour que la vie m'a donné n'est pas resté à l'extérieur, il n'est pas venu faire un petit tour, pour repartir ensuite. Oh non! Il s'est installé en moi, le bougre. Il me squatte. Il me fait m'aimer.Il me fait rire. Mes haines et mes colères sont devenues des souvenirs, c'est presque un peu curieux

Un tel changement, qu’est-ce qui te retient de l’appeler un « basculement » ou un « éveil ». N’es-tu pas profondément différent après qu’avant ? Ne serait-ce pas parce que tu ne reconnais pas dans ce changement la représentation mentale que tu te faisais de l’éveil » ?

Le basculement dont je parle dans ma propre expérience (ici) peut facilement s’adapter à l’image que tu donnes : celle d’une
Citation:
passoire à légumes qui fonctionne à l'envers

La forme de la passoire, tu l’associes très justement à ta personnalité :
Citation:
Le corps de la passoire a une forme bien définie et parfaitement résistante. De même, je connais bien les modes opératoires de ma personnalité. Ils sont solidement bâtis

Par contre, par les nombreux trous pénètrent des rayons de soleil. Ces rayons ne proviennent pas de la passoire. La personnalité, le petit moi, n’y est pour rien dans leur apparition.

Avant ton expérience, c’est la passoire sans trou qui était ton univers, qui dirigeait ton existence. Après, ce sont les rayons du soleil qui traversent la passoire et prennent la relève. La passoire elle-même a perdu les commandes, bien qu’elle continue encore à moduler les rayons. Il y a eu « passation de pouvoir »

Notre personnalité, c’est pour moi l’image que notre cortex cérébral se fait de nous-même. Cette image se met en place dans les premières années de la vie mais elle continue à se modeler jusqu’à la mort. Là où cela devient intéressant, c’est quand cette image commence à laisser passer des rayons qui ne sont pas produits comme la personnalité par des interactions avec le milieu. Autrement dit, la personne qui commence à percevoir ces rayons sent très bien qu’elle n’est pas à l’origine de ces rayons. D’ailleurs, ces rayons poussent à un comportement qui est souvent bien différent de celui de la personnalité. Ces rayons ne portent aucune des « blessures » de la personnalité. De plus, lorsqu’on les écoute ou qu’on leur permet de s’exprimer, toute notre personne se pacifie. Tu remarques toi-même ceci :
Citation:
Mes haines et mes colères sont devenues des souvenirs
C’est pour moi un signe important que notre personnalité n’est pas notre vraie nature, ce n’en est qu’une représentation mentale. Notre vraie nature, celle qui nous pacifie lorsque nous l’écoutons, c’est celle qui pénètre par les trous de la passoire, celle qu’on ne peut définir sous peine d’en reformer une représentation mentale.

Est-ce que tout cela trouve un écho en toi, ou bien tu as l’impression que cela reste justement des constructions mentales ?

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Jean-Marie
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cieletbaie



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MessagePosté le: Lu 30 Oct 2006 20:21    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour Jean-Marie

"Un tel changement, qu’est-ce qui te retient de l’appeler un bascule-
ment » ou un « éveil ». N’es-tu pas profondément différent après qu’avant ? Ne serait-ce pas parce que tu ne reconnais pas dans ce changement la
représentation mentale que tu te faisais de l’éveil » "

Oui, tu as raison, il n'y a pas de rapport entre ce que je suis et ce que je pouvais imaginer.

Mais le malaise vient plutôt de la position dans laquelle je me situe quand je parle.
Etrangement, je me sens collé à cette personnalité humaine, j'y adhère totalement.
Et EN MEME TEMPS, je n'ai rien à voir avec tout ça.
Dire que j'ai "basculé" laisserait supposer que j'étais vraiment cette personnalité, et que je l'ai laissé tomber.
Dire celà, ce serait donner une réalité à une soi-disante personnalité qui aurait réellement existé.
Or, ce qui me surprend, c'est au contraire d'avoir laisser durer si longtemps la croyance en la réalité de cette personnalité, comme si elle avait été un bloc monolithique, existant de par lui-même, indestructible.

Ce que je ressens, ce n'est pas d'avoir changé.

