Regards sur l'éveil Regards sur l'éveil
Café philosophique, littéraire et scientifique
 
 liensAccueil   FAQFAQ   RechercherRechercher   Liste des membresListe des membres   GroupesGroupes   Devenir membreDevenir membre 
 ProfilProfil       Log inLog in  Blog Blog 

Littérature pour enfants : Je t'aimerais toujours (D.GLIORI)
Aller à la page Précédente  1, 2, 3, 4, 5, 6, 7  Suivante
 
Ce forum est verrouillé, vous ne pouvez pas poster, ni répondre, ni éditer les sujets.   Ce sujet est verrouillé, vous ne pouvez pas éditer les messages ou faire de réponses.    Index du forum -> Littérature
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant  
Auteur Message
joaquim
Administrateur


Inscrit le: 06 Août 2004
Messages: 1421
Localisation: Suisse

MessagePosté le: Me 11 Juil 2007 1:21    Sujet du message: Répondre en citant

daniel a écrit:
actuellement, pour répondre, à joaquim, je n'ai pas l'impression que ce monde, cet univers, soit "mon monde", mais j'en fait partie ... il est "extérieur" à moi, et il est plus que moi, il me dépasse ... l'univers est régi par des lois physiques qui lui sont propres, et ce sont ces mêmes lois qui régissent mon corps (dans son entièreté, aussi bien sur le plan physique, que sur le plan cérébral) ... ces lois feront, et font, que les choses se font et se défont ... c'est régi par elles qu'un jour, moi, ce corps, disparaîtrai, ... quand les conditions ne seront plus réunies pour que ce corps puisse perdurer ...
pour moi, pour l'instant, là, est la réalité de mon apparition et de ma disparition (le jour venu) ...


Qui a construit ces phrases et ces idées, que tu développes là? — Toi. Que connais-tu du monde, en dehors de ces phrases et de ces idées (et de toutes celles que tu pourrais, toi, construire et développer)? — Rien. Ne vois-tu donc pas que ce que tu nommes le monde, c’est ton monde, celui que toi (ta pensée) construit (pour toi)? Wink
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé Envoyer l'e-mail Visiter le site web du posteur
daniel



Inscrit le: 15 Fév 2006
Messages: 461
Localisation: belgique

MessagePosté le: Me 11 Juil 2007 3:22    Sujet du message: Répondre en citant

j'avoue que formuler ainsi, cette fois-ci, ce que tu dis là, a toute sa pertinence ! :bravo:
effectivement, je me retrouve dans le fait, que c'est "moi", ma pensée qui construit mon monde, pour moi ... (dont toutes les notions, les idées, les mots ont été apprisES, il n'y a rien d'inée là-dedans !) il faut avoir une certaine audace, c'est comme un verrou qui saute, pour pouvoir s'y rendre, à l'évidence ... merci joaquim :sayonara:

namaste :fleur:
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
Denis



Inscrit le: 24 Jan 2006
Messages: 68
Localisation: Nancy

MessagePosté le: Me 11 Juil 2007 8:51    Sujet du message: Répondre en citant

Joaquim, si un jour tu écris un livre, j'en achèterai plein pour offrir autour de moi!
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
Plume



Inscrit le: 30 Oct 2005
Messages: 105
Localisation: Région Parisienne

MessagePosté le: Me 11 Juil 2007 10:58    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Qui a construit ces phrases et ces idées, que tu développes là? — Toi. Que connais-tu du monde, en dehors de ces phrases et de ces idées (et de toutes celles que tu pourrais, toi, construire et développer)? — Rien. Ne vois-tu donc pas que ce que tu nommes le monde, c’est ton monde, celui que toi (ta pensée) construit (pour toi)?