C'est, au contraire, "avant", que j'avais changé, par rapport à ce que je suis.

Il serait peut-être plus adéquat de dire que des pans entiers se sont effondrés en un instant, démontrant en même
temps la futilité de ce qui reste.

Parcequ'il reste des choses.

Et ces choses, elles sont très bien comme elles sont.
Désirer autre chose que la vie de tous jours, ce serait imaginer que des circonstances différentes me donneraient plus de présence, ou que je serais "mieux" ou "plus". Alors que c'est le contraire! c'est parceque je suis là, que les choses ont du goût.

Cela n'exclut pas la nécessité de vigilance.

La personnalité veut s'emparer de la lumière, en faire une "chose". Et c'est la chute instantannée.
Je suis définitivement non représentable

On ne peut pas figer un geste.
Ce qu'on peut fixer, c'est une position dans l'espace
Le geste, lui, est indisociable du mouvement, du déplacement, de la fluidité.
Me définir serait comme prendre une image photographique.
Une définition, un instantanné, c'est une fine lamelle découpée que l'on peut mettre sous un microscope.
Ca n'a plus rien à voir avec la globalité de l'organisme vivant sur lequel on la prélevé.

Me définir, ce serait me figer, me réduire à une fine tranche de jambon emballée sous vide...

"Ces rayons ne portent aucune des « blessures » de la personnalité. De plus, lorsqu’on les écoute ou qu’on leur permet de s’exprimer, toute notre personne se pacifie"
Oui, ce dont tu témoignes est vrai. Et ce soleil me semble même agir de façon rétro-active.

Lorsque dans le passé j'étais en plein dans mes souffrances, eh bien même en l'ayant oublié, déjà j'étais là.

En prendre conscience boulverse radicalement ce qui s'est passé.

Il ne m'est plus possible maintenant de parler de ce qui s'est passé de la même façon

Curieusement, il me semble être devant une possibilité de choix.

Je sais que là, il s'agit d'un vrai choix, avec deux embranchements de vie radicalement différents.

Ce choix, c'est: Aujourd'hui, maintenant, qu'est ce que je veux?
-Est-ce-que je veux me cramponner au souvenir d'un enfant seul et maltraité?
Alors, c'est que maintenant je veux encore et malgré tout être cet enfant seul et maltraité.
Alors, c'est que maintenant je veux encore et malgré tout me définir à travers cette image.

-Ou, est-ce-que je laisse tomber tout ça?

----------------------------------------

"-oui, mais pourtant, ces choses vous sont quand-même bien arrivées ????"
Mais de quoi me parlez-vous? J'ai un festin de roi devant moi, et vous me proposez une boite de conserve (et en plus, vu sa date de fabrique, elle doit être franchement avariée...)


----------------------------------------

Là je bute sur les limites du langage. Je ressens viscéralement que celà a existé, et en même temps n'a pas existé.

La contradiction ne me dérange pas du tout.


Tant que je me suis réduit à une histoire chronologique limitée, entièrement définie par la survenue d'évènements, il était logique d'utiliser les outils humains: psychologie,modification des schémas de comportements etc...
Il est clair que ce mode d'agir maintient et renforce l'histoire!


contempler de l'extérieur ce que j'appelais mon histoire, c'est voir un ballon qui éclate et devient tout flasque...
et pourtant, une forme d'histoire continue


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Jean-Marie



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MessagePosté le: Ma 31 Oct 2006 0:04    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour Michel,
Michel a écrit:
ce qui me surprend, c'est au contraire d'avoir laisser durer si longtemps la croyance en la réalité de cette personnalité, comme si elle avait été un bloc monolithique, existant de par lui-même, indestructible

Tu sais, jusqu’à 57 ans, j’ai eu la même sensation que toi. Jamais je n’aurais remis en question cette personnalité. C’était moi. Point final.