Le tout est de trouver le juste milieu entre ce monde que je fabrique, et cet autre monde, qui me fabrique. Ne pas tomber dans les extrèmes, et faire preuve de modération: pas de pur sollipsisme, ni d'ouverture inconditionnelle et permanente. Peut-être que le moi ne construit pas le monde, mais le reflète intérieurement, en reproduisant les grandes lignes et croyant, de ce fait, le produire. Ni pure reception, ni pure émanation, à mon sens... mais il y a bien ce moi au centre de son monde, je suis d'accord.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
joaquim
Administrateur


Inscrit le: 06 Août 2004
Messages: 1421
Localisation: Suisse

MessagePosté le: Me 11 Juil 2007 13:23    Sujet du message: Répondre en citant

En fait, ce dont il s’agit, c’est de cesser de prendre les pensées qui se déversent en soi pour un simple donné; il s’agit de se mettre en face d’elles, et de les interroger quant à leur provenance. D’où viennent les pensées que je (mais est-ce bien moi?) construis, et qui, réciproquement, me construisent (car n'est-ce pas en elles que je me saisis en tant que "moi"?)? Il ne s’agit pas de dégager une vérité définitive, mais de pousser un peu plus loin cette interrogation: “qui suis-je?”. Il s'agit de se mettre soi-même en mouvement, de devenir sujet de sa propre étude. Suis-je un produit de mes propres pensées, ou bien en suis-je la source? La réponse à ce dilemme ne se trouve assurément pas dans la pensée, à moins qu’on suppose, à l’encontre de toute logique, qu’une pensée produite puisse saisir son propre surgissement, autrement dit que la conséquence puisse être présente en acte dans sa propre potentialité. Cela ne saurait être pour rien de ce qui est représentable, et pourtant, cela est bien ainsi pour moi: si je pousse ce questionnement jusqu’à son point ultime, je me découvre, au-delà du pensable, être ma propre cause.

Sancho a écrit un très joli article sur l’intensité de cette interrogation qu’a menée Descartes dans son Discours de la Méthode. Il montre bien que Descartes n’avance pas des assertions, mais mène une enquête autour de l’énigme que “je” suis. Par son fameux cogito, Descartes en arrive au point où nous en sommes dans la présente discussion, à savoir qu’il n’y a rien d'autre dans mon monde que ce que moi, ou ma pensée, y construit, autrement dit que la seule certitude qui soutienne ce monde, cette existence que je suis, c’est le fait même que “je pense”. A partir de là, il a dû, par la force des choses, refluer vers une position moins radicale, la même que celle qui transparaissait dans cette question que tu avais posée hier soir, Daniel, dans un premier jet, avant de la remplacer par ton dernier message (je cite de mémoire): “Mais les lois de cette construction, d’où viennent-elles?” La question n’est pas anodine, et Descartes se l’est posée lui aussi, quoi qu'en d'autres termes. Les faire dériver des données de l’observation sensible, ce serait à nouveau construire avec elles une représentation, et on se retrouverait donc au point de départ. Et pourtant, il y a bien là quelque chose qui me préexiste, quelque chose sur quoi je me fonde, quelque chose sur quoi je m’appuie pour pouvoir être, pour développer l’être que je suis. Descartes y a vu la preuve de l’existence de Dieu. C’est bel et bien une preuve, je crois, mais pas au sens de démonstration. Ce qu’a tenté de faire Descartes, c’est d’amener le lecteur à une certaine position intérieure, de le mettre en face d’une énigme qu’il doit se poser, et de se la poser avec une telle intensité qu’il bute nécessairement sur la réponse, qu’il se heurte à elle, qu’il la sente comme quelque chose qui surgisse de son propre mouvement et de sa propre collision avec soi-même et avec ses propres pensées.

Sancho (ici) a écrit:
Je fais donc l’hypothèse qu’il y a chez Descartes une stupéfaction émerveillée d’exister. Elle explique la forme d’autobiographie et de journal de ses deux œuvres les plus célèbres. Le sens profond du « je », chez Descartes, est de faire surgir le fait de cette existence au premier plan, comme une évidence aveuglante. Toute la philosophie de Descartes ayant par ailleurs la forme d’un effort de compréhension du monde (comme toute philosophie), il résulte qu’on devrait y voir un lien profond entre stupéfaction, choc, secousse d’exister, et compréhension. La compréhension du monde n’étant possible qu’à celui qui s’y inscrit stupéfait d’exister. Cette stupéfaction n’est pas la simple condition, le facteur subjectif qui permet de comprendre, mais la matière, la substance de la compréhension.

Le sens secret du « j’existe », et le sens secret de toute existence.

« J’existe » a donc chez Descartes un sens secret : « il est stupéfiant que j’existe ». Stupéfiant est différent d’ « étonnant ». On est étonné par ce qu’on ne comprend pas, on est stupéfait par l’incompréhensible. Chez Descartes plane le sentiment perturbant : il est incompréhensible que je sois.

(...)

L’idée cartésienne d’une création divine continue accentue d’ailleurs cette incompréhensibilité de toute création. Principes, I, 51 : « Il n’y a aucune chose créée qui puisse exister un seul moment sans être soutenue et conservée par (la) puissance (de Dieu) ». Autrement dit, l’acte inconcevable de la création se répète à chaque instant. Moi et le monde sommes reconduits à chaque instant en incompréhensibilité. Ce résultat est important et il est trop rarement mis en avant par ceux qui se targuent de comprendre Descartes : pour l’auteur du Discours de la Méthode, le monde créé est ontologiquement incompréhensible, au même titre que je le suis moi, en tant qu’existant.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé Envoyer l'e-mail Visiter le site web du posteur
daniel



Inscrit le: 15 Fév 2006
Messages: 461
Localisation: belgique

MessagePosté le: Me 11 Juil 2007 13:49    Sujet du message: Répondre en citant

joaquim dit :

Citation:
Et pourtant, il y a bien là quelque chose qui me préexiste, quelque chose sur quoi je me fonde, quelque chose sur quoi je m’appuie pour pouvoir être, pour développer l’être que je suis.


c'est exactement ça, c'est ce que je ressens, mais cela (ce quelque chose) m'est complètement insaisisable, tant, plus rien ne "m'appartient" (en vrai) dans "ma" représentation du monde ! et c'est très bien comme ça ! :good:
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
joaquim
Administrateur


Inscrit le: 06 Août 2004
Messages: 1421
Localisation: Suisse

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 0:28    Sujet du message: Répondre en citant

Et bien, voilà que nous touchons le point où nous nous retrouvons. Wink
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé Envoyer l'e-mail Visiter le site web du posteur
daniel



Inscrit le: 15 Fév 2006
Messages: 461
Localisation: belgique

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 2:16    Sujet du message: Répondre en citant

à présent, il ne me reste plus, il me semble, qu'à accueillir, ce qui vient, sans tenter de me l'approprier, n'est-ce-pas ?

joaquim dit, dans son interview, à l'accueil du site :

Citation:
en un instant, mon univers bascula, et je me suis retrouvé, moi, pauvre petite lueur vacillante, être le créateur, moi qui n’osais espérer un regard de tous ceux que je sentais si supérieurs à moi, tutoyer Dieu, faire partie de Lui, vivre en Lui par ce que j’avais de plus intime. C’était à la fois renversant et évident.



que veux-tu dire, exactement, par "je me suis retrouvé, moi, être le créateur...", je doute bien, que tu ne parles pas du "moi-égo", mais cela rejoint ce dont nous parlons, ici, non ? Rolling Eyes
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
feuille



Inscrit le: 09 Mai 2005
Messages: 353
Localisation: Paris

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 10:38    Sujet du message: Répondre en citant

Merci joaquim pour ce bel article de sancho sur Descartes... Smile Cela va sans nul doute participer à réhabiliter ce penseur que j'avais écarté un peu à tord...