Et dans un certain sens, on n’a pas tord. Pense un peu. A notre naissance, nous n’avions aucune idée, aucune représentation mentale, ni de notre personne, ni des éléments du monde extérieur. C’est au fil des contacts avec notre corps et avec notre environnement que nous commençons à mettre en place dans notre cerveau les rudiments des images mentales qui représentent notre personne et le monde extérieur. Ces ébauches d’images sont aussi l’ébauche de notre conscience, du moins de la conscience de ce que nous sommes. Avec le temps et les expériences, ces images vont s’étoffer. L’image de notre personne va être littéralement pétrie par les autres, par la culture, par nos acquis. Par exemple, si mes parents me parlent le français, je vais intégrer cela à ma personnalité et je dirai que je suis francophone. La conscience que j’ai de moi, c’est cette image que je me suis constituée (à mon insu !) dans mon cortex cérébral. Cette image porte en elle toutes les traces de ce qui m’est arrivé depuis la naissance. Peut-être même depuis la conception. Notre histoire étant unique, cette image est évidemment unique, comme l’est notre personnalité.

Malgré toute la puissance avec laquelle s’impose cette personnalité, est-elle représentative de notre personne ? Elle est représentative de notre histoire, pas de notre personne, pas de notre être. Le bébé qui vient au monde n’a pas encore d’histoire. Il n’a pas encore de personnalité. Est-ce à dire qu’il n’est pas un être ? Si un bébé est transplanté dans un autre environnement culturel, il développera une autre personnalité. Est-ce à dire qu’on a remplacé son être de départ par un autre ? Si quelqu’un souffre de démence ou entre dans le coma, sa personnalité s’efface, de même que sa conscience. Est-ce à dire qu’il n’est plus un être ?

Pour moi, il est clair que, puisque notre personnalité varie avec ce qui nous est arrivé dans la vie, elle ne fait pas partie de notre fondement, de notre essence, de notre nature mais se comporte comme des couches de vêtements que nous portons en surface. Par contre, comme notre conscience prend naissance avec la constitution de cette personnalité, il est normal que cette personnalité constitue son seul et unique horizon… jusqu’à ce que des éléments extérieurs à cette personnalité fassent irruption. Je suppose que tu as reconnu ici tes rayons de soleil.

Comment la conscience parvient-elle à se détacher de ce avec quoi elle avait pris naissance, je n’en sais rien, mais je suis bien obligé de constater qu’elle est capable de percevoir qu’il y a une autre réalité qui dépasse notre personnalité et notre conscience elle-même.

Un peu comme si, en s’ouvrant, la fleur d’un arbre développait une conscience. Elle dirait : « comme je suis fraîche et belle ». Voyant une fleur voisine en train de se faner, elle serait prise d’angoisse à l’idée de disparaître. Mais brusquement, elle aurait remarqué qu’elle n’était pas seulement une fleur mais plutôt que sa conscience avait pris naissance à l’extrémité d’une branche, qu’en fait elle était cette branche qui porte chaque année de multiples fleurs. A un moment, la branche voit s’approcher le jardinier avec une tronçonneuse. En panique, elle prend néanmoins conscience qu’elle est l’arbre dont la branche n’est qu’une ramification. Mais l’arbre était vieux et proche de sa fin. Par bonheur, sa conscience fit un saut supplémentaire et réalisa qu’il n’était autre que le règne végétal qui colonise la terre et la mer depuis si longtemps.

Lorsque la conscience saute au niveau supérieur, l’ancien niveau devient … une vieille boîte de conserve avariée :
Citation:
"-oui, mais pourtant, ces choses vous sont quand-même bien arrivées ????"
Mais de quoi me parlez-vous? J'ai un festin de roi devant moi, et vous me proposez une boite de conserve (et en plus, vu sa date de fabrique, elle doit être franchement avariée...)


:bravo: :bravo: :bravo: J’adore cet humour !

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Jean-Marie
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Jean-Marie



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MessagePosté le: Ma 31 Oct 2006 15:44    Sujet du message: Répondre en citant

Je m'absente jusque vendredi. A bientôt.
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Jean-Marie
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cieletbaie



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MessagePosté le: Me 01 Nov 2006 5:15    Sujet du message: Re: Changement d'identité Répondre en citant

Jean-Marie a écrit:
Le basculement me fait pénétrer dans un monde où je me sens mu par la douceur, la tendresse. La joie aussi.



OUI

Et la bienveillance du regard nettoie, lave, répare

Ce mot "bienveillance" est un trésor.