Récemment, alors que je lisais un extrait des méditations métaphysiques, j'avais été interpellé par cette réflexion "je suis, j'existe" et je dois dire qu'elle m'avait beaucoup plus touché que le plus classique "je pense donc je suis"... L'histoire a essentiellement retenue cette deuxième forme (qui, me semble-t-il, est venue dans sa réflexion avant, dans le discours de la méthode, sous une forme temporaire du "je pense donc je suis" et qui a été reformulée par la suite par "je pense, je suis" dans les méditations) mais par cet effort de Descartes à aller au-delà de cette première évidence, il nous a livré là une bien belle pensée.

Par ce "je suis, j'existe", cette joyeuse secousse, nous retrouvons bien là un hymne vivifiant à cette évidence qui se révèle dans la vie de l'Homme... Le "J'existe" a se mouvement d'ouverture, cet élan de sympathie à la vie que l'on a du mal à déceler dans la terminaison un peu aride du "je pense, je suis"...

Finalement, ce "J'existe", c'est le côté mobile de la vie qu'il manquait à ce "Je suis". :fleur:
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
Plume



Inscrit le: 30 Oct 2005
Messages: 105
Localisation: Région Parisienne

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 11:23    Sujet du message: Répondre en citant

A propos du cogito, je suis d'accord avec feuille: il faut bien choisir la traduction, déjà. "Je suis, j'existe" est bien plus profond, que ce "donc je suis", qui instaure une relation causale un peu douteuse. Le problème avec Descartes, c'est à mon sens qu'il répondait en dernier à la question: est-ce que les autres existent? Je trouve cela très parlant. Il y a d'abord Dieu. Tout repose sur la preuve ontologique, sans elle, pas de "Je". Dieu lui-même n'est pas sans cause: il est "causa sui", cause de soi. Primat radical de la cause efficiente: tout objet, quel qu'il soit, doit avoir une cause, doit être un effet de quelque chose d'autre chez Descartes. On appelle cela, le mécanisme, point de vue sur le monde qui est celui de la science. La nature serait comme une grosse machine dont la raison découvre peu à peu les lois qui la régissent. L'homme se pose en "maître et possesseur de la nature"... Pensée héroïque et belle, s'il en est, mais c'est aussi un sollipsisme radical que je trouve très, très dangereux.

De plus, dans ce "Je suis, j'existe", Nietzsche verra une simple erreur de langage: en vérité, ce "Je" qui pense n'est pas cet autre qui existe. La grammaire utilise le même mot pour désigner deux choses différentes. Cependant, quelque chose de puissant est touché pour la première fois: le sujet un, l'ego, l'âme peut-être, en tant que "substance pensante"...

Merci Joaquim pour cet article, tu as l'art de poser les vraies questions, et de construire un vrai débat.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
aksysmundi



Inscrit le: 30 Mai 2005
Messages: 238

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 11:24    Sujet du message: Répondre en citant

daniel a écrit:
que veux-tu dire, exactement, par "je me suis retrouvé, moi, être le créateur...", je doute bien, que tu ne parles pas du "moi-égo", mais cela rejoint ce dont nous parlons, ici, non ?

Sans trop vouloir répondre à la place de joaquim, voici ma perspective : L'étonnement d'être révèle la grâce de la conscience, une conscience qui finalement déborde "je" mais qui pourtant ne peux s'exprimer autrement que dans l'intimité du "Je". Mais il s'agit là d'un "Je" qui ne peut être contenu dans une histoire, une expérience, un passé... Ce "Je" insaisissable et sans-âge qui soudain "nous saute aux yeux", dépouillé de toute appropriation, se révèle alors comme l'axe du monde et le fondement de toute chose.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé Envoyer l'e-mail Visiter le site web du posteur
joaquim
Administrateur


Inscrit le: 06 Août 2004
Messages: 1421
Localisation: Suisse

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 15:39    Sujet du message: Répondre en citant

Merci, feuille et Plume, d’affiner et de clarifier ces réflexions. Smile C’est vrai, “je suis, j’existe” me semble à moi aussi plus originel que “je pense, donc je suis”, en particulier à cause de ce “donc” qui introduit une causalité, autrement dit qui cherche à subordonner l’existence à un enchaînement de pensées, alors que l’existence englobe et surplombe la pensée de telle sorte qu’il semble bien illusoire de vouloir l’y enfermer. En fait, il me semble qu’il y a “je” qui pense, et que celui-ci pense parce qu’il s’étonne d’être. Euh... voilà que je rejoins, en croyant l’avoir quitté, le “donc” de Descartes. Que je formulerais dès lors ainsi: si je pense, c’est parce que les choses sont pour moi sujet d’étonnement, parce que je découvre dans l’enchaînement du monde quelque chose qui ne va pas de soi, et avant tout ma propre existence: celle-ci est la base à partir de laquelle tout se révèle à moi, et pourtant, elle pose question, et cela me donne beaucoup à penser; or c’est justement parce qu’elle me donne à penser que je me saisis moi, comme existant. C’est donc parce que je pense, que je me saisis comme être existant. La distinction introduite par Nietzsche (merci de la signaler, Plume) me semble importante: je pense, donc j'existe (ex-ister = être en-dehors). C’est parce que je me construis un monde, parce que je suis un monde à moi tout seul, que l’articulation entre le monde que je suis et le monde qui est pose problème. C’est parce que je ne suis pas identique au monde qui est, mais d’une manière énigmatique inclus en lui, que je peux penser, et que je suis même obligé de le faire, afin de tenter (vainement) de rétablir une harmonie brisée entre les deux. “Je pense, donc je suis”, cela veut dire que le fait de penser a partie liée de manière causale (?) avec le fait que je sois, à moi tout seul, un monde, et donc avec le fait que je suis.

Descartes a écrit le Discours dans la langue du peuple, en français, et les Méditations dans la langue savante, le latin. Je n’ai pas lu les Méditations, et je n’ai lu qu’en partie le Discours. Embarassed Mais ce qui me touche, dans le Discours, c’est le côté qu’en a fait ressortir Sancho, le côté en quelque sorte domestique, la manière dont Descartes nous emmène avec lui dans une promenade intérieure. Une promenade dans laquelle on découvre, en empruntant son regard, quelque chose en soi. Ainsi, par exemple, la manière dont il fait intervenir la preuve de l’existence de Dieu n’a à mon avis aucune force en tant que démonstration, c’est-à-dire en tant que raisonnement se déroulant exclusivement dans la pensée, mais elle en a bien en tant qu’événement, en tant que choc existentiel, si, ayant bien suivi Descartes jusque là, on arrive avec lui au bord de cette évidence, qu’on ne saurait produire soi-même quelque chose qui nous dépasse et nous englobe. La démonstration peut être récupérée par le "je" qui pense, certes, mais elle a pour but premier d’inviter celui-ci au contraire à se dépasser, à voir au-delà de l’horizon qu’il croit sien. C’est me semble-t-il le but que poursuit toute philosophie véritable. On a trop tendance à réduire la philosophie à un jeu conceptuel, alors qu’elle est, à la base, un chemin vers la sagesse. Pierre Hadot, par exemple, l’a très bien montré dans Plotin ou la simplicité du Regard”: le philosophe antique était un sage authentique, quelqu’un qui ne cherchait pas une réponse ou une solution dans la pensée seule, mais pour qui la philosophie était un mode de vie (Socrate en est l'exemple même). Le Descartes du Discours me semble s’inscrire dans cette lignée. Et cela même s'il est lui-même, et plus encore ses successeurs, tombé dans le piège du système, qu’il ait chosifiée l’étincelle qu’il avait aperçue pour en faire le socle sur lequel bâtir une philosophie qui tiendrait debout toute seule et rendrait compte de la marche du monde. Alors que ce faisant, il refluait au point de départ de son chemin, dans ce monde si étroit que l’on est lorsqu’on prétend le posséder et le maîtriser, et dont il avait furtivement aperçu la sortie.


daniel a écrit:
que veux-tu dire, exactement, par "je me suis retrouvé, moi, être le créateur...", je doute bien, que tu ne parles pas du "moi-égo", mais cela rejoint ce dont nous parlons, ici, non ? Rolling Eyes