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cieletbaie



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MessagePosté le: Me 01 Nov 2006 11:26    Sujet du message: Re: Changement d'identité Répondre en citant

cieletbaie a écrit:


Et la bienveillance du regard nettoie, lave, répare

.


Cette expression est ambigue, car s'il y a consolation, celà induit qu'il y avait bien quelque chose ou quelqu'un à consoler.

Il y a bien consolation, mais il y a en même temps fusion, ou réintégration de ce qui se croyait autonome dans la seule et unique matière primitive, qui a aucun moment, quoiqu'il se passe, ne peut cesser d'être ce qu'elle est


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feuille



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MessagePosté le: Je 02 Nov 2006 10:37    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour Jean-Marie et bienvenue, Smile

Jean-Marie a écrit:
Pour moi, il est clair que, puisque notre personnalité varie avec ce qui nous est arrivé dans la vie, elle ne fait pas partie de notre fondement, de notre essence, de notre nature mais se comporte comme des couches de vêtements que nous portons en surface

J’aimerais nuancer la notion de personnalité. Il faut aussi être vigilant à ne pas réduire la surface à une futilité pour affirmer l’unique authenticité de la profondeur… je comprends tout à fait le point que vous voulez souligner, dans un autre sens, sur ce qui ne constitue pas la personnalité, mais la personnalité, à mon sens, est l’expression d’une diversité, et pas nécessairement l’expression d’une identification… et si c’est l’expression d’une identification, c’est l’identification de l’Indicible à ce que je suis. Je crois en une personnalité inviolable propre à chacun : un Bouddha n’a pas eu le même discours de surface qu’un Jésus, ils n’ont pas utilisé les mêmes mots… vous-même – et moi-même – nous nous exprimons constamment avec une relation propre à une palette de couleur que nous avons constitué tout au long de notre vie. Il serait tout à fait triste pour l’Etre Aimé que nous laissions une page blanche uniquement parce que c’est l’idée que nous nous faisons de notre Essence… vous avez la possibilité de choisir toute la beauté d’un bleu particulier et moi de choisir une tout autre couleur, et cette dévotion dans la surface en sera d’autant plus belle pour notre profondeur.

Jean-Marie a écrit:
comment être habité par la bonté du père si on se sent vivre dans la peau du fils ? Certains veulent-ils témoigner de leur vécu ?

Au sujet du changement de d’identité, si je pense occuper la place du père, je suis encore le fils, c’est une boucle sans fin. C’est la transparence qui nous révèle, nous renverse… et le basculement du point de vue qui vient après, une fois l’évènement passé, n’est en rien celui qui doit nous fondre, il devient aussi celui dont on doit se détacher, et la boucle revient. Est-ce que le fait de remplacer basculement par transparence (ou passoire ), ne va pas nous entraîner dans une autre boucle… sûrement, aie !… Peut-il y avoir une réponse extérieure à votre question ?

Jean-Marie a écrit:
Le basculement me fait pénétrer dans un monde où je me sens mu par la douceur, la tendresse. La joie aussi. La joie la plus grande vient de ce que mon petit moi a enfin ouvert les yeux sur ma présence.

Oui, et il y a aussi cette fragilité renversante au plus profond de nous, qui peut parfois nous amener à être mû et mué par la douleur… en lisant Maurice Zundel (merci à Joaquim de m’avoir fait découvrir cette singularité !), j’ai retrouvé ces paroles touchantes :

L’Amour de Dieu prend la couleur de tous les états de l’être créé. Il peut donc y avoir en Dieu une douleur, il y a en Dieu une douleur autant qu’il y a un amour, non pas une douleur qui Le défait ou Le prive de quelque chose, mais cette douleur d’identification avec l’être aimé, une douleur telle qu’il faut dire que tout ce qui atteint l’âme de l’homme, que ce soit l’agonie, la souffrance, la maladie, la misère, la solitude, le désespoir ou le péché, tout cela, Dieu le porte pour nous, en nous, avant nous, plus que nous, comme une mère peut être frappée, par tous les états de son fils parce qu’elle s’identifie totalement à lui.
Il serait inconcevable que nous croyons à l’amour de Dieu pour nous, que nous croyions qu’il est vraiment Celui qui veut notre bonheur et notre joie sans que nous croyions aussi qu’Il est le grand compatissant et le premier frappé par tout ce qui peut nous atteindre.
C’est pourquoi j’enrage quand j’entends dire : « Dieu permet le mal ! » Mais non ! Dieu ne permet jamais le mal, Il en souffre, Il en meurt, Il en est le premier frappé et, s’il y a un mal, c’est parce que Dieu en est d’abord la victime.
Maurice Zundel. 1964 (Un autre regard sur l’homme. Editions du jubile. p169)
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Jean-Marie



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MessagePosté le: Sa 04 Nov 2006 19:31    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour Michel

Michel a écrit:
il y a en même temps fusion, ou réintégration de ce qui se croyait autonome dans la seule et unique matière primitive

Cette phrase m’apparaît comme une excellente synthèse de nos deux vécus.

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Jean-Marie



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MessagePosté le: Sa 04 Nov 2006 19:34    Sujet du message: Répondre en citant

Bonjour feuille et merci de votre accueil.

Merci de rectifier le tir en ce qui concerne la personnalité. C’est vrai que j’ai insisté lourdement sur notre volet « essence » en niant quasi complètement notre volet « existence ». Peut-être pour faire contrepoids au fait que notre conscience commence presque toujours par apercevoir ce volet « existence » et meurt souvent avant de voir l’autre.

S’il y a bien un volet « essence », tout ce qui existe est une manifestation, ou est « in-formé » par cette essence. A ce titre, mon cortex cérébral est « in-formé ». L’essence, par le truchement des chromosomes et des gènes, fournit le contenant, le réseau neuronal. Mais ce qui va surtout faire le caractère unique de la personnalité, c’est la rencontre entre ce réseau neuronal vierge et les innombrables perceptions provenant des organes des sens. Cela va déterminer des trajets privilégiés au sein du réseau, alors que d’autres voies ne seront jamais empruntées, comme si elles n’existaient pas. L’ensemble des voies neuronales empruntées et délaissées fait le caractère unique de notre mental. Le regroupement de certaines voies de préférence correspond aux caractères culturels d’une population. Y a-t-il des valeurs transcendantes là-dedans ? Tant que cette personnalité ne devient pas transparente à l’essence, elle ne perçoit qu’elle-même, elle ne pense qu’à se maintenir et est prête à défendre chèrement sa peau. De même, les populations sont prêtes à faire la guerre pour protéger leurs spécificités.

Paradoxalement, la personnalité ne devient richesse qu’en devenant passoire, lorsque, s’adressant à l’essence, elle dit : « Père, que ta volonté soit faite et non la mienne »

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MessagePosté le: Lu 06 Nov 2006 10:18    Sujet du message: Répondre en citant

Maurice Zundel a écrit:
Il serait inconcevable que nous croyons à l’amour de Dieu pour nous, que nous croyions qu’il est vraiment Celui qui veut notre bonheur et notre joie sans que nous croyions aussi qu’Il est le grand compatissant et le premier frappé par tout ce qui peut nous atteindre.
C’est pourquoi j’enrage quand j’entends dire : « Dieu permet le mal ! » Mais non ! Dieu ne permet jamais le mal, Il en souffre, Il en meurt, Il en est le premier frappé et, s’il y a un mal, c’est parce que Dieu en est d’abord la victime.

Je crois que je ressens intimement ce que Zundel écrit de Dieu. Mais il en parle comme d'un personnage extérieur, qui "aime", qui "veut", qui "souffre", qui "meurt", qui "est victime". On pourrait presque dire qu'il a un cerveau, comme nous. C'est ce personnage dont les athées nient l'existence.

Le vocable "Dieu" étant trop souvent associé à ce personnage, je préfère m'abstenir de l'utiliser car il s'agit pour moi d'un concept mental qui, inévitablement, se dresse contre les concepts mentaux opposés.