Aksysmundi a parfaitement traduit ce que je voulais dire. On peut avoir une sorte de compréhension de l'éveil, lorsqu'on en parle comme on le fait présentement. Mais lorsqu'on le réalise, cette compréhension devient réellement sans fond: ce petit "je", oui, ce petit ego, que je m'imaginais être, est le créateur de tout ce qui est. Ce n'est pas un autre "je", c'est exactement lui, et pourtant, il est infiniment plus vaste que je l'imaginais lorsqu'il apparaît soudain comme ayant toujours été "l'axe du monde et le fondement de toute chose."
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé Envoyer l'e-mail Visiter le site web du posteur
daniel



Inscrit le: 15 Fév 2006
Messages: 461
Localisation: belgique

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 16:38    Sujet du message: Répondre en citant

ah, ce n'était, donc, que ça ! Laughing

merci les gars pour vos précisions ( et indications ! ) !

chapeau bas ! :sayonara:
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
Plume



Inscrit le: 30 Oct 2005
Messages: 105
Localisation: Région Parisienne

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 18:47    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
On a trop tendance à réduire la philosophie à un jeu conceptuel, alors qu’elle est, à la base, un chemin vers la sagesse. Pierre Hadot, par exemple, l’a très bien montré dans “Plotin ou la simplicité du Regard”: le philosophe antique était un sage authentique, quelqu’un qui ne cherchait pas une réponse ou une solution dans la pensée seule, mais pour qui la philosophie était un mode de vie (Socrate en est l'exemple même).


Sur ce thème, Pierre Hadot a aussi écrit Qu'est-ce que la philosophie antique?, où il développe la même idée en étudiant successivement les plus grandes philosophies anciennes: le sage pratiquait activement sa philosophie, et l'on pouvait dire rien qu'en le regardant: "cet homme est un philosophe". La philosophie était l'exercice de la vie spirituelle, le sage était un modèle pour la jeunesse (surtout à l'époque d'Epicure, où Athènes vascillait et les dieux perdaient de leur influence). Chaque école (Portique pour les stoïciens, Jardin pour les épicuriens, Académie, Lycée... ) proposait sa sagesse propre, sa façon de vivre, car le but ultime était d'améliorer l'existence des hommes, pas de découvrir la vérité pure. Une vérité qui ne sert à rien ne vaut rien. :sayonara:

Lorsqu'Aristote distingue puissance et acte, ou matière et forme, il le vit, il incarne cette idée en la faisant sienne, et il devient autre: son regard est alors celui d'un sage, et à le regarder vivre, on sait ce que vaut cette sagesse. Des philosophes malheureux, manquant d'autonomie, paniqués, prouvent par leur comportement que leur sagesse n'apporte rien de positif, qu'elle est factice. Celui qui ne vit pas selon son propre enseignement est un charlatan.
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé
Zitouna



Inscrit le: 24 Juin 2007
Messages: 69
Localisation: Trois-Rivières (Québec)

MessagePosté le: Je 12 Juil 2007 18:55    Sujet du message: Répondre en citant

Plume a écrit:
Celui qui ne vit pas selon son propre enseignement est un charlatan.


old_man Amen! :ange?:
Revenir en haut
Voir le profil du membre Envoyer un message privé MSN Messenger
Montrer les messages depuis:   
Ce forum est verrouillé, vous ne pouvez pas poster, ni répondre, ni éditer les sujets.   Ce sujet est verrouillé, vous ne pouvez pas éditer les messages ou faire de réponses.    Index du forum -> Littérature Toutes les heures sont au format GMT + 2 Heures
Aller à la page Précédente  1, 2, 3, 4, 5, 6, 7  Suivante
Page 6 sur 7

 
Sauter vers:  
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages
Vous ne pouvez pas voter dans les sondages


Powered by php B.B. © 2001, 2002 php B.B. Group
Traduction par : php.B.B-fr.com