Par contre, je ne peux m'empêcher de constater que, dès que je quitte mon fonctionnement cérébral, dès que je lâche prise, dès que j'abandonne ma "personnalité ordinaire", il s'installe en moi une "autre personnalité" (que je n'ai pas moi-même contribué à construire) qui s'exprime par une relation "d'amour" avec toute chose et tout être, qui souffre aussi, mais dont toutes les douleurs se résument toujours à une seule : celle de se voir "cloué le bec", abandonné, par une "personnalité ordinaire" (la mienne ou celle de quelqu'un d'autre) qui reprend son autonomie et perd le contact. Cette douleur ne s'accompagne cependant jamais d'un sentiment d'amertume. En attendant que la "personnalité ordinaire" s'efface à nouveau, ce n'est que patience et bienveillance et lorsque cela se reproduit, c'est la joie.

Lorsque les concepts tombent, y a-t-il encore quelque chose qui différencie les croyants des athées ?

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Jean-Marie
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joaquim
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MessagePosté le: Je 09 Nov 2006 0:08    Sujet du message: Répondre en citant

Des échanges vraiment passionnants. Merci à vous trois. Smile

Changement d'identité... Déboucher sur ce moi qui attendait, sans l'ombre d'un reproche, comme tu le dis si bien, Jean-Marie, que l'autre, celui que je crois être, parvienne à faire taire le brouhaha du mental, puis à écouter ce silence, sans rien en attendre d'autre que ce qu'il est, et là, qu'il bascule, pour ressurgir métamorphosé du sein même de ce silence, se découvrant être ce silence.

Lorsque j'ai été inondé pour la première fois par l'émerveillement de cette découverte, je ne pouvais pas imaginer un jour retomber dans la prison du petit moi. J'avais basculé, et rien ne me semblait capable de me faire basculer dans l'autre sens — évidemment, puisque le point d’appui sur lequel je m’ancrais désormais était l’être même. Mais je sentais bien en même temps que si “je” était radicalement transformé par ce basculement, ma personnalité, elle, n’était en rien modifiée. Pire, à partir du point où je me trouvais, je n’avais plus la possibilité d’agir sur elle. J’étais protégé de ses égarements, certes, mais je ne pouvais plus rien pour elle, moins encore qu’avant. Et comme elle était malheureusement bien mal construite, je me trouvais devant le dilemme: vivre la tête dans le ciel sans me préoccuper de mon support matériel et affectif, ou me frotter à la vie incarnée, au risque de rechuter. C’est la deuxième voie que j’empruntai. Certains, qui ont connu l’éveil en disposant d’une personnalité équilibrée, comme ce fut me semble-t-il le cas de Jourdain, n’ont pas eu ce travail à faire, ni ce risque à prendre. D’autres, comme toi peut-être, Jean-Marie, qui sont arrivés à l’éveil au bout de toute une vie (ou presque Wink), n’ont pas non plus la nécessité d’entreprendre un tel travail. Pour ma part, il m’a fallu plonger les mains dans la terre, il m’a fallu la cultiver, apprendre à l’aimer, il m’a fallu faire ce qu’on appelle la lessive. Et du moment qu’on a commencé, ce n’est jamais fini. Il m’a fallu apprendre à faire respirer cette terre, à la faire s’ouvrir au soleil de l’éveil, et la laisser s’endormir aussi parfois dans sa torpeur. Et ce qui m’a toujours le plus étonné, et le plus réconforté en même temps, c’est que dans son sommeil, et seulement là, mûrissaient les fruits que je pouvais cueillir lorsque je m’éveillais à nouveau. Aujourd’hui, ces deux temps sont toujours présents. Je crois que du moment qu’on accepte la terre, qu’on essaie d’en accueillir autant d’épaisseur qu’on est capable (et on est capable d’en accueillir à chaque fois un peu plus), on doit aussi accepter de se perdre en elle, on doit faire confiance qu’on trouvera, au fond de cet abandon même, le basculement qui nous retournera vers la lumière.

J'aime beaucoup ton image de la passoire, cieletbaie. Comme tu dis: "L'ultime ne serait-il donc pas l'englobant total??" Donc pas seulement la lumière à travers les trous, mais la passoire aussi. Et si l'on ne se heurte pas à la passoire, mais qu'on l'accepte, et toute notre indignité avec elle, on voit, à travers elle, la lumière dont tout est fait — elle comprise.
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